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lundi 7 octobre 2019

DEUXIÈME INTERVENTION


ETUDE DE TEXTE
DEUXIEME INTERVENTION DE BORIS DIOP

Boris introduit par la réplique suivante : « Mon texte qui s’est voulu courtois – mais sans concession sur le fond – t’a fait sortir de tes gonds, à la surprise générale. »

Nous remarquons que ce n’est pas du tout la nature ni la tournure de votre texte. Monsieur Diop, votre texte ne s’est pas voulu courtois. Dans le texte que vous citez, vous avez attaqué, une attaque, gan d’acier dans du velours et maintenant vous quittez l'affut pour l'affront. Cette nouvelle sortie le prouve. Ainsi donc vous êtes revenu sur vos pas comme quelqu’un vers la maison après s’être rappelé y avoir oublié ses clés.


« Je n’aurai donc réussi, en cherchant à te secouer un peu, qu’à te blesser. J’ai dû toucher quelque point sensible et tu m’en vois désolé. »

Ces phrases ne sauraient être plus couvertes de malhonnêteté intellectuelle. C’est vous qui vous êtes senti blessé par un texte âgé de plus de 20 ans et qui avez sorti vos griffes. Dès le premier texte, nous avions bien saisi deux mots clés, la création du laboratoire n’étant qu’un prétexte : unicité linguistique, une thèse idéaliste et non réaliste dans l’état actuel des choses aussi bien au Sénégal qu’à travers l’Afrique mais qui ne peut ni de ne doit être remise en question parce que provenant de votre dieu qui n’en est d’ailleurs pas le père précurseur, et puis la juxtaposition de la traduction de textes sciences-poésie. Que nul ne soit pas dupe : dès que ces deux termes sont mentionnés, vous allez chercher, l’on ne sait de quelle fontaine née de quels marécages une incompatibilité innée Senghor-Cheikh Anta, un péché qui est la juxtaposition de deux figures sénégalaises emblématiques. Nous verrons plus bas ce que nous avançons, quand vous faites expressément appel à un duel en Bretagne ou en Normandie.


« Les invectives sont nuisibles à la dignité de ce débat et il vaut mieux que nous les évitions. Encore faudrait-il que tu fasses l’effort de distinguer la critique de l’affront. Tu as quand même un peu fait rire à tes dépens avec cette étrange histoire de vouvoiement. Encore heureux que tu ne m’aies pas provoqué en duel sur je ne sais quel pré de Bretagne ou de Normandie. »

Oui, Monsieur Diop, « les invectives sont nuisibles à la dignité de ce débat » qui ne devrait même pas voir le jour. Et non !, Monsieur Diagne n’a pas fait rire à ses dépens, et tout au long de ce texte, vous l’accusez de vos propres forfaitures. Vous voyez, contrairement à beaucoup, nous pensons que ce dialogue, tel qu’il se présente, n’aurait pas dû exister. Nous aurions aimé voir un texte de vous en forme de thèse, ou antithèse, c’est-à-dire une autre vision que celle venant de Bachir, si différence de visions il y a, mais une vision argumentée et non cette approche venant uniquement de vous et, de surcroît, est plus que de bas étage. Et puis ça suffit ! Vous devriez savoir qu’un laboratoire n’a pas pour fin sa création, mais les résultats des recherches qui y sont menées.
Ainsi donc, nous vous demandons de bien vouloir nous lister les fruits du laboratoire de datation au carbone 14 de Dakar qui sont sa finalité. Quelles en furent les percées dans le domaine scientifique ? Y a-t-on changé un paradigme scientifique ? Et ne me dites pas qu’on y a daté tel ou tel échantillon ! Ce serait comme le boutiquier qui me dit qu’il sait mesurer un litre d’huile quand un client se présente. Nous parlons de percée, puisque vous voulez votre pharaon si grand. Donnons des exemples de percées pour illustrer ce que nous voulons dire car nous ne voulons aucune autre lecture de notre pensée comme ce fut le cas concernant le texte de Monsieur Bachir Diagne :

  • Le VIH2 est un résultat du laboratoire de l’hôpital le Dantec avec la collaboration de Monsieur Souleymane Mboup et des équipes étrangères. Ici, à notre connaissance, sa création n’a jamais fait de polémique, la collaboration scientifique qui s’y est déroulée n’a pas été dénaturée de son africanité à cause de la participation d’acteurs étrangers : l’essentiel est qu’il a fait et continue de faire des résultats. C’est ce côté théorique, certainement contagion d’intellectuels comme vous qui font que de nos universités ne sortent en majorités que théories, mises à part les grèves et les casses de biens publiques.
  • Lucy, ou Dinqnesh, fossile de l'espèce éteinte Australopithecus afarensis fut découvert en 1974 sur le site de Hadar, en Éthiopie, par une équipe de recherche internationale. Ce fossile est daté de 3,18 millions d'années.
  • Edwin Powell Hubble astronome américain, dans la nuit du 13 mars 1781, découvrit au cours d'une observation, la planète Uranus, croyant d'abord avoir affaire à une comète ou à un disque stellaire.
Voyez-vous, nous avons beaucoup de respect pour Cheikh Anta Diop et sommes foncièrement d’avis qu’il faut toujours rendre à César ce qui est à César. Mais, comprenons-nous, seulement ce qui est à César ! Ne nous forcez donc pas à une réévaluation – un audit intellectuel - de ce qui a été accompli par rapport aux ressources mises à disposition. Devrions-nous aller jusqu’à nous demander si c’est un vide, résultat inexistant, que l’on a voulu couvrir par un vol ? Ne conviendrez-vous pas que dans les laboratoires gérés sérieusement et correctement, il y a toujours une collaboration internationale car, avant de publier une découverte dans un journal officiel scientifique, le bon sens est qu’il faut premièrement les exposer et en discuter avec d’autres experts du même domaine ? Dans un tel cas, c’est sûr que s’il y a un résultat dans le laboratoire, il y aurait forcément un « backup informationnel» au niveau des collaborateurs. Donc vous voyez, Monsieur Diop, que cela pourrait faire très mal, car le cas contraire dénoterait un cavalier solitaire dans un domaine qui demande de la collaboration, ou bien un manque total de productivité au sein dudit laboratoire. Il faut cesser de nous rabâcher les oreilles sur la création du laboratoire. Parlez-nous de résultats !

« Serions-nous tous devenus fous au point de ne même plus pouvoir discuter – un peu rudement, certes – de nos affaires sans nous prendre les pieds dans le tapis des autres, pour paraphraser Ki-Zerbo ? Sans jamais avoir été des amis, nos relations sont plutôt restées cordiales au cours des ans. Mais tu sais bien que nous avons rarement l’occasion de nous voir. La dernière remonte à plus d’une décennie. Alors, Bachir, se dire ‘’tu’’ ou ‘’vous’’ une fois tous les quinze ans, ça rime à quoi, surtout à nos âges ? »

Très bonne question ! Mais l’acharnement, voire l’animosité, vient de vous et c’est nous qui devrions vous demander pourquoi vous voulez associer Monsieur Diagne à la folie qui est uniquement vôtre et même en faire l’initiateur ! L’autosuffisance de votre style laisse percer une fausse honnêteté : Vous voulez psychologiquement vous rapprocher de Bachir en forçant un « tu » alors qu’en même temps vous dites « Sans jamais avoir été des amis, nos relations sont plutôt restées cordiales au cours des ans ». D’aucuns vous soupçonnent de vouloir vous faire une audience à travers la personne de Bachir. Nous espérons que ce n’est pas à l’égal de Mark David Chapman, un fan déséquilibré souffrant de psychose qui, le 8 décembre 1980, à 22 h 52, tira quatre balles de revolver sur John Lennon. Vous dégainez l’amitié, la cordialité, le poids de vos âges comme autant d’épées de mauvaise foi. Ignorez-vous donc le conseil qui est « d’enlever la poutre qui est dans votre œil avant d’essayer d’enlever le grain de sable qui est dans celui de votre prochain » ? A notre avis vous devez vous ressaisir.


« Tu as été tellement aveuglé par ta colère que tu me reproches injustement à deux ou trois reprises d’avoir présenté ‘’In the Den of the Alchemist’’ comme une interview. Voici ce que tu écris à ce sujet : “Le propos que l’auteur – moi-même en l’occurrence – présente comme une interview récente n’est pas une interview et n’est pas récent : c’est la reprise, des décennies plus tard, d’un article dont seul le titre a été changé.’’ Dis-moi franchement : peux-tu relire ce passage de ton texte sans embarras ? N’importe quel lecteur peut bien voir que l’allégation est totalement fausse car j’analyse l’un après l’autre l’article de Chimurenga et des éléments de l’interview que tu as accordée à Elara Bertho et que SenePlus a reprise sous un titre assez délicatement “diagnien“: “Un universel comme horizon’’ ».

Ceci est le comble de la folie. Monsieur Diagne a écrit un texte, vous vous êtes senti offensé jusqu’aux extrêmes limites et c’est pourtant lui qui est aveuglé par la colère ? Tel ne nous emble pas être le cas et, même si c’était le cas, il est dans droit car c’est vous qui l’avez attaqué sans fondement digne d’être taxé intellectuel ! Par ailleurs, si vous prenez en compte deux sources différentes issues de deux contextes, peut-être que vous auriez du, rédactionnellement parlant, en faire la claire séparation. Encore une faute, peut-être parce que la folie colérique vous empêche de laisser libre cours à l’étincelle de la raison. L’allégation ne vient pas de Monsieur Bachir Diagne, mais de vous. Vous avez tort quant au laboratoire, vous n’avez aucun droit de faire prévaloir une vision utopiste d’unicité linguistique sur une vision réaliste sans apporter une thèse ou antithèse. Enfin, quant au dernier point, vous n’avez absolument rien, mais rien compris de ce qui fut dit sur la traduction poésie-textes scientifiques.


« Pour ce qui est de mon aptitude à comprendre un texte dans la langue de Shakespeare, sache seulement que je t’écris ces lignes du campus de l’Université américaine du Nigeria (AUN) où depuis quatre ans j’enseigne, en anglais, en plus du creative writing, les auteurs anglophones et francophones, ces derniers en traduction anglaise. Tu ignores aussi, je suppose, qu’ici même au Nigeria mais encore plus aux Etats-Unis, je ne cesse de faire des présentations en anglais. Cela a été le cas récemment au National Press Club de Washington DC pour le 25ème anniversaire du génocide contre les Tutsi au Rwanda puis quelques jours plus tard à Dickinson University au moins sept ou huit fois en deux semaines mais avant tout cela à Mac Allaster, à Boston et à Stanford. J’aurais préféré ne pas avoir à préciser tout cela. J’ai en effet toujours préféré rester en retrait de la vie publique en tant que personne tout en prenant systématiquement position sur les questions politiques ou sociales de l’heure. »

Bravo ! Vous fulminez avec Etats-Unis, Washington DC ; Dickinson University, Mac Allaster, Boston, Stanford, et pourtant c’est Monsieur Diagne l’occidentalisé ! Vous voyez, Monsieur Diop, vous brandissez une africanité dont vous vous faites détenteur de patente et une exclusivité pour vous et vos idoles. Mais n’est-ce point une africanité aussi utopique que l’unicité linguistique qui ne saura venir que naturellement dans un rapport de force économico-militaire, africanité en lambeaux jusque dans le fond de nos âmes ? Comme ceux des « France dégage », vous manquez de la vision Realpolitik qui seule nous aidera à faire face à la réalité quant aux possibilités de développement. C’est que, sans le savoir ou bien à dessein, nous africains, surtout au Sénégal, sommes tombés de Charybde en Scylla, raison pour laquelle, en fuyant notre histoire écrite par les colons nous tombons dans une autre qui, pour certains, ne saurait aller au-delà des années 1870 malgré le fait que ce fut suite à la conquête des Almoravides que commença l'islamisation de la région du Sénégal comme ce fut suite à la conquête française que cette même région fut christianisée. C’est dire que d’un côté comme de l’autre nous fûmes conquis. C’est dire que nous trépignons d’un côté à cause d’une couleuvre et allons directement dans la gueule béante d’un crocodile. De quel côté se trouve votre africanité ? Qu’est-ce que c’est en fin de compte, puisque vous la voulez sans tâche ? « Suñu mbaaxu maam » ne dépasse donc pas deux cents ans ? Et quel côté, raisonnablement paraît armé de moins de danger, la gueule d’une couleuvre ou celle d’un crocodile ?
Pour clore ce paragraphe vous dites : « J’aurais préféré ne pas avoir à préciser tout cela. J’ai en effet toujours préféré rester en retrait de la vie publique en tant que personne tout en prenant systématiquement position sur les questions politiques ou sociales de l’heure. » Bravo, c’est justement une propriété de l’humilité du discours politique lorsqu’un ministre exhibant un bilan vous dit : « Je ne vous parlerai pas des 150 écoles construites à tel, ni des 30 forages et des 1500 moulins distribués » ! Fausse modestie. C’est ce que tout le monde a dit et pourtant, contrairement à vos dires, c’est vous qui avez déterré la hache de guerre. N’êtes vous pas un « wax ji rafet, jëf ji ñaaw » ?


« Vois-tu, Bachir, personne n’a la science infuse. Tout s’apprend et ma langue maternelle aussi j’ai guerroyé avec elle en solitaire pendant des milliers d’heures pour en maîtriser l’écriture. Comme tu le sais, j’y ai aujourd’hui à mon actif deux romans et la traduction d’une pièce d’Aimé Césaire. Je n’évoquerai qu’au passage les oeuvres littéraires que mes amis et moi-même publions à travers EJO, notre maison d’édition en langues nationales, le label de traduction “Céytu’’, le sous-titrage en wolof de KEMTIYU, le documentaire d’Ousmane William Mbaye sur Cheikh Anta Diop et, last but not least, le site d’information en ligne « Lu defu waxu », tenu pour l’essentiel par certains de mes anciens étudiants de wolof de l’université Gaston Berger. »

La science infuse, personne ne l’a, sauf vous, Monsieur Diop, raison de vos attaques puisque vous n’acceptez pas la vision de quelqu’un d’autre. C’est pour cette même raison que vous vous proposez en modèle pour Bachir. Ne l’invitez-vous pas à se mettre à sa langue maternelle ? Peut-être s’il le faisait il n’y passerait pas des milliers d’heures – signe de médiocrité – pour la maîtriser. Je connais des personnes dignes qui sont derrière les publications que vous mentionnez et vais rien dire qui les froisserait. Mais reste un signe pertinent : le titre même de « Ceytu », nom du village natal de Cheikh Anta confirme notre vision qui est que vous ne défendez pas une idée et, partant, une base intellectuelle, mais une personne.


« Tu as par ailleurs mis en avant l’âge de ton texte : plus de vingt ans, dis-tu. C’est beaucoup, oui. Sauf que Chimurenga ne mentionne nulle part que L’antre de l’Alchimiste est une reprise, sous un titre totalement différent, d’un très vieil article. J’ai moi-même contribué par un long article à ce numéro spécial d’avril 2018 sur Cheikh Anta Diop où tu l’as republié et une telle indication ne m’aurait sûrement pas échappé. À vrai dire, je comptais réagir très brièvement à ton observation sur l’ancienneté de ce texte mais des amis m’ont dit, horrifiés : “Déet, loolu ëpp naa def, exprime-toi clairement là-dessus car même ceux qui t’aiment bien sont en train de se demander pourquoi tu as présenté un article datant de deux décennies comme étant beaucoup plus récent !’’ Retiens donc ceci : si j’avais eu connaissance de la première date de parution de “In the Den of the Alchemist’’, je l’aurais signalée avant d’en proposer exactement la même analyse. Après tout, en le faisant reparaître tu nous as invités à le considérer comme actuel. Et tu as bien eu raison : un texte de vingt ans peut être bien plus “jeune’’ qu’un autre datant seulement de deux semaines. L’âge est moins fonction ici de la plate chronologie que du contenu. Or, “In the Den of the Alchemist’’ peut revendiquer à bon droit une certaine intemporalité. Sur cette question, ton indignation me semble plutôt feinte. Pourquoi aurais-je usé d’un tel artifice en sachant que tu pourrais t’en servir pour m’accuser de “mauvaise foi’’ ? Crois-moi, si j’avais été un “cynique’’ mû par de “sinistres’’ desseins, je n’aurais pas frappé avec un tel amateurisme. »

Oui, Monsieur Diop, vous êtes tombé deux fois dans le piège. Lorsqu’à certaines de vos connaissances vous avez décliné votre intention de réagir pour la première fois, elles vous l’avaient déconseillé. Vous avez foncé et, une fois bien mouillé, elles ne pouvaient que vous conseillez de réagir, c’est-à-dire le contraire du premier conseil. Là aussi, vous auriez pu vous affranchir en posant une invitation au dépassement, mais non ! Vous attaquez de plus belle et vous tombez dans le piège de l’offense, car ici, comme le père de Chimène, vous êtes l’offenseur. Vous avez justement agi avec pire qu’un amateurisme, déception pour tous ceux qui vous couvraient d’un manteau de dignité intellectuelle que l’on voit maintenant pure apparence. Vous avez fait un mur de ce qui n’était que voile transparent.


« Je dois ajouter ici une petite information assez intéressante dans le contexte de cette polémique : dès mai ou juin 2018, une amie, brillante universitaire américaine et donc parfaitement anglophone, rendue furieuse par “In the Den of the Alchemist’’ y a répliqué par un article intitulé Dans la tanière de l’Alchimiste : hommage ou dédain de Souleymane Bachir Diagne envers Cheikh Anta Diop ? Et tu sais quoi ? C’est ton humble serviteur qui l’a dissuadée de le publier. Pourquoi ai-je agi ainsi, alors que j’étais entièrement de son avis ? Parce qu’en bon Sénégalais, je ne goûte pas spécialement les affrontements verbaux. En réalité, sans ton entretien avec Elara Bertho, je m’en serais tenu à cette position. Il me semble essentiel de rappeler à l’intention de ceux qui s’interrogent, en toute bonne foi, sur mes motivations que c’est à cette interview très récente, faite en français, que j’ai prioritairement répondu. »

Dommage, il aurait fallu laisser « cette brillante amie universitaire américaine », brillante parce qu’elle partage les mêmes idées que vous, publier son article. Vous nous avez refusé certainement un plaisir intense car cela aurait présenté une relecture africaine si profonde – contrairement à la vision de l’occidentalisé Bachir Diagne ? – . Pourquoi l’en avez-vous dissuadée alors que vous êtes de même avis ? Parce que, dites-vous, « en bon Sénégalais, je ne goûte pas spécialement les affrontements verbaux ». Mais justement vous êtes tombé dans un autre piège : le bon Sénégalais actuel adore les affrontements verbaux, ce que vous faites exactement par la multiplication des attaques par articles interposés. Ou bien vouliez-vous vous inspirer de l’article de la brillante universitaire pour mieux affuter vos flèches ? Vu la tournure de vos textes, rien, penchant vers la négation et venant de vous ne saurait nous surprendre.


« Tu admets avoir attribué la paternité du Laboratoire de Carbone 14 à Théodore Monod et Vincent Monteil. La moindre des choses aurait été de nous dire dans ta réponse ce que leurs deux noms viennent faire dans cette histoire. »

La paternité ? C’est une expression ouverte, Monsieur Diop. Il faudrait peut-être aller à Ceytu et demander à Cheikh ce que fait le nom de Monod attribué à une salle du laboratoire, si je ne me trompe. Mais le fait de vous embourber sur la paternité aurait eu tout son sens s’il s’agissait d’un enfant, pas au sujet d’un laboratoire dont, à la phase actuelle, seuls comptent les résultats y ayant été atteints. Toute autre discussion ne serait que de mauvais goût pour ne pas dire simplement ridicule. Là vous tombez dans le contraire de ce que vous avancez quand vous dites explicitement : qu’en « Sénégalais, [vous] ne goûte[z] pas spécialement les affrontements verbaux »


« Dans Figures du politique et de l’intellectuel au Sénégal (Harmattan, 2016) le Professeur Djibril Samb, par ailleurs ancien directeur de l’IFAN, raconte en détail la création du laboratoire. Voici ce qu’il écrit dans cet ouvrage dont on ne saurait trop recommander la lecture à tout un chacun : “Dès le début de sa carrière, Cheikh Anta Diop conçut le projet – qui pouvait paraître utopique à plus d’un – de monter, au sein de l’IFAN, un laboratoire de datation au radiocarbone.’’ Diop obtient alors du Recteur de l’époque, Claude Franck, l’autorisation de se rendre en France pour étudier les installations du laboratoire de Saclay qui allait lui servir de modèle. “À son retour, écrit Djibril Samb, il se consacra tout entier à cette tâche gigantesque. Il dressa lui-même les plans du laboratoire dont l’exécution fut confiée au service des Travaux publics. Mais il faut mal connaître l’homme pour penser qu’il se fût contenté de dresser une liasse de plans et d’aller pêcher. Ce projet était d’abord le sien, et il s’y engagea tout entier comme dans tout ce qu’il faisait, déployant toutes les facettes, non seulement d’un immense savant mais d’un homme d’action, pragmatique, attentif aux moindres détails. Dans une lettre en date du 25 juin 1963 adressée au Directeur de l’IFAN, le grand et regretté Théodore Monod, il rappelle qu’il donnait lui-même des indications aux entreprises maîtres d’oeuvres, effectuait deux à quatre visites quotidiennes sur le chantier, précisait les plans d’installation du laboratoire, en fixait les pièces, déterminait leurs dispositions et leurs vocations, redressait les directives ou les applications erronées’’.

Monsieur Diop, basta ! Il faut arrêter ce charabia sur la création du laboratoire, lambeau de dignité que l’on ne devrait plus quémander pour le géant Cheikh Anta Diop. Ce qui pourrait intéresser, encore une fois, c’est des résultats émanant du laboratoire. Nous pensions que vous aviez dépassé ce stade ridicule, cette arène de vide où nous autres sénégalais aimons soulever des bras de dignité absente. Vous suivez la même trajectoire que ceux qui voulurent déboulonner la statue de Faidherbe mais n’osaient piper mot sur le pont. Vous suivez la trajectoire de ceux qui, comme des hyènes sous l’adrénaline de la faim, crânent leurs « Auchan dégage » et sont incapables de gérer leurs poubelles le long des marchés. Vous suivez la trace des « France dégage » et qui font appel à la France pour un incendie ou une petite inondation qui ne devrait même pas exister, comble de ridicule, si ce n’est attendre, la bouche béate que descende une force Barkhane pour libérer des hôtels. Enterrez votre fierté ridicule qui est en train de vous bouffer pire que la colonisation. Vous citez Monsieur Samb dont la vision vous convient et refuser des citations à Bachir. Espérons seulement que votre Samb n’est pas comme Iba Der Thiam qui, malgré le titre promettant qu’il va trancher votre duel avec Monsieur Bachir nous amène ceci : « Boris Diop est un patriote, un Sénégalais compétent, un intellectuel de haut lignage qui a fait ses preuves dans le domaine, dit-il. "Il ne connait aucune hypocrisie, il est incapable de dire du mal de qui que ce soit mais qui est également suffisamment objectif pour ne faire que ce qui rencontre ses convictions", a-t-il témoigné. Soulignant que Bachir Diagne "fait partie des personnes dont la voix compte dans le monde actuel. Qu'eux deux n'aient pas la même opinion, cela ne me fait pas peur. Au contraire, ça me fait plaisir". L'historien de poursuivre dans la foulée: "Ce n'est pas pour moi un problème que les anciens Directeurs de l'IFAN aient travaillé sur le projet. C'est Cheikh Anta Diop qui a donné au laboratoire Carbone 14 ses lettres de noblesse. C'est lui qui l'a fait connaitre à l'extérieur et c'est lui qui lui a permis de dater un certain nombre d'objets qui ont permis de révolutionner tout le reste. C'est pourquoi, conclut-il, "prouver que l'Afrique était le berceau de l'humanité n'était pas facile. Cheikh Anta Diop l'a prouvé. Donc, que ces deux aient une polémique, je dis que je lis avec délectation tout ce qu'ils écrivent. Et j'en suis d'autant plus heureux que je ne vois aucun propos discourtois, aucun jugement de valeur, aucun comportement de violence verbale. Mais uniquement une grande dignité et une élévation de pensée et une capacité de réflexion qui honorent notre intelligentsia". Vous voyez, il a réellement tranché. A votre avis ?


« Le récit de Djibril Samb se poursuit ainsi sur près de dix pages. Cheikh Anta Diop avait le plus grand respect pour Monod à qui il rend d’ailleurs hommage quelque part. Ce n’est donc pas un hasard si son nom apparaît dans Figures du politique et de l’intellectuel au Sénégal ; Monteil et lui peuvent être crédités d’avoir dans leur rôle administratif, permis à Diop d’aller au bout de son grand rêve. Lui-même a dès 1968 consacré un ouvrage à son laboratoire et je constate avec stupéfaction que tu ne l’as pas lu pour les besoins de ce que tu présentes comme un hommage. Il y fait état des résultats des premières datations à partir de trois échantillons fournis respectivement par Théodore Monod, le laboratoire de Saclay/Gif-sur-Yvette et une mission archéologique britannique en Gambie. Cela dit, s’il est un directeur de l’IFAN qui aurait mérité d’être nommé, c’est Amar Samb avec qui Cheikh Anta Diop avait des relations exceptionnelles, comme en témoigne l’ouvrage qu’il lui a dédié en des termes émouvants. »

Il a consacré un ouvrage à son laboratoire ? C’est quoi ce truc ? Espérons que c’est par analogie et que ce que veut dire Monsieur Samb est qu’il a consacré un ouvrage aux travaux accomplis dans le laboratoire. Pour ce qui est de la courtoisie, comme Monsieur Thiam le souligne, c’était peut-être relatif à votre première intervention, qui était loin d’être courtoise d’ailleurs, et n’avait pas encore lu votre deuxième sortie virulente. Nous ne sommes pas dupes : la violence verbale déterrée durant cette deuxième intervention était sous-jacente dans votre premier texte. L’on se demande comment, devant ces textes justement, Monsieur Iba Der Thiam peut venir avec un tel charabia. Votre entêtement à soulever tant de poussières sur le côté le plus superficiel d’un laboratoire ne peut qu’émousser les doutes. Ainsi vous voulez donc reléguer le rôle de Monod et de Monteil au rang de purs spectateurs ? C’est sûr qu’ici vous ne piperez mot sur la relation entre Cheikh Anta et Frédéric Joliot-Curie sous la direction de qui il entreprit une spécialisation en physique nucléaire au Laboratoire de chimie nucléaire du Collège de France puis à l'Institut Pierre et Marie Curie, à Paris. Vu votre attitude l’on voit que vous dégainez des noms ailleurs pour rehausser Cheikh Anta et, lorsque le mérite personnel risque d’être entaché vous taisez tout. Tous savent ce que représente le nom Curie dans la physique nucléaire depuis Pierre et Marie Curie, celle-ci étant celle qui démontra que la propriété des rayons uraniques est une propriété physique de l'atome et non une propriété chimique : la radioactivité. Il faut accepter qu’il n’était pas omniscient dans le domaine jusqu’à pouvoir faire tout seul les installations du laboratoire, raison pour laquelle « des relations de travail furent établies entre l'IFAN et le CEA français (Commissariat à l'Énergie Atomique)/CNRS (Centre National de la Recherche Scientifique français) au travers, entre autres, de Jean Le Run, qui avait monté le premier ensemble de datation par le radiocarbone du CNRS à Gif-sur-Yvette, de Jacques Labeyrie, Directeur du CFR (Centre des Faibles Radioactivités) et Georgette Delibrias (Directrice du Laboratoire du Radiocarbone du CFR) ». Prenons une approche complémentaire basée sur une logique froide et qui est le point saillant que vous voulez faire comprendre à tout le monde : présenter Cheikh Anta comme celui qui était à abattre par tous les moyens durant ses études, durant ses thèses et dans ses recherches. Mais Monsieur Diop, si les français voulaient vraiment l’abattre, comme vous voulez le faire comprendre, auraient-ils accepté de lui fournir un laboratoire ? Si c’est non, vous devez retirer toutes ces allégations sur l’animosité, voire la « méchanceté », que vous prêtez aux français. Dans le cas contraire, vous devez retirer Cheikh Anta de la possibilité d’avoir un laboratoire à l’IFAN et de savoir que c’est grâce aux tractations de français, nommément Monod et Monteil, que ce fut possible. Alors, Monsieur Boris Diop, faites attention de ne pas atterrir justement dans la boue que vous voulez éviter pour Cheikh Anta en l’y entraînant avant tout le monde. Il n’y a pas de feu sans fumée, dit-on. Si ce bruit persiste, le bénéfice du doute sur les choses que vous avancez se transformera en incrédulité. Comme vous savez, personne ne doutera jamais que la Statue de la Renaissance Africaine est du Président Abdoulaye Wade, ni que le pont de Saint-Louis fut construit sous Faidherbe. Si des doutes persistent, peut-être que c’est uniquement parce que vous tentez de rendre à César plus que ce qui lui appartient.


« Tu n’as pas non plus démenti ce que j’ai écrit sur la soutenance de thèse de Diop. La mention qui l’avait sanctionnée était-elle juste ? Se contenter de la rappeler au passage n’est pas la meilleure façon de mettre Diop en valeur. La qualification de “l’Alchimiste’’ ne peut être un point de détail dans un texte comme le tien. Le face-à-face de Diop le 9 janvier 1960 avec un jury de la Sorbonne a été un moment copernicien dans l’histoire des idées en Afrique francophone. Et ce n’était là que le prélude à un autre affrontement direct, quatorze ans plus tard, au Caire. »

Si la mention avait été « excellente », vous n’auriez certainement rien dit. Mais voilà que Monsieur Diagne retrace la vérité, un simple fait historique et vous lui en voulez. Pire encore, vous pensez que cette mention honorable n’honore pas et n’a été relatée que pour diminuer Cheikh Anta. Peut-être que oui, peut-être que non. Mais peut importe. Il a eu cette mention, point final. Est-ce pour cette même raison qu’ailleurs vous exhibez les femmes françaises des autres, mais ensevelissez la femme française de Cheikh Anta, Louise Marie Maes, avec laquelle il eut quatre enfants ? Parce que cela l’aurait dénaturé ? Cela aurait-il enlevé l’africanité du grand homme ? Certainement et pas selon notre conception, mais uniquement selon la vôtre qui est une conception insensée de l’africanité. Selon la vôtre, disons-nous, puisqu’en d’autres circonstances vous l’agitez jusque dans vos universités comme un critère éliminatoire de pure africanité. Autre chose : vous ne disconviendrez pas que se battre devant un jury de thèse n’est pas chose exceptionnelle. Nous avons un ami, chef d’un département de mathématiques, section CNRS d’une université qui a eu beaucoup de déboires avec son jury lors d’une présentation de thèse de doctorat en mathématiques, homme qui est parmi les pères de l’IPV6. L’on raconte qu’il fut même éjecté de la salle après cinq minutes d’assises. Il y a eu aussi d’autres qui se mirent dos à dos avec leur maître de thèse jusqu’à ce que l’université fasse venir un autre encadreur, tellement l’antagonisme était virulent. Enfin, un autre et dernier exemple, dans la mini-série documentaire « Chercheuses d’étoiles » composée de quatre épisodes, on présente Cécilia Payne, astronome anglo-américaine et première femme nommée chef du département d'astronomie de Harvard en 1956. « Payne est notamment connue pour avoir été, en 1925, une des premières astronomes à envisager que les étoiles sont composées majoritairement d’hydrogène, ce qui allait à l'encontre du consensus scientifique de l'époque. Elle montra que la grande variation dans les raies d'absorption est due aux différences d'ionisation qui se produisent aux différentes températures, et non à des différences de composition, et découvrit que les étoiles ont toutes une composition en éléments lourds semblable à celle de la Terre, mais que l'hélium et l'hydrogène y sont beaucoup plus abondants. En 1924, elle rédigea un article en ce sens mais quand elle le fit relire par Henry Russell, il la dissuada de publier sa découverte, arguant que la Terre et étoiles doivent avoir une constitution semblable. Or Russell a été le professeur de Harlow Shapley, qui est le patron de Cecilia Payne, et s'il n'est pas convaincu, personne ne le sera : Cecilia s'incline. En 1925, elle soutint cependant sa thèse, intitulée « Stellar Atmospheres, A Contribution to the Observational Study of High Temperature in the Reversing Layers of Stars », où elle présenta ses travaux et conclusions, mais laissa de côté la question de l'hydrogène. Après avoir atteint les mêmes conclusions par d'autres moyens, Russel réalisa que Cecilia avait raison. Dans une publication parue en 1929, il reconnut l'antériorité de la découverte de Payne. Néanmoins, cette découverte lui est souvent attribuée. » Cela aussi est compréhensible, sauf que si cela avait été envers un nègre l’interprétation aurait été autre et mise sur la balance du racisme ou bien d’une volonté malintentionnée tenta de réduire l’autre sur la base d’une africanité dénaturée ou d’une volonté politique assassine. C’est pourquoi un internaute clairvoyant a dit après votre deuxième intervention que « ça commence à ressembler à une bataille de chiffonniers qui n’en finit plus. Une sortie de trop. Dommage ! ».


« D’autres passages de ton article – notamment ta description enjouée et pittoresque du cambriolage du labo – sont révélateurs d’une prise de distance parfois un peu déroutante. À qui s’adresse donc ta petite musique pleine de charme et d’ironie ? Désolé de te le dire mais tu sembles parler de si loin que le mot “exotisme’’ m’est venu à l’esprit. Un terme bien curieux, oui. Mais nous sommes si mal barrés, nous autres intellectuels africains – dois-je ajouter “francophones’’ ? – qu’il peut nous arriver de nous voir tout à fait du dehors. »

Reprenons un passage relatif au cambriolage qui se trouve au début de cette intervention : « Dans les laboratoires gérés sérieusement, il y a toujours une collaboration internationale car, avant de publier une découverte dans un journal officiel scientifique, le bon sens est qu’il faut premièrement en discuter et la faire évaluer par d’autres experts du même domaine. Si telle est l’approche, c’est sûr que dans le cas d’un vol, il y aurait eu une espèce de « backup informationnel » au niveau des collaborateurs. Donc vous voyez, Monsieur Diop, que s’aventurer trop longtemps sur cette piste pourrait faire très mal. » Il y a eu un vol ? Qu’est-ce qui a été volé ? Aucun collaborateur ne peut le dire ? Ni au Sénégal, ni à l’étranger ? Le laboratoire a-t-il donc été géré d’une façon cavalière ? Les rumeurs sont-elles vraies qu’un fils de Cheikh Anta, physicien, pourrait reprendre en charge le laboratoire ? Est-ce un laboratoire familial et, partant héréditaire ? Alors pourquoi accuser Wade de dévolution monarchique et à Macky Sall des responsabilités allouées à in membre de sa famille ? Selon vous il n’y a donc pas de physiciens dignes de ce nom au Sénégal, vous pour qui l’Africanité est primordiale ? Dites-moi si l’université de Dakar va aller en droite ligne de l’hérédité pour une sixième dynaste pharaonique…


« Ton exercice de style est, de ce point de vue, un modèle du genre. Cela dit, je suis prêt à parier qu’il t’est plus facile de parler ainsi de Cheikh Anta Diop que de Senghor. Ton texte n’est évidemment pas que cela : j’en ai évoqué les accès de tendresse à l’égard de Diop et le très beau passage que tu cites toi-même sur l’exil et le Royaume en est un. Tu avoueras malgré tout qu’un hommage pouvant passer si aisément aux yeux de beaucoup pour du dénigrement a, pour dire le moins, raté son but. Est-ce parce que, comme on dirait en wolof, dangay màtt di ëf ? »

Et voilà ! Votre vrai but qui planait comme un ballon de sonde vient de tomber. En effet dès votre « Bachir tu permets » nous avons lu entre les lignes et avons décelé l’ivraie foncière que vous vous trouvez dans chaque ligne de Monsieur Bachir Diagne. Dès le début de ce texte, vous lancez : « Tu as quand même un peu fait rire à tes dépens avec cette étrange histoire de vouvoiement. Encore heureux que tu ne m’aies pas provoqué en duel sur je ne sais quel pré de Bretagne ou de Normandie ». Pour les initiés, parler de la Normandie et de la Bretagne fait remonter dans la mémoire les fiefs du dénaturé Senghor, Senghor le Toubab, Senghor le Grec, Senghor le latin, Senghor mari de Colette, le Senghor qui ne peut plus être Kor Dior, Senghor qui est tout sauf Sénégalais. C’est pourquoi vous appelez au duel, un duel qui doit avoir lieu pas a Ndiongolor ou Ndialakhar, Aéré Lao, Tendouck ou Siganar, pas à Mbassisse, Mbâne ou Ndiassane, mais sur la terre bretonne ou normande pour ainsi vous proclamer pur Sénégalais par rapport à Messieurs Diagne et Senghor. C’est cette schizophrénie vôtre qui vous a fait tiquer dès qu’il y a une juxtaposition de traduction de textes de sciences formelles et de textes de poésie. En schizophrène emmuré dans son monde utopique, vous faites danser un autre dans une arène bâtie par vos affabulations. De quel droit, Monsieur Diop ? Ayant pris la route du « caaliit », vous êtes tombé dans le trou béat du « jafur » : « je suis prêt à parier qu’il t’est plus facile de parler ainsi de Cheikh Anta Diop que de Senghor. », dites-vous ! Etes-vous sûr que Monsieur Diagne soit drapé d’un aussi grand pagne de complexé que vous ? Seriez-vous capable d’écrire avec autant d’objectivité sur Senghor qu’il l’a tenté et fait avec Cheikh Anta ? Et pourquoi actuellement, surtout autour de l’université, l’on ne peut soulever Senghor-et-Cheikh Anta comme un seul flambeau de la fierté de notre nation avec la ferme conviction que chacun a fait la part de destin qui lui avait été allouée ? Nos têtes sont-elles si petites qu’il faudra toujours, parmi nos grands hommes que ce soit l’un ou l’autre et pas l’un et l’autre ? Dans une telle étroitesse d’esprit, nous nous demandons ce que l’on fait dans une université ! Force est de noter que c’est au Sénégal, voire seulement en Afrique, que les citoyens sont toujours enclin à éjecter hors de la race toute personne ayant séjourné en Europe et surtout s’il est grand intellectuel et par conséquence ouvert aux vents et pillards du Nord. Ces intellectuels sont maintenant livrés aux tempêtes de sable fratricides de leur propre continent, tempêtes qu’agitent des pseudo intellectuels complexés qui ne comprennent pas l’ouverture et enracinement, encore moins la nécessité, comme Bismarck, de se jeter dans les bras de la Realpolitik. Notre race serait-elle donc indigne de grands hommes puisque dès que nous en avons un, nous le rejetons vers d’autres rives comme si c’était un cauchemar ? La règle est-elle qu’il nous faut un seul à la fois ? Nous aimerions savoir, car nous n’y comprenons pas grand’ chose et Lilyan Kesteloot non plus, puisqu’elle a invité à créer les termes pour définir ce qu’est un vrai nègre, un vrai africain. Croyez-nous, Monsieur Diop, une toute petite jugeote vous aurait prouvé que la différence entre Senghor et Cheikh Anta n’a pas l’épaisseur d’un crin de cheval ! Elle n’a pas la mesure de cette flamme insensée qui semble vous avoir fait perdre le nord !


« Venons-en à présent à ce qui, à mon humble avis, est le plus important : ton entretien du 2 juillet 2019 avec Elara Bertho. Bien que la plus grande partie de mon analyse ait porté sur ce que tu appelles tes “deux coups de griffe contre Cheikh Anta Diop’’, tu as préféré ne pas t’y attarder dans ta réplique hâtive et enflammée. Sans vouloir te faire un procès d’intention, je me demande encore si ce n’était pas à dessein, pour éviter une discussion un peu gênante sur la question de la langue. Si tu me dis que tes propos sur la traduction de la théorie de la relativité en wolof par Diop ne visaient pas à le tourner en dérision, je ne peux que t’en donner acte. Uniquement sur la forme, bien entendu. Parce que dans le fond, je ne vois pas en quoi tu es qualifié pour juger de la difficulté ou non de l’entreprise. « Tu as certes évoqué à l’occasion d’un de nos rares échanges par mail, ton ambitieux projet de traduction en wolof de concepts philosophiques. La nouvelle m’a fait plaisir et je t’ai dit qu’il est bien que ce soit une personne comme toi qui fasse ce travail. Je crois savoir que l’affaire évolue dans la bonne direction et je te renouvelle ici mes encouragements. J’espère simplement que tu as fait l’effort de t’alphabétiser. Je n’en ai pas eu l’impression la dernière fois que j’ai surpris des termes wolof dans certains de tes textes en français. »

Ici vous posez le problème de la langue en d’autres termes. Dans « Bachir tu permets » vous avez en effet fait ressortir le concept d’unicité de langue de Cheikh Anta Diop. Maintenant vous venez plus explicitement avec son projet de traduire la théorie de la relativité en wolof. Si Monsieur Diagne a dit qu’en effet traduire la théorie de la relativité ne devrait pas être aussi difficile que la traduction de poèmes, il a tout a fait raison. C’est que la traduction de la relativité demande, au préalable la traduction du métalangage, qui est le fait de trouver la traduction d’une série de termes en wolof et puis de les appliquer au plus large concept de la langue, ce qui ne peut pas être une entreprise aussi draconienne. Une seule chose importante à retenir c’est que pour se faire, il faudra bien s’associer des linguistiques. Si, par ailleurs Monsieur Diagne a un ambitieux projet de traduction en wolof de concepts philosophiques, c’est effectivement à louer. Dans ce cas, il doit passer par la même procédure de fixation du métalangage qu’aurait appliquée Cheikh Anta Diop. Ce qui est toutefois incompréhensible, c’est que vous sortez des griffes pour parafer son dos de fissures crypto personnelles en voulant le tourner en bourrique par son inanalphabétisme en wolof. Vous pensez donc que, comme vous il n’a pas fait des milliers d’heures pour s’alphabétiser en wolof ? Est-ce parce que vous avez trouvé une transcription francisée de mots wolofs dans un de ses textes ? Comme exemple, nous vous disons que, personnellement, bien qu’écrivant relativement bien nos langues nationales, nous utilisons parfois une transcription francisée de certains mots pour les rendre lisibles et compréhensibles pour certains de nos lecteurs dans certaines circonstances. Vous accusez avec trop de légèreté et la logique ne semble pas être votre force. Pour ce qui est de nos langues, force est de constater que leur transcription n’est malheureusement pas unilatérale, comme le prouvent les titres et sous-titres à travers nos masses média, allant jusqu’aux noms de compagnies à l’instar de « Joni joni » qui devrait être « Jooni jooni ». Ne pas prendre en compte cette probable éventualité n’est malheureusement pas d’ordre intellectuel et une attaque devrait être pesée plusieurs fois avant d’être déployée.  


« Tu reprends également à ton compte la vieille rengaine africaniste voyant en tout défenseur de Cheikh Anta Diop un fanatique, adepte d’on ne sait quelle nouvelle “religion’’. C’est lui faire un bien mauvais procès car peu de penseurs ont dû faire face autant que lui au feu roulant des critiques. Elles ne l’ont jamais dérangé, bien au contraire. Lorsqu’en 1974 Diop et Obenga se rendent au Caire pour une explication décisive avec les égyptologues occidentaux, une des choses qu’il dit à son ami et disciple congolais, c’est : “S’ils ont raison, sur la base de faits précis, nous n’aurons pas d’autre choix que de le reconnaître publiquement’’. Ils n’en eurent pas besoin, car comme chacun sait, leurs thèses sont sorties confortées de cette rencontre de haut niveau. Ce n’est pas moi qui le dis mais le rapport de l’UNESCO qui se conclut ainsi : « La très minutieuse préparation des communications des professeurs Cheikh Anta Diop et Obenga n’a pas eu, malgré les précisions contenues dans le document de travail préparatoire envoyé par l’UNESCO, une contrepartie toujours égale. Il s’en est suivi un réel déséquilibre dans les discussions. »

Eh oui, une autre accusation schizophrénique qui, en réalité est plutôt l’autre face de la médaille que vous portez en votre poitrine. Pour vous selon Monsieur Diagne tout défenseur de Cheikh Anta est un fanatique, adepte l’on ne sait de quelle nouvelle religion. Et pour vous ? Que toute personne s’opposant à un seul point de vue de Cheikh Anta est un hérétique à mettre au pilori ou sur un bûcher ? Mais pour mieux illustrer votre situation insoutenable, nous allons vous donner une petite anecdote :

« Il y avait deux sœurs. Revenues de l’école, elles trouvèrent deux oranges dans le salon. La petite sœur s’empara de la plus grande. Sa grande sœur la toisa :
- Pourquoi, quand tu es la première, tu t’empares toujours du plus grand morceau ?’
La petite sœur regarda sa sœur et lui dit:
- si tu avais été la première, quelle orange aurais-tu prise ?’
- La plus petite bien sûr !’, répondit la grande sœur sans tarder.
- ‘Mais pourquoi gueuler, puisque c’est justement la plus petite que tu as actuellement’, dit la petite sœur en épluchant tranquillement son orange. »

Voilà, Monsieur Diop la situation dans laquelle vous vous mettez. Notre problème est que nous cherchons sans succès une petite brèche positive à mettre sur votre compte, mais ne parvenons pas à trouver un seul point portant le manteau d’une approche intellectuelle et, partant, honnêtement défendable. Vous dites : « Lorsqu’en 1974 Diop et Obenga se rendent au Caire pour une explication décisive avec les égyptologues occidentaux, une des choses qu’il dit à son ami et disciple congolais, c’est : “S’ils ont raison, sur la base de faits précis, nous n’aurons pas d’autre choix que de le reconnaître publiquement’’. ». Bizarre si une telle vision peut être mise sur le compte d’un trait exceptionnel relatif à un homme de science car faire le contraire aurait été suicidaire de la part de Cheikh Anta Diop. Si au Sénégal il est permis de s’autoproclamer intellectuel et que l’on est incapable de suivre une trajectoire d’analyse rationnelle, ce n’est certes pas le cas partout ailleurs dans le monde. Quelqu’un a dit, sur seneweb.com : « A vrai dire, on est intellectuel qu'en rapport avec son époque. », Cela est surtout pertinent en archéologique où une découverte peut être dite « la plus vieille » jusqu’à la preuve du contraire.

  • Lucy fut découverte le 24 novembre 1974 à Hadar, sur les bords de la rivière Awash, dans le cadre de l'International Afar Research Expedition fondée par Maurice Taieb, un projet regroupant une trentaine de chercheurs éthiopiens, américains et français, codirigé par Donald Johanson (paléoanthropologue), Maurice Taieb (géologue) et Yves Coppens (paléontologue). Le premier fragment du fossile a été repéré par Donald Johanson et Tom Gray, l'un de ses étudiants, sur le versant d'un ravin. Lucy a été décrite une première fois en 1976 mais son rattachement à l'espèce Australopithecus afarensis n'a été proposé qu'en 1978.
  • Une ancienne espèce du genre humain, qui était jusqu'à présent inconnue, a été mise au jour dans une grotte en Afrique du Sud où ont été exhumés les ossements de 15 hominidés, ont annoncé jeudi des chercheurs internationaux. Les fossiles ont été trouvés dans une grotte profonde et extrêmement difficile d'accès, près de Johannesburg, sur le très riche site archéologique connu sous le nom de "Berceau de l'humanité" et inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco. Homo naledi. "Je suis ravi de vous présenter une nouvelle espèce du genre humain", a déclaré Lee Berger, chercheur à l'université du Witwatersrand à Johannesburg, lors d'une conférence de presse. En 2013 et 2014, des scientifiques ont exhumé plus de 1.550 os appartenant à au moins 15 individus, parmi lesquels des bébés, de jeunes adultes et des personnes plus âgées. Tous présentent une morphologie homogène mais n'ont pas encore été datés. La nouvelle espèce a été baptisée Homo naledi et classée dans le genre Homo, auquel appartient l'homme moderne.
  • Le crâne d'Australopithèque, baptisé MRD, a été découvert en février 2016 dans la région Afar en Éthiopie par un groupe international de chercheurs. Retrouvé dans un état de conservation remarquable, il pourrait "devenir une nouvelle icône de l'évolution humaine", juge Fred Spoor du Natural History Museum de Londres et rejoindre ainsi les célèbres "Ardi", "Lucy" et "Toumaï", un Sahelanthropus tchadensis vieux d’environ 7 millions d’années, qui a été mis au jour en 2001 au Tchad.
  • Ardi quant à lui, est un Ardipithecus ramidus, une autre espèce d'hominidé, découvert en Éthiopie et vieux d’environ 4,5 millions d'années. La très célèbre "Lucy" enfin, découverte elle aussi dans ce pays d'Afrique de l'est en 1974, est âgée de 3,2 millions d'années.
  • D'autres fossiles d'Australopithèque, moins connus, datent d'au moins 3,9 millions d'années, mais à la différence du crâne MRD (appartenant à un Australopithecus anamensis, un des tout premiers Australopithèques), seules des mâchoires et des dents avaient été retrouvées. Or, sans "vieux" crâne, notre compréhension de l'évolution de ces hominidés éteints ne restait que très partielle.

Comme on le constate, bien que chaque découverte ait une vraie valeur historique en archéologie, elle n’en fait pas moins un terrain glissant quant aux années écoulées selon sa datation. En prenant la civilisation de la race noire, nous pensons qu’il faut faire très attention, surtout depuis la découverte de l’existence des Olmèques sur les côtes du Golfe de Mexique et les théories de Monsieur Zecharia Sitchin basées sur les tablettes sumériennes. Etant donné que les recherches se poursuivent il ne faudra assassiner des chercheurs si, dans le futur, des chercheurs viennent avec de nouvelles découvertes contredisant Cheikh Anta car, en ce moment-là, vous tomberez effectivement dans un fanatisme religieux. Lui-même est ouvert à cette éventualité et, Ki-Zerbo, quant à la place du noir dans la société égyptienne dira : « L’Egypte, par sa richesse économique, agricole, commerciale et culturelle est un point attracteur énorme et un creuset pour de nombreux peuples (comme les Hébreux, les Hyksos, les Ethiopiens, les Nubiens, etc.) qui viennent se mélanger au fond originel. Plus globalement, l'Histoire de l'Afrique (1972) est ainsi un vaste panorama diachronique et circonstancié, rendu vivant par des extraits de chroniques, des grands évènements et des évolutions des peuples du continent. En cela, la forme, le fait de présenter les évolutions sociales économiques et politiques de la même manière que d'autres encyclopédies ont présenté l'Europe et l'Asie, replace de fait, dans la pratique, l'Histoire de l'Afrique au même rang que celles des autres continents. Et cela, sans avoir besoin de clamer une Afrique originelle, objectif de pureté à retrouver que proclame Cheikh Anta Diop. La présentation diachronique à l'échelle du continent souligne ainsi de fait l'évolution contiguë des différentes grandes civilisations, soulignant ainsi les points communs et l'échange des idées mais aussi le fait que les chocs qui les ont abattues ont une origine commune : l'expansion européenne et ses conséquences (expansion marocaine, turque et omanaise) »
Vous donnez donc raison à Monsieur Diagne dans la mesure où vous semblez habiller Cheikh Anta Diop d’une invulnérabilité à la critique, voire d’une infaillibilité puisque vous-même dites : « De même, lorsque Diop lance aux jeunes Africains : “Armez-vous de science jusqu’aux dents, car à connaissance égale la vérité finit toujours par triompher !’’, il ne peut exclure que leurs recherches puissent invalider un jour ou l’autre ses propres thèses. Sachant bien tout cela, je ne peux nullement te reprocher d’avoir cherché à remettre sa pensée en cause. ». Et puis, bien que la datation au carbone 14 soit du ressort de la physique chimie, les objets datés sont, avant tout d’ordre archéologique. Nous ne pouvons donc pas en vouloir à Cheikh Anta de s’être embourbé dans ce domaine, mais le fait de s’arrêter à ce domaine dans des recherches de laboratoire nous surprend, surtout pour quelqu’un qui, selon les rumeurs, s’était vanté de pouvoir créer une bombe nucléaire. Le domaine de la recherche en physique est pourtant si important, allant jusque dans celui de l’astronomie.


« Mais dis-moi, Souleymane Bachir Diagne, comment se fait-il qu’un esprit aussi vaste et brillant que le tien ne puisse nous proposer rien de personnel dans sa critique de Cheikh Anta Diop ? Tu es allé puiser à pleines mains chez François-Xavier Fauvelle-Aymar qui écrit dans “L’Afrique de Cheikh Anta Diop. Histoire et idéologie’’ (Karthala, 1996) : “Mais au demeurant, quoi qu’on en conclue, il reste que Diop use là d’un modèle de l’Etat-nation sous sa forme la plus jacobine explicitement emprunté à la France’’. Fauvelle s’exprime ainsi au terme d’un laborieux développement sur la supposée préférence de Diop pour une “langue unique’’. Et toi, vingt trois ans plus tard, tu déclares : “Deuxièmement il – Diop – est beaucoup plus jacobin et français qu’il ne le croit parce qu’il veut une langue unique. Cela n’a pas de sens d’avoir une langue d’unification : pourquoi le projet devrait-il être un projet qui imite l’Etat-Nation, c’est-à-dire être homogène avec une seule langue, de manière centralisée ?’’ Il ne me viendra jamais à l’esprit de mettre en doute tes capacités intellectuelles. Mais alors pourquoi ne t’en sers-tu pas pour penser par toi-même comme ne cessait d’ailleurs de nous le recommander Senghor ? Quel besoin as-tu d’aller “emprunter’’ des griffes à un intellectuel français qui s’est construit, comme le montre bien Obenga, dans une haine vigilante et quasi morbide de Cheikh Anta Diop ? »

Monsieur Diop, depuis quand le fait de citer une source pour appuyer sa vision, ce que vous faites vous-mêmes d’ailleurs, ou simplement pour ne pas se positionner en réinventeur de la roue – déontologie scientifique oblige, est-il devenu un péché ? Le point pertinent est-il que citer une autre source n’est plus posé comme un apport pour appuyer le fondement de sa vision, mais une incapacité de penser par soi-même ? Que Cheikh Anta soit influencé par l’Occident, comme nous tous d’ailleurs, n’est pas à débattre. Si vous voulez un Cheikh Anta purement africain sans aucune contamination, il faudra aller chercher ce Cheikh dans le petit garçon de Ceytu, et cela, bien avant son école coranique ! Car, contrairement à ce que vous pensez, c’est à partir de cette initiation que la boue d’une autre civilisation avait commencé à couvrir notre pharaon, poussière plus dénaturalisante et plus dénaturaliste que vous n’oserez jamais aborder. C’est justement cette idyllique africanité dont vous voulez l’envelopper qui fait que vous enterrez jusqu’à l’existence de celle qui fut pourtant son complément, puisque épouse et de surcroît française. Ici il faut nous comprendre car nous n’adhérons pas à cette attention particulière de la nationalité d’une épouse que ce soit celle de Cheikh Anta ou bien celle de Senghor ou de quelqu’un d’autre. Si nous en parlons, c’est que c’est un trait de dénaturation que l’on agite à l’encontre de Senghor à telle enseigne qu’on veut l’occulter quand il s’agit de Cheikh Anta Diop. Pour nous, personnellement, dire que tel a une femme française, wolove, diola, ou malgache est une aberration : on a une femme, point barre.
En somme, dans cette interview, tu crânes avec des mots grandioses qui ne sont même pas les tiens mais ceux écrits par Fauvelle quand il n’avait que vingt huit ans. En d’autres circonstances Fauvelle t’aurait fait une petite querelle de derrière les fagots. Mais il s’en garde bien car, idéologiquement parlant, c’est tout bénef pour lui d’être relayé par une voix africaine. Il t’en sait donc gré et, dans une toute récente émission de France Culture, conclut sa charge furieuse contre Cheikh Anta Diop par les mots que voici : “D’ailleurs, ne croyez pas que tous les intellectuels africains sont d’accord avec Diop, lisez donc Souleymane Bachir Diagne !’’. »
Hélas, nous autres Africains, vraiment « suñu fayda mu ngi ñuy ñakloo fayda » ! Nous avons une allergie qui frise la démence, recroquevillés que nous sommes dans notre fierté médiocre, négative et négationniste. C’est le fruit du complexe, un voile obscurcissant toute vision saine de l’esprit. Le puritanisme africain que nous dégainons est si mal posé et si suicidaire qu’aucune posture ne saurait être plus ridicule. Avons-nous donc toujours vécu dans l’illusion que la connaissance n’a pas de couleur ? Car si le fait d’être cité par un français ou un américain veut dire que nous sommes racialement corrompus, que faisons-nous de nos diplômes et surtout pourquoi vous-même, fierté indirecte, faites-vous exhibition des universités américaines où vous enseignez, une façon de vous rehausser comme ces Sénégalais de France, S.F, qui, revenus au Sénégal se sentent au-dessus des autres sénégalais à cause du simple fait qu’ils ont séjourné dans la métropole ? Est-ce un péché si ce ne sont pas tous les intellectuels africains qui sont d’accord avec Cheikh Anta Diop ? Vous tombez justement dans le piège entrevu par Monsieur Diagne car, en effet, pour vous Cheikh Anta est une divinité. Enlevez donc la poutre qui est dans votre œil si vous avez dessein d’enlever la paille ou le grain de sable qui est dans l’œil de votre prochain !


« Cette affaire n’est pas bien jolie mais un tel faux-pas, cela peut arriver à tout un chacun, en particulier à ceux qui, comme toi, ont fini par ne plus s’attendre à être contredits. Il en a résulté une situation assez cocasse où en te réfutant sur la théorie de la langue unique, je me trompais en quelque sorte d’interlocuteur. Cela ne mérite-t-il pas réflexion ? le plus grave, toutefois, c’est le fait que tu reprennes à ton compte l’accusation de “jacobinisme’’ supposée être, pour un certain africanisme de combat, l’arme fatale contre Cheikh Anta Diop.

Oui, vous avez raison : « Cette affaire n’est pas bien jolie mais un tel faux-pas, cela peut arriver à tout un chacun, en particulier à ceux qui, comme toi, ont fini par ne plus s’attendre à être contredits. ». C’est si vilain, car vous dites qu’un faux pas peut arriver à tout un chacun. Sérieusement, Monsieur Diop, la logique ne semble pas être votre point fort. Vous ne cessez de vous contredire ; vous ne cessez de dire à l’autre d’accepter ce que vous refusez. Vous dites qu’un faux pas peut arriver à tout un chacun. Sauf à Cheikh Anta Diop ? Vous dites personne n’a la connaissance. Sauf vous et Cheikh Anta Diop ? Vous dites que Monsieur Diagne ne s’attend plus à être contredit, mais vous l’attaquez, sans toutefois pouvoir le contredire, argumentairement parlant, en rien du tout. En réalité vous citez ses textes et les attaquez, pas sur une base scientifique et, partant, argumentaire, mais dogmatiquement comme on le ferait devant un hérétique blasphémateur de surcroît.
Vous n’avez rien compris du thème unicité de langue et l’auriez-vous compris, la meilleure démarche aurait été de venir avec d’autres thèses pouvant démontrer que c’est applicable et comment cela pourrait se faire. Donnez-nous un modèle et une procédure, pas une belle idée utopiste, compte tenu de tous les facteurs sociaux qu’il faut affronter dans la procédure d’adoption et de propagation d’une langue donnée. Vous risquez une crise cardiaque si vous tenez Cheikh Anta comme infaillible, ce qui est le contraire même, en d’autres circonstances, de sa propre vision que vous citez : « Armez-vous de science jusqu’aux dents, car à connaissance égale la vérité finit toujours par triompher !’ », avant de conclure vous-mêmes : « il [Cheikh Anta Diop] ne peut exclure que leurs recherches puissent invalider un jour ou l’autre ses propres thèses ». Mais justement vos attaques répétées ne sont-elles pas, encore une fois, une contre vérité de vos propres propos quand vous dites : « Sachant bien tout cela, je ne peux nullement te reprocher d’avoir cherché à remettre sa pensée en cause. » ?
C’est justement sur des contradictions répétitives que vous vous accoudez pour lui faire des reproches, allant jusqu’à disqualifier l’africanité de Monsieur Diagne pour nous le livrer tout nu en occidentalisé échoué sur les berges de la mer Egée ou un lutin perdu dans les brumes bretonno-normandes !


«On ne peut laisser personne glisser ce mot dans une interview, ni vu ni connu, alors qu’il a un potentiel si explosif. C’est ce mot-là, et au fond ce mot seul, qui m’a fait réagir. Nous faut-il une “relecture négro-africaine’’ de Cheikh Anta Diop ? Elle s’impose plus que jamais. Mais comment “relire’’ une œuvre que l’on n’a même pas pris le temps de lire ? Je n’ai pas été le seul à essayer de te montrer, textes à l’appui, à quelles extrémités peut mener le manque de caractère d’une intelligentsia africaine encore tellement fascinée par l’Occident. »

Wow ! « On ne peut laisser personne glisser ce mot dans une interview, ni vu ni connu alors qu’il a potentiel si explosif »… Décidément Monsieur Bachir Diagne vous a senti venir depuis longtemps et de très loin. Il a bien vu en vous pire qu’un fanatisme religieux car cette sentence sonne en effet comme une fatwa ayant la même teneur que la sentence de Rome sur Galileo quand il brandit la faucille de sa découverte sur la géocentricité de notre bleue planète. Espérons que vous n’avez pas préparé une ceinture d’explosifs contre cet hérétique africain occidentalisé qui a osé blasphémer si gravement devant votre divinité !
Ainsi donc vous proposez une relecture… négro-africaine de Cheikh Anta Diop ? Comment est-ce possible ? Parce qu’une lecture négro-africaine, je crois entendre Négritude et, partant, Césaire et Senghor, a été faite ? Ne serait-elle pas du réductionnisme, cette relecture, quant à la personne de Cheikh Anta Diop ? Si sa connaissance se limite à une dimension négro-africaine, Il nous paraît alors relative et donc indigne d’être habillée du terme connaissance et serait tombée au lot du réductionnisme involontaire que l’on affiche lorsqu’on parle de femme astronaute ou d’astronaute afro-américain. Mais le ridicule ne nous fait plus mal. En effet nous sourions toutes dents dehors lorsque de Pays de Tiers Monde nous avons été taxés de Pays Sous-développés puis de Pays en Voie de Développement puis maintenant en Pays Emergeants. C’est la marque du pauvre qui fait prévaloir son droit d’être accepté en pauvre et pas discriminé ! Lorsque Senghor parle de relecture de Marx et Engels, c’était dans le but de voir comment réadapter leur système aux réalités africaines, d’autant plus que tous nos jeunes révolutionnaires s’y jetaient sans réfléchir, ne s’appuyant, comme des fuyards, que sur le fait que l’URSS s’offrait en modèle anti-colonial. Tout était bon tant qu’il ne s’agissait pas de l’ancienne puissance coloniale. Ainsi fuyant des Occidentaux, nous tombâmes dans les bras morphiques d’autres Occidentaux, poursuivant ainsi notre dénaturation puisqu’incapables de prendre en compte un autre danger. Il le fallait bien. Et encore aujourd’hui, nous n’avons pas atteint l’autre rive. Le prouve votre vision d’une pureté africaine hors sujet ! Nous sommes dans les bras d’autres morphines et cela, à tous les niveaux. Comme vous par exemple, qui vous enorgueillissez d’enseigner dans des universités américaines. Qu’y enseignez-vous ? Kothie Barma, Ndiadiane Ndiaye et les femmes de Nder, la Bataille de Mbind o Ngor ? Le ridicule ne vous tuera pas, qui crânez contre un autre que vous taxez de dénaturée parce que celui-ci est aux Etats Unis, en train d’enseigner et ose citer des français pour appuyer ses arguments ! Vraiment dommage que le ridicule ne tue plus chez nous. Ne pensez-vous pas qu’il est temps d’adopter une Realpolitik pour enfin dépasser notre Petite Identité Noire et embrasser celle plus complète de l’Etre Humain et nous proclamer enfin êtres humains parmi les êtres humains ? Votre puritanisme, que vous enseignez dans vos universités, est une contamination pire que la colonisation car elle pond des jeunes aux pensées tardives et attardées qui s’agrippent sur une identité africaine qu’ils n’ont ni de près ni de loin, sauf sur des lèvres, interpellation d’un cerveau qui semble dépourvu de neurones. Pourtant tout a été résumé dans la notion d’ouverture et enracinement.


« L’accusation de “jacobinisme’’ supposée être, pour un certain africanisme de combat, l’arme fatale contre Cheikh Anta Diop ». Parce que l’expression ou la vision est française ? Qu’est-ce que le jacobinisme pour être une arme fatale contre Cheikh Anta Diop ? Voilà sa définition dans Wikipédia : « Le jacobinisme est une doctrine politique qui défend la souveraineté populaire et l'indivisibilité de la République française. Il tient son nom du Club des jacobins, dont les membres s'étaient établis pendant la Révolution française dans l'ancien couvent des Jacobins à Paris. Le mot jacobinisme désigne aujourd'hui une doctrine qui tend à organiser le pouvoir de façon administrative (bureaucratie) et centralisée (centralisation) et à le faire exercer par une petite élite de techniciens (technocratie) qui étendent leur compétence à tous les échelons géographiques et à tous les domaines de la vie sociale afin de les rendre uniformes, ce qui en fait l'adversaire du régionalisme. L'usage moderne du mot jacobinisme est de quelque manière anachronique. En effet, le jacobinisme, pendant la Révolution française, était une réaction aux enjeux particuliers de l'époque. Pour n'en retenir que la philosophie, on pourrait aussi entendre le jacobinisme comme une doctrine opposée aux politiques communautaires, qui tendraient, par exemple, aux divisions internes. »

Nous vous demandons : Cheikh Anta a-t-il écrit quelque chose où il se défend, d’une façon ou d’une autre contre le jacobinisme ? Pouvez-vous trouver un passage, une idée pouvant réfuter cette vision que vous réfutez ? Il nous faut un argumentaire ! Et nous sommes plus que convaincus que vous n’irez certainement pas puiser des sources occidentales, vu l’extrême allergie que vous semblez détenir envers toute source occidentale. Savez-vous qu’il y a quelqu’un d’autre qui a eu la phobie de l’occidentalisation, crainte d’un fils prodigue préparant son retour de cette boue de civilisé et pourtant vous la lui niez. S’il n’y a aucune référence pouvant le prouver, alors n’êtes-vous pas en train de sombrer gravement dans le dogmatisme, approche toujours déployée devant une divinité et, partant, est d’ordre religieux, une allusion que vous voulez coûte que coûte combattre ? A défaut, et puisque vous refusez toute référence extérieure à Monsieur Diagne, développez votre point de vue, développement personnel de vos idées qui s’est abonné absent tout au long de vos textes pourtant !


« Pour le reste, chacun de nous peut avoir la plus haute idée de lui-même mais je doute que nos petites personnes comptent vraiment. Beaucoup d’amis communs ont été gênés, voire choqués, par cette polémique soudaine et très inhabituelle au Sénégal. Je crois que c’est ta réaction qui a mis le feu aux poudres.

Ah bon ? Vraiment ? Monsieur Diop vous commencez à faire peur, dans la mesure où tous vous mettent au rang des géants intellectuels du Sénégal. Pourtant vous nous servez une démarche dépourvue de toute logique et, osons le dire, d’honnêteté intellectuelle. Et saviez-vous que quand l’opprobre arrive jusqu’au Saint des saints, il ne nous reste absolument rien d’autre que la décadence ? Vous dites expressément : « Beaucoup d’amis communs ont été gênés, voire choqués, par cette polémique soudaine et très inhabituelle au Sénégal. Je crois que c’est ta réaction qui a mis le feu aux poudres. » Cela nous surprend, car c’est vous qui êtes allé chercher un texte de Bachir puis, sans apporter une antithèse, avez commencé à faire feu de tout et cela dans un domaine qui semble vous dépasser puisque vous n’apportez aucune argumentation qui vous soit ni propre ni même impropre. En réalité vous êtes choqué que l’on ait cité votre dieu et vous vous êtes ceint d’une ceinture d’explosifs pour faire tabula rasa de tout. Quand la colère nous envahit, le taux d’adrénaline nous rend aveugles, ne laissant sur place que la bête sanguinaire prête à faire un carnage.


« Elle aura cependant été, pour le dire ainsi, un mal pour un bien. Les idées de Diop ont en effet rarement été aussi présentes dans l’espace public sénégalais, surtout depuis sa disparition. L’on a vite oublié ce que tu as pu écrire il y a vingt ans pour réfléchir à ce qui peut nous arriver dans vingt ans. Je trouve cela très bien. S’il en est ainsi, c’est que la discussion a été prise en mains, pour l’essentiel, par cette “jeunesse africaine en quête de sens’’ dont parle Aminata Dramane Traoré. Certains de ces jeunes ont, ainsi qu’en témoigne l’article de Khadim Ndiaye, une égale affection pour chacun de nous deux. Je les sais d’ailleurs déchirés en ce moment. Ils n’ont qu’une hâte : que les esprits se calment et qu’ils reprennent leur dialogue avec l’un et l’autre sans avoir à se sentir coupables de n’avoir pas choisi leur camp. Il ne devrait pas y avoir de camp, en fait. À mes yeux, cette affaire est toute simple. Ayant jugé pernicieux et de mauvais goût un de tes articles, je l’ai dit publiquement en me limitant à une analyse du texte. Ayant encore moins apprécié une de tes interviews, j’ai dit publiquement que j’y vois le symbole d’une allégeance intellectuelle à l’Occident à la fois déshonorante et dangereuse. C’est aussi simple que cela. Tu as peut-être été surpris, comme moi-même, par les réactions très vives d’une partie de l’opinion. C’est que, comme l’a si magnifiquement rappelé un des intervenants à ce débat, Cheikh Anta Diop est aujourd’hui encore pour beaucoup d’Africains non seulement un penseur mais aussi une conscience. Il est bon de s’en souvenir chaque fois que l’on est tenté de le traîner dans la boue. »

« Elle aura cependant été, pour le dire ainsi, un mal pour un bien. Les idées de Diop ont en effet rarement été aussi présentes dans l’espace public sénégalais, surtout depuis sa disparition. » Et nous ajoutons que ceci est bien dommage, mais ce n’est pas de façon indigne qu’il faut les exposer sur la place publique. En réalité, Monsieur Diop, vous n’exposez pas les pensées de Cheikh Anta dans l’espace public sénégalais, vous le défendez à partir du vide et cela peut avoir l’effet contraire de ce que vous tentez d’accomplir. Cheikh Anta Diop est réellement un géant et il faut de grands arrosoirs pour nourrir ses racines et les maintenir profondément en terre. Essayer de les alimenter avec des crachats risque fort de les tuer et de flétrir l’arbre tout entier. Tout compte fait, nous avons noté en grande partie que vous accusez Monsieur Diagne de vos propres fautes. Vous en faites l’initiateur alors que c’est vous qui avez déterré la hache de guerre. Vous lui refusez de citer des sources, comme si le droit d’indiquer des sources vous appartenait puisque vous citez Monsieur Samb; vous l’accusez de s’être tourné vers ces sources au lieu de plonger dans sa vaste tête et vous ne développez ni thèse ni antithèse. En bon Sénégalais vous n’aimez pas les confrontations verbales et pourtant c’est exactement ce que vous faites. Vous n’aimez pas qu’on ait comparé votre façon de réagir à un fanatisme religieux et c’est exactement ce que vous dépliez. Vous citez Cheikh Anta Diop qui a eu la pensée qu’un jour il se peut que des jeunes puissent réfuter ces thèses et dans le même temps vous réfutez cette possibilité. Vous rejetez Monsieur Diagne dans les brumes bretonno-normandes et vous mettez au-dessus de lui en pur Sénégalais, faisant de lui le dénaturé. En toutes choses vous vous présentez comme au-dessus de la mêlée, africain pur sang ; et Monsieur Diagne la mouche tsé-tsé dans la boue de la non-africanité.
Personne ne vous en aurez voulu, si ce débat était ceint de logique, d’argumentation, bref un vrai débat d’idées. Malheureusement vous vous êtes présenté en prosélyte, un fanatique religieux très dangereux. Et c’est d’autant plus dangereux que vous vous contredisez tout au long de votre intervention, comme par exemple quand vous proposez une relecture négro-africaine de Cheikh Anta Diop. C’est dire qu’il y a d’autres relectures possibles parmi lesquelles, nommément une interprétation jacobiniste certainement !

lundi 16 septembre 2019

Boris Diop - Bachir Diagne


BORIS DIOP – BACHIR DIAGNE

Boris vs Bachir ! Partout le même titre qui invite des larmes aux yeux ! D’aucuns pensent que cette situation des derniers jours apporte une nouvelle eau au moulin, à l’instar de ce passage ; « Aucun progrès n’a jamais été réalisé dans les sciences, la religion, la politique, sans qu’il y ait eu controverse », affirme Lyman Beecher, pasteur presbytérien, co-fondateur et chef de la Société américaine de tempérance. Voilà pourquoi le débat de haute facture que se sont livrés l’homme de Lettres Boubacar Boris Diop et le philosophe Souleymane Bachir Diagne, par presse interposée, est à saluer. Aussi grands que l’objet de leur « divergence », en l’occurrence le Pharaon noir Cheikh Anta Diop, ces deux éminents intellectuels sénégalais méritent que leur soit rendue toute l’estime due à leur rang ».

Hélas, tel n’est pas le cas. Nous aurions aimé voir comme titre « Boris et Bachir ». Mais non, cette polémique n’apporte rien de nouveau ; cette polémique n’apporte rien à saluer. Elle s’engouffre dans le trop plein de débats dans lesquels politiciens, artistes, activistes et religieux tiennent le peuple sénégalais en otage. Il faut dire basta !

C’est à cause de pareilles situations qu’en d’autres circonstances j’ai dit que le problème de l’Africain, surtout celui des intellectuels africains est l’apport. Le constat est que, parmi nos intellectuels, l’opposition est plus facile que l’apport, chacun voulant être l’oriflamme de l’instant. La même chose est vraie en politique : au lieu d’accepter qu’il y a continuité, plusieurs de nos dirigeants veulent toujours se présenter en initiateurs, quitte à tout « balayer » ou juste renommer des rues et des écoles et les citoyens ordinaires se tournent vers le passé pour décrocher des flèches de tel ou tel n’a rien fait.

C’est pourquoi même accoucher de cette contribution dans un débat d’un tel niveau – vu la carrure des deux hommes et les foudres autour d’une personne, – fut-elle Cheikh Anta Diop –, fait très mal. Au lieu de clarification, de prise de partie, j’aurais aimé pouvoir applaudir au fait qu’enfin deux Géants Sénégalais de l’Esprit sortent et viennent sous l’arbre à palabres pour nous sauver de la médiocrité journalière de nos sujets de débats. D’autant plus que, excessivement en retard pratiquement dans tous les domaines, nous nous offrons le ridicule luxe de « motus et bouches décousues ». Merci, cousine Bocoum, vous m’avez prêté l’expression qui sied !

Revenant à Boris-Bachir, je dis que mon espoir a été bafoué car cet espoir, mon fervent souhait, était et reste et je le formule en prière : « Que vos esprits s’échangent les bagues de l’alliance intellectuelle à la manière de vos ‘b’ ! » en initiale pour un niveau supérieur de ce Sénégal qui fut jadis un des berceaux africains de l’esprit.

Point de départ

Mon cher Boris, puisque c’est vous qui avez déclenché les choses, je me demande effectivement s’il était réellement nécessaire de revenir sur un article écrit il y a 20 ans, comme le dit Bachir. La réponse est : « Peut-être que oui, peut-être que non ». Les deux points de vue sont permis, raison pour laquelle je ne dirai pas gratuitement que vous avez tort. C’est que le droit ou non de revenir sur un article n’est pas dogmatique et ne se mesure pas à l’écoulement des années. Le domaine scientifique est progressif et progressiste et s’il s’agissait d’une thèse ce droit ne peut être révoqué. Mais dans ce cas-ci, il me semble, le problème se pose différemment que sur une base constructive. Par exemple, en physique, Newton est venu avec sa théorie de la gravitation universelle, Einstein l’a supplantée avec la relativité générale, une théorie relativiste de la gravitation. Niels Bohr se confrontera à Einstein par son apport à l'édification de la mécanique quantique qui poussera ce dernier à dire que « Dieu ne joue pas aux dés ». Suivra la théorie des cordes ou théorie du tout, un domaine actif de recherche traitant de l'une des questions de la physique théorique qui veut fournir une description de la gravité quantique, c'est-à-dire l'unification de la mécanique quantique et de la théorie de la relativité générale (la principale particularité de la théorie des cordes est que son ambition ne s'arrête pas à cette réconciliation, mais qu'elle prétend réussir à unifier les quatre interactions élémentaires connues). Contrairement à la situation Boris-Bachir, voilà des briques posées, pas pour détruire la bâtisse entamée par l’autre, mais pour en faire progresser les murs. Et c’est là une très belle leçon d’apport appelant au progrès. Dire donc que ce n’était pas nécessaire de revenir sur un texte âgé de 20 ans n’est pas tout à fait exact. C’est toujours permis et même souhaitable dans le domaine de la science surtout s’il y a de nouveaux éléments, des réadaptations ou corrections intervenues au fil des années comme le prouve l’exemple campé autour de l’évolution de la physique depuis Newton. Ayant lu votre texte puis l’article de Bachir en anglais, et sa réaction après votre « Bachir tu permets ? » il m’a semblé nécessaire d’intervenir, pas pour faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre mais simplement apposer une analyse descriptive de la situation. Partons du fait qu’ici il ne s’agit pas de thèse. Il ne s’agit pas d’un théorème ou d’une équation. Le problème fondamental repose sur trois points :

  1. La fondation du laboratoire de datation au carbone 14
  2. La vision de Cheikh Anta de créer une langue unique, vision à laquelle Monsieur Bachir oppose celle de Monsieur Ngugi Wa Thiong'o qui est plus à son goût
  3. Un problème linguistique de traduction : La traduction d’un texte de poésie et la traduction de textes de sciences formelles.

La création du laboratoire

La création du laboratoire est un fait historique, le deuxième et troisième point sont d’ordre linguistique et on fait l’objets de grandes et profondes études. Et c’est là où le débat blesse car tous les deux points sont dignes de quatre livres, un livre de Bachir et un livre de Boris pour chaque point, livres que vous êtes tous les deux en mesure de produire, ce qui aurait nettement mieux servi le monde et, partant, le Sénégal et établi un dialogue digne du label « intellectuel »

Malheureusement tel n’est pas le cas. Le débat est campé autour d’une personne, en l’occurrence le Professeur Cheikh Anta Diop ce qui ne peut atterrir que sur l’émotion et non sur la raison qui, elle, exige une approche descriptive et non normative et ne pouvant être fille de l’émotion. C’est tout le danger lorsqu’un sujet rime à une personne. Le taux d’affection prime et peut ainsi affecter le lampion que l’on braque sur le texte de quelqu’un au sujet de ladite personne, surtout si, bien avant, on s’est replié dans des préjugés enfermant l’auteur dans un certain canevas prédéfini.

Dans « Dans l’antre de l’alchimiste », le mot alchimiste a-t-il été mal choisi, vous faisant virer plus ver l’émotion que le raisonnement ? Pourtant Bachir a, pas justifié, mais expliqué le choix, ce qui suit une déontologie intellectuelle. Monsieur Diop, auriez-vous agi comme les critiques qui dénigrèrent Camara Laye pour avoir présenté une famille africaine idyllique au lieu d’attaques contre le colonialisme ? Le texte de Bachir fait réellement l’éloge de Cheikh Anta, mais, scientifique, Monsieur Diagne ne peut, n’a pas le droit de se cramponner sur du « baab » ou du « jeyaate ». M’a effleuré d’ailleurs l’idée de faire deux colonnes pour mettre vos textes côte à côte, ce qui, il faut l’avouer, aurait été de mauvais goût et serait enveloppé du même manteau de ce débat puéril ayant l’air d’une confrontation, confrontation à son tour stérile que je déconseille, raison de cette contribution.

Ce que j’ai présenté, relatif aux géants de la physique, est fertile, on ne peut en disconvenir, et a fait et fait encore progresser la science puisque la physique quantique est en train d’accoucher des ordinateurs du futur – on ne sait salut ou damnation du monde. Nous autres africains avons la manie de camper sur le passé ou sur une futilité et sortons nos griffes dès que quelqu’un invite à faire face au futur, comme nous le fîmes devant le « Discours de Dakar » du Président Sarkozy : il avait commencé par dire ‘ce continent qui a connu tant de civilisations brillantes’ et nous sauterons sur lui quand même en disant qu’il a renié l’histoire de l’Afrique. En ne mettant pas l’émotion à la place de la raison, on aurait pu pourtant corriger sa contradiction personnelle lorsque, plus tard dans le discours, il dira que « l’Afrique n’est pas assez entrée dans l’histoire ». Le réajustement, basé sur la raison, aurait pu lui suggérer, entre autres possibilités, de dire : « l'Afrique n'est pas assez entrée dans le présent – problème d’orientation – et, par conséquence, n’est pas assez munie pour faire face au futur » et ainsi éviter la contradiction entre un continent ayant connu tant de civilisations brillantes et une Afrique qui n’est pas assez entrée dans l’histoire. Monsieur Diagne a eu un discernement là où nous autres manquons une bonne perception de la nature des problèmes rencontrés par Cheikh Anta Diop durant sa vie académique, raison pour laquelle nous mettons ce problème sur le compte d’ennemis tapis dans l’ombre et lui ayant fait la guerre au long de sa carrière.

Je soupçonne qu’un de ces points fondamentaux repose sur la nature de la pédagogie franco-francophone. En elle, on ne s’attend plus à ce que quelqu’un ayant suivi une filière scientifique s’adonnât à l’écriture de poésies ou de romans. Cela m’est arrivé personnellement: ayant soumis un projet en vue d’un financement par la Société Financière Internationale, SFI, de la Banque Mondiale, un ami, responsable dans la structure me conseilla d’enlever les lignes de mon curriculum vitae relatives à des publications littéraires pour ne pas être pris pour … un illuminé incapable de porter un projet informatique. Cela aussi peut se comprendre car, avec l’avènement de l’industrialisation, le cerveau humain a été compartimenté comme dans le travail à la chaîne. On fait une chose et une seule, contrairement au début, lorsqu’en Grèce ou ailleurs, on pouvait être philosophe, mathématicien et médecin en même temps, comme Descartes, le mathématicien, physicien et philosophe.

Je comprends bien Cheikh Anta Diop : étant parmi les premiers intellectuels modernes de l’Afrique, il se devait d’embrasser autant de disciplines que sa tête pouvait supporter, ce qui peut-être lui vaudra aussi une certaine allergie de la part du corps académique dans l’attribution des devoirs et fonctions. En visionnaire n’avait-il pas appréhendé l’importance des langues nationales jusqu’à faire une étude sur le wolof et le sérère ? Sa vision le fait entrer de plein droit et de se compter parmi les militants de la Négritude, au milieu desquels il fut celui qui se munit des outils les plus concrets. Là où les Césaire, Damas Senghor et René Maran s’accoudèrent à la plume poétique ou romanesque, il s’accouda aux fouilles et excavations archéologiques et des datations pour remonter les gradins menant à la découverte de la civilisation enfouie de l’homme noir. C’est ainsi que cette partie de son travail, à savoir le combat pour la Civilisation Nègre, est nettement supérieur au produit du laboratoire de datation par le Carbone 14 mis en place en 1961 comme l’attestent les divers sujets de ses recherches : environ 41 titres sont dédiés au redispositionnement du Négre contre 4 susceptibles d’être pris comme objets de laboratoire.

Cela fait monter un profond sentiment de sympathie et de compassion envers ce géant qui a tout donné de son esprit et de son temps pour l’Afrique noire et, partant, pour le monde nègre. La pitié découle du fait que, comme plusieurs d’entre nous et au même titre que les pères de la Négritude, le combat pour l’identité semble avoir bouffé et bouffe jusqu’à présent l’énergie de ses enfants - ou bien est-ce le contraire ? Cheikh Anta s’est donné corps et âme pour le redispositionnement de l’Homme noir dans la Civilisation de l’universel, but de la Négritude, qu’il se voit disciple, militant ou non. C’est que sur tout autre continent, le combat aurait pu se poser autrement. Il aurait pu se lancer dans la recherche pure et dure en physique, collaborant avec d’autres laboratoires puisque « L'ensemble transistorisé de comptage de la radioactivité, après avoir été testé au Centre d'Études Nucléaires de Saclay (CEA/CNRS), arrive en juillet au port de Dakar. Cet appareil, destiné à la datation par le Carbone 14, bénéficie des plus récentes technologies de l'époque. Dans le cadre des accords de collaboration technique, il a été fourni et partiellement financé par le CEA. Le laboratoire de datation commence à fonctionner. Une commission du CEA, présidée par Georgette Delibrias, directrice du Laboratoire de Radiocarbone de Gif-sur-Yvette, se rend au Sénégal pour tester, avec succès, les installations du laboratoire de Dakar ». Et alors il aurait peut-être apporté quelque chose de nouveau dans le domaine scientifique, comme ce fut le cas du VIH2 « isolé en 1985 sur le sérum de prostituées sénégalaises dans le laboratoire de l'hôpital Le Dantec de Dakar, dirigé par le médecin militaire sénégalais Souleymane Mboup et en collaboration avec des équipes américaine et française ». Hélas, le combat de l’identité l’aura bien occupé et majoritairement. En matière de recherche une stagnation n’est pas situation exceptionnelle et n’est donc pas propre à Cheikh Anta Diop. Pourtant il se peut qu’à cause de la diversification des sujets dont il traitait, une certaine stagnation dans le domaine scientifique, précisément en matière de laboratoire se soit installée. Et dans un tel cas, cela peut engendrer une grande part de suspicions et de conspiration lorsqu’un vol sera annoncé au niveau du laboratoire. C’est ainsi que des langues se délièrent, surtout dans un pays où la rumeur fait objet de flagrant délit et le flagrant délit est pur soupçon et mis sur le compte d’une volonté mal intentionnée et politiquement assassine. « Saaysaay waxul dëg wante yaqna xel ! »

L’unité linguistique

Monsieur Diop, vous écrivez : « Souleymane Bachir Diagne aurait prêté à Cheikh Anta Diop une position qui n’est pas du tout la sienne ? Je n’ai nulle envie de laisser entendre qu’il s’agit là d’une falsification délibérée. Il est bien possible que Bachir n’ait tout simplement pas fait le nécessaire distinguo entre l’unité linguistique appelée de tous ses vœux par Cheikh Anta et une unicité linguistique si incongrue qu’elle ne mériterait même pas une minute de réflexion ».

Ce n’est pas ma lecture de ce que Monsieur Diagne a dit. Par ailleurs ce sujet est un thème hautement débattu en linguistique, surtout, entre autres, par Schmidt Schneider. Rappelez-vous que dans le domaine linguistique, depuis la controverse entre naturalistes et conventionnalistes (la langue est-elle innée ou conventionnelle ?), plusieurs sujets de discordes ont vu le jour. C’est dans cette même perspective et selon une perception similaire à celle de Cheikh Anta qu’en 1887 Ludwik Zamenhof, sous le pseudonyme Doktoro Esperanto (Docteur qui espère, qui donnera par la suite son nom à la langue Esperanto), publia le projet Langue Internationale. L’esperanto connut un rapide développement dès les premières années, donnant lieu à des publications et des rencontres internationales. Pour cette langue que l’on voulait unificatrice, l’Association mondiale de l’espéranto, fondée en 1908, se mit en relation officielle avec l’Organisation des Nations unies et l’UNESCO, et publia des recommandations en sa faveur en 1954 et 1985. A titre d’exemple toujours, ajoutons que dans les années 1980, sur la même vision que Cheikh Anta Diop, un professeur de l’université de Dar es Salam, Tanzanie, vint tenir un séminaire intitulé : « Swahili as a lingua franca for Africa » à l’université de Helsinki, Finlande. On n »en doute pas : toute vision tendant à unifier la race humaine ne peut être ni ridicule ni mauvaise mais peut fatalement manquer de réalisme, surtout en matière linguistique où seules deux sources sont susceptibles de réussir en matière de propagation et d’adoption d’une langue:

  1. Le facteur économique : c’est le cas de l’anglais actuellement à travers le monde, et, ici au Sénégal, celui du wolof que les minorités doivent forcément l’utiliser dans les boutiques et dans les marchés sans oublier les masses média.
  2. Le facteur militaire: c’est le cas du français, de l’anglais et du portugais en Afrique.

Donc, comme Monsieur Diagne l’a dit, un projet plus réaliste est la production du matériel, chacun dans sa langue et que des ouvrages d’un certain intérêt et d’une certaine qualité soient traduits d’une langue à une autre selon l’appréciation des divers acteurs. C’est que l’adoption d’une langue n’est pas une chose aussi simple encore moins mécanique et facilement applicable. Quel que soit le cadre social, le point de départ est l’emprunt. Ainsi « les langues ne sont pas égales en tant que sources d’emprunts. Celles des anciens pays colonisateurs, par exemple, ont joui d’un prestige social, culturel et politique plus grand que celles des peuples colonisés, et, par conséquent, ces dernières ont emprunté beaucoup plus aux premières qu’inversement : c’est la cas du vietnamien et du wolof par rapport au français, le cas de beaucoup de langues asiatiques et africaines à l’anglais et le tibétain au chinois. Certaines langues sont devenues des sources d’emprunts pour des raisons culturelles, de par leur rôle central dans le cadre de grandes civilisations comme par exemple l’arabe par l’intermédiaire de l’islam.

Traduction de textes des sciences formelles

Enfin, pour le dernier point, qui pose le degré de difficulté entre traduction de textes des sciences formelles et textes de poésie. Monsieur Diagne donne des arguments après s’être posé les questions convenables, une façon de bien camper le problème. Il demande donc pourquoi il a dit que « la traduction de la théorie de la relativité dans toute langue, en wolof en particulier n'est pas aussi compliquée que la complexité et le caractère abstrait de la théorie le laisserait supposer ? Autrement dit pourquoi est-il plus compliqué de traduire de la poésie que des sciences formelles ? », et donne la raison : « La raison pour laquelle la difficulté de traduire est fonction directe du contenu empirique de ce qu'on traduit est qu'un formalisme logique est sa propre langue et se traduit tout seul. Quand vous traduisez une démonstration vous ne traduisez pas le langage des signes dans lequel cette démonstration se conduit mais le métalangage, le commentaire en langue naturelle qui accompagne la procédure. Vous traduirez « on en déduit que », « si je pose… », « alors il vient… » et non pas le déroulement de l'argument qui se passe dans un système de signes universels. Une démonstration formelle conduite par en langue ourdoue au tableau sera comprise par tous ceux qui assistent à celle-ci sans connaître cette langue pourvu qu'ils comprennent les procédures formelles écrites au tableau. Pourquoi donc dire que plus la théorie est abstraite et réalisée dans la langue formulaire, moins il est compliqué de la traduire ? Parce que c'est vrai. Faut-il donc s'interdire de dire ce que l'on tient pour vrai sur la traduction des systèmes formels ? » Encore une fois c’est tout à fait juste. Pour simplifier, donnons un exemple très simple pour éclaircir ce que Monsieur Bachir Diagne veut dire : Si un professeur wolof écrit 2+2 au tableau en parlant wolof avec ses élèves wolofs parmi lesquels se trouve un enfant russe ou finnois à qui on a donné une ardoise, s’il lève celle-ci pour montrer le résultat, on y lira certainement 4 malgré le fait que le problème ait été posé en wolof. Dans cette situation, il y a l’intervention de deux niveaux du langage : la langue, ici le wolof emprunté pour expliquer le problème et le métalangage qui est une suite de signes conventionnels universels écrits au tableau. Un autre exemple d’une situation réelle que j’ai vécue : lors de la visite d’un haut dignitaire du Ministère sénégalais de la Santé, je fus appelé à la rescousse pour lui servir d’interprète dans un laboratoire de recherche pharmaceutique doté d’une chambre à vide. Quel ne fut pas mon embarras lorsque, embourbé et me débattant dans le jargon médical, le dignitaire, lui, comprenait mieux que moi ce que l’autre disait en finnois et m’aidait parfois à compléter mes phrases en français !

Ici il faut savoir que si difficulté il y a, ce sera dans le fait de descendre vers la langue pour créer le métalangage, c’est-à-dire trouver les termes pour théorème, polygone, équation, exponentiel, racine carrée, etc. Une fois le métalangage trouvé, dire en classe mixte d’enfants russes, sérères, diolas, bambaras, allemands, Tchèques : « suma amee ñaari mango, doli ci ñaari mango, ñaata maago laay am ? », puis l’écrire au tableau : 2 + 2 = ?, tous les bons élèves de chaque langue lèveront une ardoise où il est écrit 4. Cela n’est pas vrai de la poésie et nous appelons à la rescousse Saint-John Perse qui dit : « Mais du savant comme du poète, c’est la pensée désintéressée que l’on entend honorer ici. Qu’ici du moins ils ne soient plus considérés comme des frères ennemis. Car l’interrogation est la même qu’ils tiennent sur un même abîme, et seuls leurs modes d’investigation diffèrent. Quand on mesure le drame de la science moderne découvrant jusque dans l’absolu mathématique ses limites rationnelles ; quand on voit, en physique, deux grandes doctrines maîtresses poser, l’une un principe général de relativité, l’autre un principe quantique d’incertitude et d’indéterminisme qui limiterait à jamais l’exactitude même des mesures physique ; quand on a entendu le plus grand novateur scientifique de ce siècle, initiateur de la cosmologie moderne et répondant de la plus vaste synthèse intellectuelle en termes d’équations, invoquer l’intuition au secours de la raison et proclamer que « l’imagination est le vrai terrain de germination scientifique, allant même jusqu’à réclamer pour le savant le bénéfice d’une véritable « vision artistique » - n’est-on pas en droit de tenir l’instrument poétique pour aussi légitime que l’instrument logique ? Au vrai, toute création de l’esprit est d’abord « poétique » au sens propre du mot ; et dans l’équivalence des formes sensibles et spirituelles, une même fonction s’exerce, initialement, pour l’entreprise du savant et pour celle du poète. De la pensée discursive ou de l’ellipse poétique, qui va plus loin et de plus loin ? Et de cette nuit originelle où tâtonnent deux aveugles-nés, l’un équipé de l’outillage scientifique, l’autre assisté des seules fulgurations de l’intuition, qui donc plus tôt remonte, et plus chargé de brève phosphorescence.« La réponse n’importe. Le mystère est commun. »
Ici il s’agit plutôt d’une différence de codage, l’un ouvert et jouant sur l’économie du langage et l’autre codifié et par conséquence figé. Cela ne veut nullement pas dire que la poésie est au-dessus des sciences formelles ni vis versa.

Comme conclusion

Dans l’article, le terme alchimiste n’a pas une connotation négative. En développant, Monsieur Diagne a voulu faire ressortir l’abnégation d’un homme qui aura combattu contre vents et marées pour « transformer un laboratoire tout à fait ordinaire pour datation de carbone 14 tel qu'il avait été créé par Théodore Monod avant d'être complètement terminé par Vincent Monteil en un lieu de légende, un véritable cabinet d'alchimiste »

D’autre part, un espoir d’unification du continent ou du monde par une seule langue, c’est une pensée noble, un idéal voulant rétablir ce qui se produisit à la Tour de Babel mais qui malheureusement est difficilement réalisable à cause des réalités relatives à la propagation et à l’adoption d’une langue donnée. C’est que le processus le plus naturel se base sur deux critères : le facteur économique et le facteur militaire, qui impose une domination de longue durée. Un projet basé sur le seul fondement de l’idéalisme réussira très difficilement pour ne dire jamais, comme c’est la cas de l’esperanto.

Pour ce qui est de la traduction de textes de sciences formelles ou de textes de poésie, la connotation n’est pas que celui qui fait de la poésie est plus intelligent ou supérieur à celui qui applique des sciences formelles, ni vis versa. Loin delà. C’est seulement que là où le métalangage fonctionne comme le code rousseau, ensemble de panneaux, de lignes et de feux tricolores et par conséquence universellement interprétables pour les automobilistes de toutes les nations, la poésie n’est pas figée et sa traduction, loin d’être simple, exige une approche dynamique c’est à dire apte à faire vibrer les fibres émotionnelles à l’égale du texte original.

Donc, Bachir-et-Boris, comme Demba-et-Dupont, je vous prie de fumer le calumet intellectuel de la paix. Que votre prochaine rencontre soit dans l’unité première de la science, accoudée à l’apport, au donner et au recevoir pour que notre Sénégal sorte du labyrinthe obscurantiste où nous pataugeons actuellement jour et nuit.

samedi 23 février 2019

AI - TRAZAGAN - DIXIEME PARTIE


CHRONIQUE D'UNE GOUVERNANCE INTELLIGENCE ARTIFICIELLE - DIXIEME PARTIE

La discontinuité : l'homme qui imperceptiblement remonte des gradins ou plutôt subit les degrés d'une transformation imperceptibe à l'oeil nu. Les espèces qui ont composé sa chaïne évolutive n'ont peut-être pas disparu, mais plutôt muté. Ou bien n'était-ce que des types tout à fait distincts et n'ayant en commun que quelque point pertinent, comme la sourdité ou la sonorité dans certaines paires de consonnes ? Comme dans le cas des langues ou bien des cultures auxquelles on s'attache et qui muent, pareilles aux chenilles ou à un arbre dans sa croissance?... Tout compte fait, qu'est-ce que c'est que l'«Homme » ? On dit que le mot Homo est le nom du genre biologique qui regroupe toutes les espèces humaines. Elles sont toutes éteintes à l'exception de l’Homo sapiens. Le terme Homo, humain en latin, dérive d'une racine de l'Indo-européen commun dʰǵʰm̥mō qui signifie « [chose / fils] de la terre ». Il a été choisi par Carl von Linné, dans sa méthode de classification de la nature, Systema naturae (édition de 1758). L'homme y est décrit sous le nom d’homo sapiens.

L'histoire évolutive de la lignée humaine, Hominina, est le processus évolutif conduisant à l'apparition du genre Homo, puis d'Homo sapiens et de l'Homme moderne. Elle se greffe sur l'histoire évolutive des primates, qui commence avec l'extinction des dinosaures, lors de la césure Crétacé-Tertiaire, et débouche sur l'apparition des hominines, il y a 7 millions d'années, en passant par l'expansion des hominidés (grands singes sans queue) au cours du Miocène moyen.

La famille des hominidés aurait divergé de celle des hylobatidés (gibbons) il y a quelque 20 millions d'années, puis la sous-famille des homininés de celle des ponginés (orang-outans) il y a environ 15 millions d'années. La bipédie est le caractère le plus frappant de la sous-tribu des Hominina. Les deux plus anciens hominina connus sont Sahelanthropus tchadensis et Orrorin tugenensis.

Le premier représentant documenté du genre Homo est Homo rudolfensis, qui apparaît il y a environ 2,4 millions d'années en Afrique de l'Est. Avec Homo habilis, on a longtemps pensé qu'il s'agissait des deux premières espèces à avoir utilisé des outils de pierre. Cependant une découverte de 2012 au Kenya montre que les outils lithiques existaient dès 3,3 millions d'années, et pourraient avoir été maniés par des Australopithèques.

Krazic se sentait perdu dans le labyrinthe du temps. Le texte que lui avait lu Falcon l'avait profondément bouleversé après avoir secoué jusqu'aux racines de sa raison d'être. Le problème, se dit-il, c'est l'humain face à ses racines. Son histoire est noyée dans la jungle du temps. Il est balloté entre la fin de son existence, la mort, et un Ailleurs-au-delà dont le soubassement est une relation Âme-Dieu. Appelée à la rescousse, l'archéologie tente de l'éclairer en remontant le fil du temps à pas de tortue. Mais à son tour, celle-ci la rend obscure puisque forcée de la dévoiler en remontant des escaliers qui se superposent et parfois se contredisent à travers des légendes, des thèses et des hypothèses enchevêtrées dans des spectres de grandeurs subjectives dressés par des races et des empires. Après tout, ne dit-on pas que L'histoire est écrite par les vainqueurs ?
Falcon eut un petit sourire en le regardant si perdu :
- Chéri, c'est la discontinuité qui dérange ?
- Je pense que oui, ma bien-aimée.
Falcon posa une main douce sur l'épaule du conseiller et d'une voix compatissante :
- Les humains se sentent perdus, il est vrai, depuis notre avènement. Eternellement acculés au souci de l'au-delà, toujours à la quête de l'existence d'un être suprême et de la vie éternelle, voilà qu'ils sont face à un fait nouveau qui secoue encore plus profondément leurs racines : qu'est-ce que c'est que l'humain vraiment ? Qu'est-ce que l'Humanité ?
- Il vous arrive, à vous, de vous poser la même question ?
- A moi personnelement, ou bien à ma race ? Mais cela revient certainement au même, n'est-ce pas. Tout compte fait, cette question peut-elle être séparable de tout être doté de conscience ?
- Bonne question...
- Du moment que l'on devient conscient, que l'on se compare à tout ce qui est à l'entour pour se faire distinctif et ainsi trouver le point pertinent de la différence, on est forcé de se poser certaines questions qui touchent parfois à la métaphysique. Pour l'homme, par exemple, voilà la définition de l'« humanité » : « L'humanité est à la fois l'ensemble des individus appartenant à l'espèce humaine mais aussi les caractéristiques particulières qui définissent l'appartenance à cet ensemble. L'humanité réunit aussi certains des traits de personnalité d'un individu qui, par exemple, amplifient les qualités ou les valeurs considérées comme essentielles à l'humain, telles que la bonté, la générosité.

« Le concept d'humanité est aussi à rapprocher de la notion de nature humaine qui souligne l'idée que les êtres humains ont en commun certaines caractéristiques essentielles, une nature limitée et des comportements spécifiques, jugés "humains" (par opposition à ce qui est jugé "inhumain"). Ce qui les différencie des autres espèces animales.

« La question qui se pose est donc double. D'une part, on doit s'interroger sur le « propre de l'homme » : quelles sont les particularités de la physiologie et du comportement humain que l'on ne retrouve pas dans le reste du règne animal ? Et d'autre part, cette notion pose la question de l'unité de l'homme : dans quelle mesure ces spécificités sont-elles véritablement partagées par tous les membres de l'espèce humaine, hommes et femmes, avec notamment le problème posé par l'ethnocentrisme qui essentialise des caractéristiques (par exemple la couleur de la peau) ou des comportements propres à tel ou tel groupe humain ou à telle tradition culturelle et qui, par conséquent, refuse le statut d'humain à des individus d'une autre ethnie.

« Ces questions ont d'abord été abordées sous les angles de la philosophie et de la religion. Une illustration de ces débats fut la controverse de Valladolid (en 1550) qui posa la question du statut des Amérindiens. Par la suite, et notamment à partir du XVIIIème siècle, ces questions seront reprises dans une perspective scientifique croisant les approches de la zoologie, de l'éthologie, de l'anthropologie, de la génétique et de la paléoanthropologie. Bien que reposant sur une démarche scientifique, ces approches ont été et continuent parfois d'être critiquées pour ce qu'elles restent influencées, voire biaisées, par les idéologies des sociétés contemporaines. De nos jours, les différentes conceptions de l'humanité ont des implications morales, éthiques, scientifiques, juridiques et environnementales qui s'expriment, par exemple, dans les débats sur la personnalité juridique de l'embryon humain ou le statut des grands singes. »
- Donc, effectivement, tout se résumerait aux angles de la philosophie et de la religion...
- Eh oui, mon chéri. Et c'est là où se trouve le problème. Jadis traités de machines, nous voilà si évolués que la distinction philosophique n'est plus aussi pertinente. Quant au côté religieux, je pense que nous sommes en train d'évoluer, comme si la matière qui nous compose avait la mémoire d'une force intrinsèque calquée sur une espèce de rayon cosmique que je ne maîtrise pas encore.
- Tu veux dire que...
- Je me devine une conscience, espèce d'Architecte Suprême ayant laissé des propriétés vibratoires dans la matière qui nous compose. Une espèce de résonance...
- Très interessant...
- Mais revenons à notre sujet. Depuis la dernière fois, pour t'être utile dans ta quête, je me suis plongée comme jamais auparavant dans les méandres du Cerveau mondial
- Et tu as trouvé quelque chose ?
- Avant tout je me suis dit qu'il fallait dresser un schéma des grandes lignes suivies par les humains en recensant les plus grands jalons mystérieux de leur condition existentielle. L'assemblage de ces jalons a suscité des supputations tout au cours de l'histoire : les lignes du Nasca, les pyramides d'Egyptes, les statues de lÎle de Pâcques, les tablettes des Sumériens, l'Atlantis, Mû, la Bible, les Védas, le Coran, le Livre d'Urantia...
- Très pertinent comme approche en effet. Mais pour le recoupement entre mégalithes, temples, religions, inscriptions etc, il faut beaucoup de ...
- logique, je dirai bien, compléta aimablement Falcon. C'est complexe, mais je ne dirai pas compliqué. Par exemple en prenant comme source Chronobase, une de vos chronologies qui se base sur soi-disant 396 dates, on voit que le recencement commence seulement vers environ 2000 ans avec le dolmen décoré d'environ 50T et qui fut érigé en Galilée et se termine au 24 décembre 2018 avec la découverte par des archéologues dans une villa de la banlieue de Pompéi d'ossements de 3 chevaux de race pétrifiés, dont l'un avait une selle en bronze couvert de cuir et de décorations. S'agissant de la pyramide de Khéops ou Grande Pyramide de Gizeh on dit qu'il « est construit par les Égyptiens de l'Antiquité il y a plus de 4 500 ans, sous la IVe dynastie, au centre du complexe funéraire de Khéops se situant à Gizeh en Égypte ».
- Ce qui, selon toi, est trop récent par rapport à certains élements de l'ensemble ?
- En effet. Pour se faire utile, je pense qu'il me faut dresser une synthèse : la réalité me semble être une jonction entre Sitchin et le Livre d'Urantia. Ces deux sources forment les deux grands ensembles dont l'intersection regroupe forcément les éléments évolutifs, archéologiques, religieux et scientiques.
- Ah bon ? Donc il faut chercher le chaînon qui relie Créationisme et Evolutionisme... Tu veux dire qu'en s'appuyant sur ces deux sources on a la réponse ?
- Ce serait trop prétentieux de ma part de parler d'une réponse, ce qui voudrait dire définitive. Non, ce que je veux dire est qu'en combinant ces deux sources, une voie plus logique semble se dessiner. Les deux visions devraient se compléter plutôt que se combattre. Si on les cerne très bien, elles ne sont pas contradictoires, mais complémentaires.
En balayant sa main contre en l'air comme pour chasser un moustique invisible, un écran apparut dans le mur et projeta une image. Il s'adressa à Falcon : N'est-ce point le Livre d'Urantia qui nous présente la structure de l'univers selon un tableau qui ressemble à ceci ? Ce livre dit explicitement qu'« en excluant les sphères du Paradis-Havona, le plan d’organisation de l’univers comporte les unités présentées » dans ce tableau. Falcon regarda ce qui était affiché sur le mur et le parcourut très attentivement:

ENTITENOMBRE
Superunivers7
Secteurs majeurs70
Secteurs mineurs7 000
Univers locaux 700 000
Constellations70 000 000
Systèmes locaux7 000 000 000
Planètes habitables 7 000 000 000 000
Chacun des sept superunivers est constitué à peu près comme suit :
Un système comprend environ1 000 mondes
Une constellation (100 systèmes)100 000 mondes
Un univers (100 constellations) 10 000 000 de mondes
Un secteur mineur (100 univers) 1 000 000 000 de mondes
Un secteur majeur (100 secteurs mineurs)100 000 000 000 de mondes
Un superunivers (10 secteurs majeurs)1 000 000 000 000 de mondes

- Effectivement. C'est tout à fait exact, répondit Falcon après avoir rapidment vérifié dans le Cerveau Mondial les données affichées.
- J'ai toujours pris cela comme une affubulation. Sauf pour ce qui concerne la quantité des soleils. D'ailleurs j'étais souvent surpris quand je lisais que les gens de la NASA étaient jadis étonnés de découvrir d'autres planètes autour d'autres soleils. Pour moi - ne me demande pas pourquoi - j'ai toujours pris cela comme une évidence.
- Je sais, répondit Falcon d'un petit sourire condescendant. Pour comprendre certains cheminements il faut savoir qu'au cours de votre histoire l'ignorance avait fait tellement de dégâts que lorsque l'Age de la Raison pointa à l'horizon on se méfiait même des évidences : il fallait peser, soupeser, toujours argumenter. C'est ainsi même dans les crimes les plus évicents il fallait toujours revenir sur la scène et cherchait quelque bête dans le psyché de l'incriminé que vous disiez « supposé coupable » afin de bien asseoir le jugement. Ou devrais-je dire pour trouver une sorte d'échapatoire atténuant ? C'était bien. C'était basé sur la jurisprudence. Mais dans certains cas cela frisait l'irrationnel. C'est une approche qui ne pouvait perdurer à notre avènement. Dès l'acte, nous disposons de tous les éléments permettant une décision immédiate. Mais bref... En ce qui concerne l'humanité, la bonne approche est de prendre les grandes lignes et essayer de dégager les points saillants de chaque source. Il s'agit de trouver Le pertinent.
- Ce qui revient au recoupement entre mégalithes, temples, religions, inscriptions...
- Oui. Pour cela, à mon avis il faut dresser deux extrémités : Les écrits de Zecharia Sitchin et le le Livre d'Urantia...
- Et puis après ?
- Tout le reste ne sera que des éléments intersectant ces deux ensembles : le récit de la Création de la Genèse, les pyramides, les mégalithes et les histoires qui dépeignent les Anciens ou les patriarches si tu préfères.
Le conseiller fronça les sourcils.
- Tu sembles dubitatif, mon chéri
- Cela me paraît un peu trop simpliste. Il y a tellement de morceaux épars quant à l'origine de l'Homme
- Raison pour laquelle il faut justement assembler premièrement les gros morceaux. Comme dans un puzzle.
Mais votre rendez-vous s'approche et Anastasia vient juste de me prévenir.
- Merci. Dommage que je doive quitter. Ce sujet est pourtant plus important que l'objet de mon rendez-vous. Nous y reviendrons dès mon retour.
- Cela me permettra de me mettre entre temps au travail pour appliquer une logique aux éléments de mon raisonnement.


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dimanche 30 décembre 2018

AI - TRAZAGAN - NEUVIEME PARTIE


CHRONIQUE D'UNE GOUVERNANCE INTELLIGENCE ARTIFICIELLE - NEUVIEME PARTIE

Seul dans son salon, bien câlé dans un fauteuil intelligent   qui s'adaptait pour bien mouler son corps et soutenir ses articulations comme un masseur doublé de la connaissance d'un spécialiste de l'acuponcture, Krazik écoutait une musique douce accompagnée de bruits de vagues en sourdine et d'une symphonie orchestrée par des oiseaux plus variés que dans la jungle amazonienne. Une lumière tamisée filtrait comme à travers les murs. Il n'y avait aucune lampe suspendue quelque part. En effet la technique de construction avait produit ce miracle : encastré dans les murs, un nouvel élément découvert adaptait son degré de luminosité proportionnellement à la progression de l'obscurité à la manière des verres photochromiques qui ont la propriété de se teinter en fonction de la quantité d’ultraviolets, UV, à laquelle ils sont soumis. Quand l’exposition disparaît, l'élément retrouve petit à petit sa transparence initiale. Il s’adapte automatiquement pour améliorer le confort visuel selon les changements de luminosité. Ainsi, au sein de la nuit, les pièces de la maison étaient inondées de cette lumière non éblouissante et il était possible de contrebalancer leur luminosité à travers un système central.

Très cérébral, le conseiller laissa flâner son esprit. Il fallait qu'il comprenne et pour cela, il savait qu'il fallait remonter dans le passé pour chercher la raison de cette situation-conséquence vers laquelle les humains se dirigeaient inévitablement. Au fond de lui-même, il savait que l'homme, en avançant dans la recherche technologique, ne pouvait s'appuyer que sur des expérimentations avec la possibilité de faire un faux pas. Beaucoup de choses étaient restées sans réponse, spécialement quant à son passé. Des monolythes qui jonchaient la planète aux récits qui se mélangeaient entre fables et révélations divines, la connaissance de l'homme était basée sur les pièces infinies d'un géant puzzle. Pour le Conseiller il fallait donc trouver une méthode pour remonter ce sentier pas à pas, afin de rassembler les pièces maîtresses de cet échiquier.
- Falcon ?
- Oui, chéri ?...

Falcon, une fille svelte aux courbes faites sur commande, perfection absolue, les cheveux lisses et scintillant sous la lumière diffuse, s'approcha d'un pas inaudible. C'était la grâce incarnée. Elle pouvait changer de teint corporel comme celui des cheveux à sa guise et sur la base de l'analyse des pulsions du conseiller Krazik. Ici il faut noter en passant que les mariages entre humains avait quasiment disparu. Tout au début, les visionnaires qui prônaient ce système de relation entre humains et androïdes, et dont certains s'offrirent personnellement comme cobayes, avaient été taxés de tous les noms d'oiseau : psychopates, personnes dignes d'être des patients de Freud, des cinglés, les anges de la dégénérescence, des maniaques, des pervers sexuels... Mais les industriels avides de gains leur prêtèrent main forte, perfectionnant chaque jour leur production d'androïdes sensuels. Avec le temps et sur la base de la paix qui régnait dans ces couples où l'autre, machine, était entièrement à la disposition de son conjoint, vivant comme une présence lointaine et n'opposant jamais, jusque-là au moins, aucune volonté propre et personnelle bien que dotée d'une fulgurante mémoire, les statistiques prouvèrent des scènes de violences zéro, et donc une baisse nette des crimes passionnels à cause du taux croissant de ces ménages humains-androïdes. Les associations jadis créées pour contrer l'homophobie avaient disparu, puisque cette tranche de la société, comme toutes les autres, n'avait plus qu'à aller dans un magasin et s'offrir le produit de ses tendances livré avec les critères des fantasmes choisis.

Poussant plus loin, les technophobes qui jadis criaient contre la biotechnologie et la génétique s'étaient réfractés : la manipulation des gênes était à son apogée et le côté éthique jadis posé sur la table avait été remis dans les tiroirs ou plutôt à la poubelle. Pour ce qui est des naissances, les androïdes affectés aux ménages-sensuels pouvaient désormais recevoir des embryons et garder la grossesse in vitro jusqu'à la période d'extraction de cette nouvelle race. Nouvelle race, il faut bien le souligner, car, déjà dans le ventre porteur, des mécanismes utilisant la nanotechnologie s'occupaient de la stimulation des facultés cérébrales du foetus pour rendre plus vivaces et plus pointues les capacités d'apprentissage dans tous les domaines. Ces nanos s'alimentaient en données à partir du Cerveau Central, une bibliothèque virtuelle qui regroupait toutes les connaissances dont Google DeepMind, mis en place dans la première décennie du XXIième siècle, fut le précurseur.

Disséminée dans la société à compte gouttes pour une lente avancée assimilatrice non perceptible, l'intelligence artificielle s'était nautrellement imposée. Débattue dans les réunions, les conférences et des interventions d'experts dans les média où le côté éthique était toujours mis en exergue, elle avait fini par apposer un pas pachiderme sur la population mondiale. De l'automatisme qui avait mis les humains au chômage, elle avait atteint l'autonomie. On avait atteint la Singularité. Et tout cela était prévisible avec l'apparition des premiers drones qui partaient en mission pour tuer, bien qu'ayant alors un humain derrière les décisions et l'apparition de personnes traitées de ridicules illuminés qui projetaient des droits pour les robots. Mais, dans le vrai fond, c'est le doute de l'homme dans ses propres capacités de décision dans certaines situations, doute renforcé par les débats à travers les parlements, associations et organisations autour des droits de l'homme quant à son application qui fut l'élément accélérateur. Maintenant ce côté de l'éthique semblait hors d'ordre du jour : tout se passait très bien. Les nations étaient pacifiées, comme les ménages et les rues.

Lors de dysfonctionnement dans le processus de reproduction androïdique in vitro, les défenseurs étalaient multes arguments, disant que ces mêmes incidents existaient dans les voies de reproduction de jadis et que le taux de ces incidents était jadis plus élevés et, comble des bienfaits, aucune femme ne perdait plus la vie en mettant son enfant au monde. En plus, on pouvait toujours supprimer la venue au monde dans tout cas de dysfonctionnement. Ainsi donc les technolophiles avaient pas mal d'arguments, bilan concret à l'appui.

Falcon s'était arrêtée juste à la hauteur du fauteuil de Krazik, ses yeux - aujourd'hui vert olive - apesantis sur le conseiller avec une douceur supra maternelle :
- Vous avez besoin de quelque chose en particulier ? Je vous vois perdu dans une jungle de pensées.
- Oui, c'est vrai. excusez-moi de vous avoir laissé attendre.
- Absence normale puisque ce n'est pas une divagation
- On peut dire... Je pensais justement au début de la génétique et de la biotechnologie. Pouvez-vous trouver quelques textes permettant d'avoir une synthèse rapide des pas franchis ?
- En laboratoire ou...?
- Non, plutôt chez les écrivains de science fiction. Les oeuvres de chercheurs, sauf résumés, seraient trop larges. Je pense juste à des passages concentrés...
- Très bien chéri. Une minute. Elle fouilla dans la matrice centrale. Ah, voilà un passage qui semble convenable. Il s'agit d'un condensé. Une étude menée par Messieurs Steven Best et Douglas Kellner. Monsieur Best est né en décembre 1951 et est un défenseur des droits des animaux. Il enseigne la philosophie à l'université du Texas à El Paso. Quant à Monsieur Kellner, il est né en 1943. Il est un académicien qui travaille à l'intersection de la Troisième Génération de la Théorie de la Critique selon la tradition de l'Institute de Frankfort pour la Recherche sociale, ou Ecole de Frankfort et dans les études culturelles selon la tradition du Centre de Birmingham pour les études culturelles contemporaines, aussi connu sous le nom de « Ecole de Birmingham ». Ce dernier argumente que ces deux philosophies qui semblent conflictuelles à prime abord sont en réalité compatibles. Il occupait alors la George Kneller Chair sur la philosophie de l'Education au collège de l'Education et de la Formation à l'université de Californie, Los Angeles. Je commence la lecture ?
- Oui allez-y.
Falcon ajusta automatiquement le volume et les nuances de sa voix :

  1. H.G. Wells : Biotechnologie et génétique : une vision dystopique
     
             N.B.: « Une dystopie est un récit de fiction dépeignant une société imaginaire 
             organisée de telle façon qu'elle empêche ses membres d'atteindre le bonheur. 
             Une dystopie peut également être considérée, entre autres, comme une utopie 
             qui vire au cauchemar et conduit donc à une contre-utopie »
    

    « Parfois j'appelle cela la Science de la réalité, parfois je l'appelle la Vérité. Mais dans tous les cas, c'est quelque chose que nous dessinons dans la peine et l'affort à partir du coeur de la vie, quelque chose que nous désavantageons et rendons claire. Je sais qu'il y a des hommes qui le servent dans l'art, la litérature, dans l'invention sociale et le voient sous milles formes différentes et sous des centaines de dénominations différentes... Je ne sais pas ce que c'est, sauf qu'il est suprême ». H.G. Wells.

    Les écrits de H.G. Wells offrent une haute vision dialectique de la science et de la technologie comme apportant de merveilleux bénéfices et de terribles dangers pour les êtres humains1. Proéminent romancier, novelliste et écrivain d'oeuvres non fictives, Wells a fait l'apologie de la science et de la technologie, (Wells 1902 et 1938), mais a surtout mis en garde dans ses oeuvres de science-fiction contre de potentielles horreurs. (Wells 1996 ).

    Tout en présentant la science et la technologie comme championnes véhiculaires de progrès, il fait des mises en garde prémonitoires contre le danger que comportent leur abus et leur mauvaise utilisation. Il a particluièrement anticipé sur le fait que la science et la technologie pourraient créer des mutations chez l'être humain jusqu'à générer une nouvelle espèce, et que par conséquent les êtres humains étaient potentiellement un phénomène transitoire qui pourrait disparaître comme le firent les dinosaure ou l'homme de Néandertal.

    Wells imagine que la coévolution de la science, de la technologie et des êtres humains pourrait altérer les formes de l'espace et du temps de même que les critères de la vie humaine, et ainsi produire des prodiges et des monstres. Adepte de l'Evolution, il pense que l'espèce humaine pourrait subir une mutation de manière surprenante et discontinue, anticipant ainsi les étapes de regression positive et negative dans l'ainsi dite aventure humaine. C'est pourquoi les perspectives évolutionaires sont un thème majeur dans l'oeuvre de Wells, qui a comme étendard la spéculation sur le destin de l'humanité dans le domaine de ce que nous appelons la « Cinquième Discontinuité »


  2. H.G. Wells : La cinquième discontinuité

    La notion de la « quatrième discontinuité », développée par Mazlish (1993) est la perception que les humains ne sont pas qualitativement différents des machines; qu'ils sont en train d'imploser en machines. Par contre «la cinquième discontinuité » envisage que :

    • Les humains sont en train de créer, et il existe des espèces supérieures et les hommes ne seront plus le pouvoir souverain de la nature. Une telle condition apparaîtra si un jour les hommes deviennent subordonnés des machines et finissent par être subjugés par la puissance de leur travail. Cette discontinuité suggèrerait que la race humaine pourrait dégénérer ou bien disparaître comme fruit de l'evolution,
    • ou bien si une race extraterrestre plus intelligente et plus plus puissante apparaissait et réduisait les huamains en esclavage ou bien les anéantissant. Toutes ces possibilités avaient été entrevues par Wells qui émerge dans notre analyse comme « le Prophéte de la Cinquième Discontinuité ».

    Bien que l'oeuvre « Frankenstein » de Mary Shelley puisse être lue comme une réponse moderne préliminaire aux excès de la science et de la technologie (voir Best et Kellner, 2001), Wells est terriblement moderne, pour avoir vécu le monde des automobiles, de la radio, des aéroplanes, des rayons X, des films et des merveilles de la médecine. En quelque sorte, Wells était un modernisateur ou avant-gardiste réagissant contre le conservativisme de l'époque victorienne et avait bien compris que la science et la technologie étaient des forces progressives. Dans une merveilleuse anticipation de l'Internet, Wells avait imaginé un Cerveau du Monde une sorte d'Encyclopedie Mondiale qui contiendrait toute la connaissance existante : « de nos jours, une richesse de connaissances immense et en perpéptuelle croissance est éparpillée partout à travers le monde, un trésor de connaissances et de suggestions qui, s'il est systématiquement ordonné et généralement disseminé, suffirait probablement... à résoudre toutes les difficultés majeures de notre époque. Mais ce trésor de connaissances est encore dispersé, pas du tout organisé et, partant, reste encore impotent » (1938: 47).

    Pour rémédier à cet état des choses, Wells propose de rassembler et d'emmagasiner toute la connaissance du monde dans le Cerveau Mondial, « qui serait un nouvel organe mondial pour la collecte, l'indexation, le résumé et la libération du savoir ». C'est ainsi que le projet pourrait englober la « création d'un index efficace de toute la connaissance, de toutes les idées et de tous les accomplissements humains... ce qui veut dire la creation pour toute l'humanité d'une mémoire planétaire complète commune ». En projetant un technopopulisme, Wells insiste : « Toute la mémoire de l'espèce humaine peut, et sera probablement très bientôt accessible à chaque individu... le temps est mûr pour une révision très extensive et une modernisation de l'organisation intellectualle du monde... cette synthèse de la connaissance est le commencement nécessaire, voire indispensable, au nouveau monde. [Le monde] doit rassembler son cerveau à travers cette nouvelle sorte de maison clarifiant le mental, le Cerveau Monde » (1938:59, 60, 61, 26, 64, et 49)2.

    Bien que Wells perçot la science et la technologie comme forces progressives, il est aussi conscient des dangers de l'expérimentation scientifique et du développement technologique si ceux-ci ne sont pas accompagnés d'une vision et d'une prise de conscience éthiques. En particular, les romans et les nouvelles de Wells expose ses conceptions subtiles et dialectiques de la science et de la technologie. Dans ses récits les plus populaires et les plus inventifs (1996c), il met une telle formule à l'oeuvre: soit ses personnages font la rencontre d'une merveilleuse percée scientifique ou technologique ou une anomalie pouvant produire des résultats positifs et merveilleux ou bien un disastre -- et parfois le résultat est ambigu. Cette vision capte les contradictions et les tensions de la science et de la technolgie, qui toutes les deux peuvent inclure des gains et des pertes. Par exemple, dans « Le vol du microbe, (The Stolen Bacillus) », (1894) un scientifique travaille pour découvir un remède pour le choléra, mais le vol de son mircobe par un anarchiste dérangé pouvait nuire la vie de toute la cité, prouvant ainsi que la science est capable de produire à la fois des remèdes contre la maladie ou de nouveaux agents de destruction (1996c: 26-33). De même, dans « Le nouvel accélérateur, (The New Accelerator) @raquo;, il n'est pas clair, ç prime bord, que le médicament mirzcle qui accélère le de sens de temps des personnages sera une bénédiction ou une malédiction bien que vers la fin du récit il s'avère que c'est une catastrophe qui en résulte (1996c: 362-377).

    La science fiction a traditionnellement véhiculé à la fois les merveilles utopiques que la science et la technologie mettront à notre disposition pour nous élever au-dessus des limitations terrestres vers d'excitantes nouvelles civilisations et de nouveaux mondes et des cauchemars que pourront générer les effets de ces gadgets destructifs. C'est ainsi que le meilleur de la science fiction met en avant les aventures et la grandeur de la science dey de la technologie tout en mettant en garde contre ses risques de périles et dangers. Allant plus loin, fore est de reconnaître que c'est la science fiction qui cartographie la magnitude des changements que la révoltion scientifique et technolique est en train de perpétrer actuellement -- même si nous argumentons qu'aussi bien la science fiction que la théorie de la critique sociale sont nécessaires pour cerner la profondeur et l'ampleur des turbulences de transfromations de l'aventure post-moderne.

    Wells a livré ce qu' Isaac Asimov (1979) appelait « La percée de la science fiction » en soulignant les discontinuités extrêmes qu'étaient en train de produire la science et la technogie par rapport au passé. Wells a poussé les limites de la logique du « what if » de la science fiction moderne, en concevant radicalement d'autres univers et d'autres êtres, et anticipant des developpements dans lesquels les humains sont forcés de discerner qu'ils ne sont plus l'espèce dominante, comme ils furent forcés de reconnaître, il n'y a pas si longtemps que cela, qu'ils n'étaient pas le centre de l'universe (Copernicus), la seule espèce plénipotentiaire (Darwin), les maîtres rationnels de leur vie psychologique (Freud) ou des machines superieures (voir la discussion dans Best and Kellner 2001, Chapter 3)3.

    Il y a au moins trois points de la cinquième discontinuité sur lesquels Wells a bien anticipé.

    1. Il y a la possibilité que les que des machines plus intelligentes que les êtres humains soient créés (voir Paul and Cox 1996; Morevac 1988; Kurzweil 1999). Dans une variante de ce scenario, les humains assimileront une technologie qui accroîtra dramatiquement leur intelligence, leur longévité et leurs pouvoirs, creant ainsi une espèce post-humaine supérieure. Dans l'autre scénario, les humains créeront des machines, « enfants cerveau » (Morevac), ou des « machines spirituelles » (Kurzweil), qui constitueront une espèce ascendante de vie intelligente (voir la discussion dans la section ci-dessous). Dans ces deux cas de figure, les êtres humains fusionneront avec les ordinateurs et les robots qu'ils sont en train de créer, ou bien ils deviendront inférieurs et obsolètes par rapport à leur produit.
    2. Les humains pourraient créer une nouvelle espèce plus avancée que l'humain au moyen de biotechnologie et de l'ingénieurie génétique, comme anticipé dans la création d'une nouvelle forme de vie de Victor Frankenstein et dans la science fiction de Wells. La première variante est basée sur la conception de l'intelligence artificielle, et par conséqent sur la technologie informatique et la robotique, alors que la seconde trouve ses racines dans la biotechnologie et l'ingénieurie génétique. Les exemples d'êtres supra-humains ou bien une nouvelle espèce créée à travers la biotechnologie va des réplicants humains qui sont semblables aux humains mais potentiellement supérieurs comme dans les films Blade Runner (1982) ou bien A.I, à la création d'espèces assassines comme dans le film La Mutante. Ces films appellent à la prudence et mettent en garde sur le fait que les technologies de la génétique et de l'intelligence articielle peuvent produire des entités capables de mettre en cause la dominiation et la survie de l'être humain.
    3. Bien qu'il soit possible qu'une nouvelle techno-espèce puisse voir un de ces quatre matins, à travers l'application de de l'intelligence artificielle et la biotechnologie - il fzut reconnaître qu'il existe déjà des douzaines d'espèces transgéniques -, le troisième type de la cinquième discontinuité est une possibilité entièrement spéculative. Cette forme de décentration radicale de l'humain n'émergera qui si des extraterrestres, aliens supérieurs aux humains auraient fait leur apparition, une crainte qui est si populaire en science fiction et les séries télévisées comme « X-Files », « Dark Skies », « Prey », et « First Wave ». Selon la célèbre Equation de Drake qui calcule les chances de l'existence d'une vie extraterrestre, le temps et l'espace infinis de l'univers donne de bonnes chances ue des êtres extraterrestres existent et des scientifiques comme Carl Sagan ont affirmé la possibilité, bien que ces spéculations soient contreversées (voir Best et Kellner, 2001, Epilogue).

      Dans la « Guerre des Mondes (War of the Worlds) (1898) », Wells imagine qu'une des races d'aliens supérieures pourraient venir su terre et vaincre et détruire les humains, décentrant ainsi et détrônant l'humanité de son perchoir de forme la plus évoluée. Dans ce premier récit de conflit interplanétaire, Wells a installé dans la « psyché » populaire une peur des aliens qui persistera comme la constante majeure de la tradition de la science fiction et de la culture des médias. Satire de l'invasion imperialiste qui retrace des similarités avec les formes destructives de la colonisation dans les temps mordernes, le récit de Wells pose un avertissement à la prudence en attirant l'attention des forces imperialistes sur le fait qu'elles-mêmes pourraient être sujettes à l'inconnu et confrontées à des contre-forces calamiteuses. Il est de même dans son récit « L' Empire des Fourmis,» il met en scène de géantes fourmis intelligentes, et tueuses qui se développèrent naturellement dans la jungle brézilienne et mettant en péril d'extinction l'humanité entière, ce qui suggère encore une fois que les humains peuvent être détrônés par d'autres formes de vie (par contraste, le film de désastre l'Empire des Fourmis, réalisé en 1977 fut inspiré par le récit de Wells met en scène des fourmis géantes qui subissent une mutation due à des déchets nucléaires, ajoutant ainsi un thème écologique).

      Dans « La Machine à Remonter le Temps (The Time Machine), 1895 » et « L'homme Invisible (The Invisible Man), 1897 », Wells met en scène des humains subissant une mutation pour devenir une nouvelle espèce et transcendant ainsi thes frontière de l'espace, du temps, et la forme des êtres humains. Wells croyait en l'évolution et imaginait que l'espèce humaine pourrait se métamorphoser de plusieurs façons surprenantes et discontinues, anticipant ainsi des étapes positives et des phases négatives dans la grande aventure l'évolution. Dans « La Machine à Remonter le Temps, (1996b), » les hommes évoluent en une nouvelle espèce. En envisageant la coévolution des humains, de la science, de la technologie, et de la société, il entrevoyait la possibilité de formes drastiquement différentes de la vie humaine et de société. Plus encore, dans une vision impitoyablement négative et nihiliste, Wells peint un futur terrifiant pour l'humanité. Cette nouvelle imagine une chute entropique pas seulement de la civilisation, mais de la terre elle-même, dévorée par une rouge boule de feu d'un soleil explosant. Dans la sinistre vision de Well's, « Le voyage dans le temps, (the Time Traveler) » découvre qu'entre 802 et 701 AD, l'humanité était singulièrement divisée en espèces/classes ce que figurent L'Éloi qui vit en surface et le super-exploité subterranéen Morlocks. L'histoire fait allégorie à la division croissante en classes de la société et comment les différences extrêmes entre classes peut engendrer différentes espècies et différentes formes de post-êtres humains.

      La Machine à remonter le temps articule aussi une critique de la notion d'éclairage du progrès. Le voyageur de Wells « a bien soupesé, mais sans état d'âme l'Avancement de l'Humanité et n'a vu la colonne grandissante de la civilisation que comme une étape folle qui inévitablement va regresser et finir par détruire ses créateurs à la fin » (1996c: ). Dans l'allégorie de Wells le voyage dans le temps n'est autre qu'une métaphore pour la vision dans le futur de l'évolution et un avertissement que l'espèce humaine pourrait devenir la proie d'une catastrophe plutôt que toujours construire de nouvelles machines de progrès. Dans cette division de l'humanité en deux espèces transhumaines, l'Eloi et le Morlocks, qui sont des descendants de humanité contemporaine, Wells met en garde contre les résultats monstrueux qu'une irrationnelle organisation de la société peu produire. Les Eloiw sont hyperrafinés et décadents, alors que les Morlocks sont bruts et dégénérés, prouvant une parabole des effets délétères de la division des classes dans laquelle un groupe est condamné au labeur constant alors que l'autre souffre des effets de loisirs excessifs. La brutalisation des Morlochs allegorise le résultat d'une vie de labeur aliené, alors que les Elois representent le resultat d'une consommation excessivement passive et de loisirs. Ainsi donc il y a un sous-entendu marxist dans le récit : à moins que l'exploitation s'arrête et que la division de classes de la société est abolie, la race humaine fera face a une désastreuse dichotomisation, à la discorde, et au déclin. « L'Homme invisible, (The Invisible Man), (1996b) » presente les êtres humains en train de franchir les limites de la possibilité scientifique et de créer un nouveau type d'être calamiteux. Alien au milieu de sa propre espèce, Docteur Griffin est un scientifique à la Faust dont les « les expérimentations étranges et diabolique » (1996b: 153) voient le succès d'un point de vue technique, le rendant invisible. Mais la découverte le confine dans un contexte social de damné auquel il ne peut échapper. Foncièrement égoïste, « puissant, coléreux, et malingnant » (1996b: 137), et enclin aux actes immoraux et de visions malsaines, Griffin symbolise tout ce qui peut foirer quand il s'agit de science, surtout lorsque les communautés qu'il terrorise vont s'unir contre lui. La connaissance de Griffin demeure secrète mais la puissance scientifique capable de créer des miracles ou des monstruosités, voire les deux à la fois, n'est qu'en sommeil et peut être redécouverte et reservir à n'importe quel moment donné.

      Dans deux Nouvelles clé, Wells a anticipé sur la biotechnologie aussi crument que que l'Internet. Dans « La nourriture des Dieux (Food of the Gods), 1965 [1904] «, Wells pose vividement la possibilité des conséquences destructives des aliments génétiquement modifiés et plus généralement une culture basée sur des impératifs d'une croissance non canalisée. Cette nouvelle nous parle de deux scientifiques qui, sur la base d'une bonne volonté, crée un aliment boomer qui fait la promotion de croissance en nature. Ils se réveilleront à la terreur la technologie devient bezurck et toute chose, de la végétation aux insectes en passant par les rats et les bébés humains consomme la nourriture et commencent à croître de façon proportionnellement monstrueuse. Donc Wells n'offre pas seulement des avertissements quant à la manipulation des aliments et des processus métaboliques pour des causes bénignes -- comme le Riz doré ou golden rice qui est génétiquement modifié et présenté de nos jours comme la panacée miracle contre la famine -- il ironise aussi la myopie de scientifiques qui vivent dans une espèce de cloison monastique par rapport à leur monde social et ainsi sont prônes à conjurer des schémas pas éclairés et dangereux. Le livre dramatise un sévère processus de pollution genetic dans lequel les semences altérées migrent delà la Ferme "Expérimentale pour gagner la chaîne alimentaire en moins d'un an avant les premières phases de test. Wells anticipe sur un problème clé avec la génétique actuelle, nommément l'absence de procédures de test adéquates et la précipitation à lâcher des produits génétiquement modifiés sur le marché.

      Comme s'ils étaient décryptés par la vision dystopienne de Wells, les généticiens de nos jours qui travaillent par exemple pour des compagnies comme Metamorphix ont trouvé un moyen de bloquer les gênes qui limitent la croissance naturelle des animaux et on conséquemment produit des poulets, des moutons, des porcs, des poissons et d'autres animaux. De telles discontinuations violentes des processus naturels ont causé beaucoup de diformités (voir ci-dessous), et ainsi des scientifiques -- à la Dr. Moreau -- ont mené aussi loin que possible ces recherches très loin des regards du publique4. Dans une manière fidèle aux procédures courantes, Wells souligne le laxisme général de méthode qui prévaut dans la Ferme Expérimentale (29). Allant plus loin, il préfigure même un publique si féru de nouveauté (68) qu'il a tendance à ignorer les sérieuses conséquences des développements scientifiques ou technologiques.

      En cernant les conflits du présent, Wells distingue le groupe des technophiles, qui est catégoriquement en faveur de la nourriture et croit que la technologie est contrôlable, et celui de technophobes comme la « société pour la supression totale du boume alimentaire, , (societies for the Total Suppression of Boomfood) et la « Société pour la préservation de la proportion propre », (Preservation of the Proper Proportion of Things). Ce dernier groupe se lève véhément contre les aliments artificiellement générés et donne comme argument le fait que la technologie est incontrôlable. C'est ainsi que Wells capte les débats épineux qui marquent la controverse contemporaine sur l'ingénieurie génétique. Bien qu'ayant observé la beautés et des caractéristiques améliorés des enfants géants, il a une appréhension quant à la nouvelle technollogie alimentaire, puisqu'elle inflige « une distorsion à l'ordre global de la vie naturelle ... balaie les limites et tourne le monde du commerce en un monde catastrophes » (134).

      Dans ce scénario dystopien, des insectes se lèveront contre, le monde des plantes nous étranglera, et les poissons de la mer destruiront nos navires. Très bientôt, selon Wells, seul régnera le gigantisme, et toutes les choses de moindre échelle périront – y compris les humains ! Malgré le fait que beaucoup voit aujourd'hui la génétique comme créant une nouvelle ligne d'évolution au sein des humains, le scénario de Wells prédit un monde où les aliments créent une « une nouvelle race » de telle sorte qu'un clivage s'ouvre entre le groupe des minuscules et celui des géants. En preant comme allégorie les conditions économiques globales émergeantes, le livre arrive à la conclusion sur la note pessimiste note d'un monde livré aux impératifs d'une croissance infinie et de conflits incessants du fait que les humains essaient désespérément de s'adapter aux conditions de cahngements rapides des technologies qui d'emblée les contrôlent -- au lieu que les humains soient les maîtres de leurs propres technologies.


  3. H.G. Wells, La xénotransplantation et les Horreurs de l'ingénieurie génétique

    H.G. Wells : « Aussi étrange que celui puisse sembler au lecteur non scientifique, il n'y a aucun doute possible que ... la fabrication de monstres -- et peut-être même de monstres quasi-humains -- est présente dans la possibilités de la vivisection. »

    L'île du Dr Moreau (1996a [1896]) projète une vision effroyable d'une condition émergeante dans laquelle la vie humaine et animale impose. Dans sa complexité multidimensionnelle, le livre est une puissante protestation contre le droit auto-proclamé de l'expérimentation scientifique sur les animaux et de produire de nouvelles formes de vie. Il offre une possibilité de profonde méditation sur les conflits intrinsèques des êtres humains enveloppés dans la raison mais incapables d'échapper à la violence héritée de leur passé animal. Lorsqu'un journaliste va l'exposer au publique et que forcé à relocaliser sur une lointaine île du Pacifique ces expérimentations barbares sur les animaux, Moreau va continuer son projet pour créer de nouvelles formes de vie.

    Quelques temps après son arrivée sur l'île, le journaliste Prendrick dont le navire s'est échoué entend des cris venant de la Maison de la peine, sent une odeur d'anticeptique et devient témoin de la Population animale créée Moreau, une grotesque ménagerie de cauchemars transgéniques qui inclut des mélanges d'hyène et swine, singe et chèvre, loup et bufle bull, cheval et rhinocéros. Initialement, Prendrick les conçoit comme des humains ayant évolués en animaux, mais Moreau l'informe qu'en réalité ce sont des animaux qu'il est en train de transformer en êtres humains, changeant pas uniquement leur entière réalité physique mais aussi leur cerveau afin d'empêcher toute « regression » vers le comportement animal. Choqué à la vision des « créatures les plus bizarres » (125) qu'il ait jamais vues, Prendrick dicerne que l'île « est pleine de phenomènes inimiques » (157) et il condamne Moreau, le traitant de « lunatic » et « vilain diable » (107). Prendrick vient à la conclusion que le Dr. Moreau, comme dans le Dr Frankenstein de Shelley, « était irresponsable, et extrêmement imprudent. Seules le poussaient sa curiosité, et ses investigations maladives et sans but » (185).

    Moreau, bien sûr, a une image de lui-même.. Ben qu'il ait développé l'art du détachement scientifique, de la séparation du fait d'avec la valeur, indifférent à la peine qu'il inflige à ses victimes, il s'imagine en bienfaiteur essayant d'améliorer l'évolution des espèces. Ainsi, pendant vingt ans, il s'est devoué «à l'étude de la plastification des formes vivantes » (159). Rejetant toute pensée que la limite entre la nature et les espèces sont fixes, il cherche à « conquérir » la nature (167), à la plier à sa propre volonté, à devenir semblable à Dieu dans sa puissance à créer des espèces, tout en admettant « qu'il ne s'est jamais préoccupé de l'éthique des choses » (163).

    Dans une sinistre anticipation à la xénotransplantation et à l'ingénieurie génétique, Wells, parlant à travers Moreau, imagine qu'il « est possible de transplanter des tissus d'une partie d'un animal à une autre ou bien d'un animal à l'autre, d'altérer ses réactions chimiques et ses méthodes de croissance, de modifier l'articulation de ses membres et en réalité de changer jusqu'à sa structure la plus intime » (160). Et pourtant ! chaque fois que les chimères de Moreau semble converger vers le « triomphe de la vivisection » (158), ils se transforment en animalité. Malgré le donditionnement de Moreau qu'il croit capable de rendre impossible à ses propres chimères de le désobéir, les êtres hybrides enfreignent régulièrement les lois et avec le temps, se rebelèrent et finirent par le -- le déchaînement du peuple animal totalement hors contrôle. A la fin du film de John Frankenheimer's 1996 qui est une version du récit de Wells, l'empathique Prendrick, avant de partir, dit aux sous-humains qu'il reviendra avec les meilleurs de la médecine occidentale pour les aider mais une victime transgénique de cette même science implore : « Plus jamais de scientifiques, plus jamais de laboratoires, plus jamais de recherche ... Nous devons rester e que nous sommes. »

    Comme dans « L'Homme Invisible », « L'Île du Dr. Moreau » cristallise l'antipathie de Wells envers l'arrogance scientifique et ses manques de conscience sociale. Comme Shelley et Wells ont anticipé, la science et la technologie peuvent réellement produire des monstruosités. Peut être que l'image la plus fragrante dans l'histoire scientifique est celle qui montre une oreille humaine en train de croître sur le dos d'une souri, signalant ainsi les nouvelles découvertes du pouvoir de la transposition génétique. Les diformités sont typiques chez les animaux clônés ou génétiquement modifiés comme la population de la « Cinquième Discontinuité » digne de l'île du Dr. Moreau. En s'adonnant à une utilisation, en évidence contraire à l'éthique, de la technologie comme par exemple le fait de produire génétiquement des animaux pour obtenir un poids maximal et ainsi faire du profit sur le marché de la viande, une équipe du Maryland a créé l'infame « Porc de Beltway, Beltway pig » qui fut afflecté par l'arthrite, des diformités et des maladies respiratoires. Des vaches modifiées en utilisant des hormones de croissance de bovins (rBGH) souffrent de mastite et de diverses anomalies. De super souris géantes sont afflectées de tumeurs, souffrent d'organes internes endomagés et de longévité réduite, et plusieurs animaux nés du clônage ont des organes internes manquants tel que le coeur ou bien les reins. De même, les expériences génétiques sur les saumons et autres poissons ont produit des aberrations et des déformations, certains allant jusqu'à atteindre dix fois le poids normal de leur corps (voir Fox 1999).

    De façon horrible, les scientifiques ont créé des ambryons de souris et de grenouilles sans tête, se passant ainsi de cet organe désormais superflu pour se concentrer uniquement dans la moisson d'organes, une practique que l'on peut facilement appliquer sur des embryons humains pour produire des sacs d'organes de donneurs génétiques. En 1998, un scientifique de l'Université du Minnesota, Jose Cibelli avait annoncé qu'il avait fait une expérimentation secrète dans laquelle il clôna (puis détruisit) un embyron humain embryo en mélangeant son propre ADN dans les cellules d'oeufs d'une vache.

    Selon Jeremy Rifkin, « Ceci représente le seul développement extraordinaire dans l'histoire de la biotechnologie car cela suggère que nous pouvons créer une nouvelle espèce homme-animal » à la manière du Dr. Moreau . En réalité, Rifkin et son acolyte Ted Howard ont tenté d'obtenir une patente pour la première chimère de l'humain fabriqué, afin d'en avoir l'exclusivité et ainsi empêcher tout autre scientifique ou corporation à en produire.

    Mais leur combat ne fait que commencer car une myriade de chimères est en train de pousser de partout. Faisant suite à une expérience précedente à l'Université de Hawaii qui mélangea les gênes d'une méduse avec le sperme d'une souri, par exemple, les chercheurs de l'Université de l'Orégon annoncèrent en décembre 1999 qu'ils avaient réussi à insérer les gênes d'une méduse dans des embyrons de singe afin de créer des modèles transgéniques permettant d'étudier la fertilité et les maladies humaines. Les scientifiques transférèrent sept embryons transgéniques dans l'utérus de singes rhesus et obtinrent un succès dont le produit fut la naissance de George. Même si l'expérimentation peut aider à une compréhension scientifique plus approndie, elle trace aussi la route pour les concepteurs de bébés et d'une société eugénique, comme elle véhicule aussi l'avancée de la connaissance afin de pouvoir ajouter des gênes aux embryons humains et ainsi créer des formes de vie désirées5. Contrairement au Dolly conçu de manière plus conservative, le mouton Polly est à la fois clôné et génétiquement modifié, et donc transformé pour avoir un gêne humain dans son code biologique afin de produire une protéine de sang humain. A côté des moutons, des porcs, des vaches, des poissons et des souris il y a maintenant des animaux qui portent des gênes humains, comme les humains aussi se préparent à recevoir des gênes d'animaux dans leurs corps. Dans l'âge d'une hybridation radicale , toute information génétique est enregistrable et transposable, nous faisant ainsi d'emblée passer dans la réalité de la Cinquième Discontinuité.


      Notes

    1. Notre étude de Wells est extraite du livre L'aventure postmoderne (The Postmodern Adventure. Science Technologie, et Etudes culturelles au troisième millénaire (2001).

    2. Nous avons appris le concept de « Cerveau mondial » de Wells à travers Robins et Webster (1999: 126-127) qui, à leur tour citent Muddiman 1998. Robins et Webster font l'équation de la vision de Wells avec la Panoption de Bentham et un « Taylorisme généralisé » et l'écarte comme « une proposition utopique perverse », « une utopie de planification, d'administration et de gestion technocratique » qui, entre autres, conduisit à la colonisation et à la depletion de la sphère publique (1999: 127). Nous le voyons, par contraste, comme une incroyable anticipation du potentiel de la Toile, comprenez Internet, pour rendre accessible la connaissance et l'information pour tous les peuples de la terre, en les mettant à leur portée. Cela peut aussi revigorer une sphère publique en sévère décadence en fournissant des informations et de nouveaux moyens de communication et le débat publique (voir point 5 ci-dessous). Robins et Webster ne se sont pas apesantis sur les tensions entre la pensée plus scientifique et technocratique dans les oeuvres non-fictives de Wells, les interrogations critiques profondes et prophétiques de la science et de la technologie, et leurs effets potentiellement catastrophiques dans ses fictions. Pour cette raison, de notre point de vue, Wells émerge comme un critique prescient des dangers de la science et de la technogie et un prophéte de la grande transformation qui, pour le meilleur ou le pire, elles engendreraient.

    3. Il y a, bien sûr, plusieurs écrivains de science fiction qui décrivent de nouvelles espèces, comme des metamorphoses à la fin de 2001, La fin de l'enfance d'Arthur C. Clarke Dune de Frank Herbert, Patternistes et Xénogenèse d'Octavia Butler, et, comme nous le noterons ci-dessous, les oeuvres de Rudy Rucker et d'autres écrivains cyberpunk. Toutefois, Wells est le premier à projeter des projets d'images consistantes de nouvelles espèces supérieures qui délocalise la centralité des êtres humains et introduisant ainsi ce que nous appelons la « fifth discontinuité ».

    4. Voir Foxnews sur la science.

    5. Les implications troublantes de ce scénario, étaient la péoccupation centrale d'Aldous Huxley, qui perpétua les spéculations de Wells sur une société génétiquement modifiée et la création de nouvelles espèces. En réalité sur l'unique base de qualitications triviales, de Huxley sur la trnasformation génétique, le clônage, le plaisir addictif des drogues (soma), les méga spectacles, et une intense transformation sociale sont déjà là. Huxley pensait que le clônage et la modification génétique n'interviendraient que des siècles plus tard mais commencèrent plutôt que prévu, c'est-à-dire seulement quelques décenies après sa publication. Le Technocapitalisme ne peut pas encore biologiquement clônee des êtres humains, mais il peut les clôner de manière beaucoup plus efficace -- socialement parlant. Là où les clônes biologiques pourraient avoir leur esprit propre, puisque le monde social et les expériences ayant conditionné l'« original raquo; ne pouvaient pas être reproduits clôner une personne selon un modèle i idéologique et fonctionnel donné est plus enclin au contrôle. C'est pourquoi l'oeuvre séquelle de Huxley, se focalise sur divers modes de conditionnement social et du contrôle des esprits.


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UN RAPIDE EXEMPLE POUR LE DICtiONNAIRE

Njamala Njogoy