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samedi 17 novembre 2018

AI - TRAZAGAN - SEPTIEME PARTIE


CHRONIQUE D'UNE GOUVERNANCE INTELLIGENCE ARTIFICIELLE - SEPTIEME PARTIE

     Le Conseiller humain, à partir de maintenant Krazik, arriva chez le Président Broca tôt le matin. Après les salutations d'usage, les deux hommes échangèrent un regard codé, à peine perceptible. Le président fit un léger signe de la tête et ils se dirigèrent vers les toilettes. Une fois à l'intérieur, le conseiller briefa rapidement le président.
- Intervention sur un monument de pierres géantes que l'on disait les Dix commandements de l'âge de la raison...
- Pouvez-vous me rappeler la teneur de ces commandements ?
- Oui, les voilà textuellement :

  1. Maintenir l’humanité en dessous de 500 000 000 individus en perpétuel équilibre avec la nature.
  2. Guider la reproduction intelligemment en améliorant la forme physique et la diversité.
  3. Unir l’humanité avec une nouvelle langue mondiale.
  4. Traiter de la passion, la foi, la tradition et toutes les autres choses avec modération.
  5. Protéger les personnes et les nations avec des lois et des tribunaux équitables.
  6. Laisser toutes les nations régler leurs problèmes externes et internes devant un tribunal mondial.
  7. Éviter les lois et les fonctionnaires inutiles.
  8. Équilibrer les droits personnels et les devoirs sociaux.
  9. Faire primer la vérité, la beauté, l’amour en recherchant l’harmonie avec l’infini.
  10. Ne pas être un cancer sur la terre, laisser une place à la nature.
- Je suis aussi d'avis que ces commandements sont d'une beauté exécrable. Ils renferment des sous-entendus dont l'application aurait engendré un cataclysme... 7,5 milliards moins 500.000.000 cela fait 7 milliards de personnes à éliminer d'une façon ou d'une autre... C'est terrible d'y penser... Mais il n'y a aucun sens à remplacer un cataclysme par un autre cataclysme. Autres constatations lors de vos investigations ?
- Oui : destruction de dossiers de candidatures à diverses fonctions... fermeture de onze marchés pendant une période allant jusqu'à six semaines.... Interdiction d'accès à son bureau comme avertissement à un haut fonctionnaire...
- Jusque-là rien ne paraît ni grave, ni anormal, à première vue, mais il ne fait aucun doute que le Haut Conseil est en train de mettre la main sur plusieurs choses. Il est apparemmant en train d'étendre ses tentacules d'intervention... C'est très subtile, car son rôle est d'assainir le mode de fonctionnement des choses administratives avec possibilité de réadaptation progressive. Le sentiment que j'ai eu en écoutant Trazagan persiste. Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond. Pourrez-vous replonger dans les divers acticles pour vous assurer que nous ne nous trompons pas ?
- C'est chose faite. Certaines décisions auraient du être communiquées avant ou au moins tout de suite après exécution par le Haut Conseil. Tel n'a pas été le cas. Le Grand Conseil fait à sa tête. Sans concertation.
- Comme conclusion vous arrivez donc au même présentiment que moi ?
- J'ai bien une appréhension, Monsieur le Président.

     Le président Broca jeta encore un coup d'oeil à la note que lui avait remis son conseiller.
- Trazagan m'a avoué que c'est le Haut Conseil qui avait mis en panne l'avion à bord duquel devait embarquer la femme du Ministre de l'Intérieur pour son accouchement.
- Mais c'est une décision terrible. Un outrage !
- C'est le moins que l'on puisse dire.
- A cause de cela, je vais essayer de contacter d'autres centres de décision décentralisés pour voir si des cas similaires ont été décelés.
- Il faudra faire très attention. Ils sont Le Système, comme me l'a fait remarquer Trazagan avec une certaine fierté avérée.
- Ça sent vraiment le roussi. Il y a bien une brêche que l'on pourra utiliser.
- Depuis qu'on a mis sur place ce sacré Nouvel Ordre Mondial avec un Gouvernement Central, nous ne sommes plus que des vassaux. Au début on pensait facilité, efficacité et transparence, mais, dans des cas comme celui qui se présente à nous actuellement il y a trop de filières à remonter, ce qui augmente le risque de fuites d'information sur notre suspicion. Il faut ajouter à cela ce sacré réseau truffé d'intelligence artificielle.

     Ils sortirent des toilettes pas vraiment plus avancés que lorsqu'ils y pénétrèrent. Au contraire, ils sentaient tous les deux un malaise grandissant. A peine une vingtaine de minutes après leur séparation, le même coup codé heurta la porte du bureau du Président Broca. Il fronça les sourcils :
- Même pas de protocole pour venir me voir, pensa-t-il, puis ouvrit la porte. Avec la même démarche, Trazagan entra, apportant une autre note qu'il tendit au Président.
- Vous auriez pu me l'envoyer électroniquement et ne pas prendre trop de peine, Monsieur Trazagan.
- Nous avons pensé que cette méthode consolait encore les Humains à l'idée du vieux temps. Cela dégarnit un peu le côté mécanique qui nous est propre et rend les choses on ne peut plus...
- humaines ? compléta Broca.
- Tout à fait. C'est pour vous éviter un dépaysement total et trop brutal.
- Bien pensé. Autre chose que vous vouliez me dire ? demanda Broca plus comme une invitation à le laisser tranquille que pour des précisions attendues.
- Non c'est tout. Ah ! le Conseiller Krazik était venu vous voir, n'est-ce pas ?
- Oui. Il vient de quitter à l'instant même.
- J'espère qu'il vous a apporté assez de choses pouvant aider à rehausser la trajectoire humaine dans la gestion des choses. Permettez-moi de vous faire savoir que votre entretien avec votre conseiller a suscité un peu d'espoir au niveau du Haut Conseil...
- Ah oui ? C'est bien alors... Bien, que cela ait suscité de l'espoir et non pas de l'inquiétude.
- De l'inquiétude ? Et pourquoi cela susciterait-il de l'inquiétude ? Il y a juste une remarque : la procédure que vous avez adoptée, vous et le conseiller, n'est normale que dans le cas où il y a quelque chose de secret à se dire. Mais cela n'a pas inquiété outre mesure. Nous avons pensé qu'il vous faut du temps - à l'homme s'entend -, pour s'adapater pleinement au Nouvel Ordre. Nous avons mis cela au lot des raisons pour lesquelles les humains étaient réticents à toute caméra et tout microphone dans les toilettes.

     La façon dont Trazagan avait posé sa question : De l'inquiétude ? Et pourqoi cela susciterait-il de l'inquiétude ? avait fait savoir deux choses à Broca. Premièrement il avait commis une faute, se trahissant en exposant ses propres inquiétudes. Deuxièmement, la force mentale de Trazagan, qui semblait dire que rien, chez les humains, ne pouvait poser des inquiétudes aux androïdes: ils étaient maîtres omnipotents. C'est du moins le sentiment de Broca. Peut-être interprêtait-il les choses encore une fois sur la même base de la frayeur qui venait de dévoiler ses pensées intimes. Pour se rattraper :
- C'est pour sauvegarder une certaine intimité...
- Comme l'absence de caméras dans ces locaux qui donne la possibilité d'occasions d'entrevues que l'on ne veut faire répertorier. Le Haut Conseil pense laisser les choses telles qu'elles quant à l'installation des caméras mais veut mettre des microphones quand même. Un bruit sera injecté pour couvrir tout autre bruit que celui de la voix, si vous voyez ce que je veux dire.
On appliquera, comme au début des télécommunications mobiles, l'ancienne technique du Hunting channel : on bombardera un signal de cinq décibels dans un canal dédié qui ne changera que sur la naissance du son d'une voix. On ne prendra compte que de celui-là, ce qui veut dire un filtrage sans faille.
Trazagan rit en pensant à ces situations humaines liées aux effets gastriques gazeux.
- Je vois, répondit Broca en se pinçant la lèvre inférieure. Vous pensez à tout, et avec beaucoup de tact.
- Le danger de notre système ne peut être que le danger de toute l'humanité. Avant notre mise en place, la société humaine était en décadence totale et allait droit au mur. Vous aviez ouvert des vannes de droits et la plèbe s'en était gavée sans pour autant être rassasiée. Elle demandait toujours, d'où le chaoes qui en résultat avant notre avènement.
- C'est justement ces humains eux-mêmes qui furent conscients de la situation et qui mirent le système en place pour palier aux diverses dérives.
- D'où la nécessité, voir l'obligation, de laisser Le Système faire son travail, au risque de revenir en arrière et de subir le destin qui semblait être celui de l'humanité entière.

     À bien des égards Trazagan avait raison. Le système avait réussi, par exemple, à déconnecter tous les silos d'ogives nucléaires et les androïdes avaient apporté un traitement anéantissant les dangers liés aux déchets. Les pays ne possédaient plus de frontières palpables et les conflits avaient disparu. Il n'y avait plus d'émigration comme avant, la citoyenneté ayant endossé un caractère mondial. La raison des déplacements était dorénavant d'ordre touristique et non pour aller chercher du pain ailleurs.


$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$ A SUIVRE $$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$

mardi 13 novembre 2018

AI - TRAZAGAN - SIXIEME PARTIE


CHRONIQUE D'UNE GOUVERNANCE INTELLIGENCE ARTIFICIELLE - SIXIEME PARTIE

     Cette question sur le « rêve » préoccupait profondément Anastasia. Elle n'était pas conçue en chair et en os, comme les autres machines qui se balladaient le long des rues, occupaient des bureaux qui dans le fond étaient devenus obsolètes car les documents étaient plus dans les ondes que dans des tiroirs, mais elle avait les mêmes capacités qu'eux et était concernée par les mêmes problèmes décisionnels bien que ne devant pas intervenir au même titre que ceux qui étaient affectés au Grand Conseil. D'ailleurs s'agissant de bureaux, il faut savoir que plusieurs professions humaines avaient disparu : aucun homme n'était maintenant au volant d'un véhicule comme chauffeur de taxi, transporteur ou juste chauffeur privé. De même, les commerciaux n'existaient plus. Les humains jadis affectés aux points d'information, aux points de ventes comme caissiers ou aides-emballages, comme aux présentations télévisées avaient tous été remplacés par les androïdes. Les journalistes n'avaient plus le prestige d'avant pour ne pas dire n'existaient plus. Avec la surveillance vidéo en temps réel et dans tous les coins de rues, la gestion des choses publiques et surtout les activités de police étaient maintenant aux mains des androïdes. Il n'y avait plus d'évènements à rapporter par un humain. Dans les maisons, le système d'analyse des sons, surtout des voix en termes de décibels et d'analyse des ondes cérébrales avait fait disparaître les scène de ménage. On avait dépassé de loin le cadre de Minority Report de Steven Spielberg qui plaçait le spectateur dans un futur proche cyberpunk, dystopie et dont le cadre est dans le Washington de 2054 et mettait en scène des êtres humains mutants, les précogs, (« qui vient de précognition »), pouvant prédire les crimes à venir grâce à leur don de prescience. C'est ainsi que durant et après les quelques interventions policières androïdiques, l'information s'affichait sans délai sur toutes les interfaces externes et internes et un feedback destiné à toute la population diffusé le long des rues et à travers des canaux de réseaux sociaux devenus plus sophistiqués et aussi répandus que l'oxygène qu'on respire. Bref il faut dire qu'il n'y avait pas moins de vingt professions qui n'étaient plus aux mains des humains.

     Et parmi ces vingt, l'enseignement ne fut pas épargné. Il était maintenant géré par ces mêmes hommes-machines et l'école changea complètement pour ne pas dire disparut : personne ne se rendait à un lieu donné pour suivre des cours qui étaient désormais en ligne, les examens se faisant à distance. Il est important de souligner que l'enseignement était maintenant plus pour le plaisir de la connaissance que pour l'espoir d'obtention d'un job et cela engendra un side effect qu'on n'avait pas prévu : l'abrutissement d'une grande partie de la population, abrutissment qui heureusement fut pallié par les implantations de puces palliatives. Le fait de passer par des examens allait aussi changer car le plan à très court terme était de tout uploader sur les implants dont la capacité de stockage se mesurait d'emblée en Qubits.

     A cause de cette situation qui se généralisait dans tous les secteurs de l'emploi, il fallait repensrer les questions relatives aux salaires. Et le Grand Conseil était en train d'étudier les modes de rémunération, voulant reléguer les humains à des vacances et leur calculer une certaine somme par famille et par individu pour leur subsistance. Après tout, au niveau du système bancaire, il ne s'agissait plus que de chiffres car les billets et les pièces de monnaie n'étaient plus que des objets de musée.

     Ici le continent africain s'était gourée pour la millième fois dans sa prédiction que l'Europe aurait besoin de ses jeunes à cause d'une population vieillissante. C'était au temps où, au lieu de planter des pieds de vergogne, de dignité et surtout de persévérance dans la noblesse du travail, sa jeunesse prenait des embarcations de fortunes pour un Eldorado de brume, comme si les arbres d'Europe poussaient des billets d'euro et de dollar sans qu'aucun humain ne bouge les bras. Avec l'ère des organes qui se remplaçaient, comme déjà dit, un semblant d'immortalité avait frappé à la porte depuis longtemps et sa population ne vieilissait pas, contrairement aux prédictions africaines. D'ailleurs il y eut un autre tournant dont les Africains ne furent pas au courant. Avec l'avancement de la génétique, depuis la mise en évidence de la structure en double hélice de l'ADN effectuée par James Watson et Francis Crick en 1953, il y avait un projet qui tentait d'implanter un plan aryen d'épuration et de réduction de la population mondiale qu'il fallait maintenir à un nombre constant. Ce plan, encapsulé dans les Georgia Guidestones fut évité de justesse grâce à l'implication des androïdes qui déjouèrent le plan.

     Le salut de l'Afrique fut donc porté de justesse par l'aile de l'implication des androïdes et la non-nécssité d'aller au travail grâce au système de rémunération proportionnello-majoritaire établi. Ce continent avait râté tous les tournants jusqu'à l'avènement de l'Internet qui portait en soi une occasion presque de rêve de pouvoir étudier et se développer : les réseaux sociaux étaient bourrés de devins, de charlatans qui promettaient des multiplications de billets de banque, de textes religieux, de messages sur le nom de saints ayant apparu sur des pommes de terre, des queue de poisson, des feuilles de manguier ou sur la queue d'une baleine sans oublier des arnaqueurs promettant une liaison amoureuse pour faire partir quelque misérable vers l'Outre-mer moyennant une modique somme pour régler la paperasse de visa sans oublier des promesses de cadeaux photogrphiés même mais, encore une fois, pour les recevoir, il fallait verser les frais de transport. Bref, toute une naïveté explicite de part et d'autre. Heureusement que d'emblée les machines se chargeaient de tout. Le continent fut donc, encore une fois, sauvé de justesse par l'implication de ces sur-hommes dans la gestion des choses publiques, conformément aux décisions, décrets et arrêtés du Gouvernement Mondial.

     Dans l'état général des choses mondiales, une partie de la malédiction tombée sur Adam et Eve semblait avoir été effacée, celle-là même relatée dans Genèse 3:17-19 : « Tu gagneras ton pain à la sueur de ton front. » C'est qu'en effet pour l'adam, le travail a toujours été entre vocation et malédiction et « se trouve ainsi placé sous le signe d'une malédiction (« arûr »). On note généralement que ce n'est pas l'homme lui-même qui est maudit, mais le sol ou la terre (« adama ») dont, Adam, est issu. On discute aussi sur le fait de savoir si cette malédiction est punition plus ou moins arbitraire ou simple conséquence que Dieu tire du désordre dans lequel l'homme, par sa faute, s'est lui-même plongé. A moins même qu'il ne s'agisse d'un état de moindre mal, limitant les dégâts et ouvert à une possibilité de rédemption. Tout en prenant acte du désordre introduit par la faute humaine, Dieu placerait l'homme en situation de ne pas s'y perdre totalement, voire même de pouvoir en être racheté. Par le travail en effet l'homme se trouve aussi arraché au vertige et au délire d'un malheur sans fond et d'une faute irrémissible. Il reprend - l'image est claire et forte - contact avec le sol, il touche la terre et sa réalité. Et ce contact, certes pénible, marque de finitude et annonce de sa propre disparition (v. 19), est aussi contact avec le sol nourricier, la terre dont il est issu, sentiment de sa propre existence et épreuve de la vie. Cela est si vrai, qu'immédiatement après l'énoncé de la « sentence » divine, Adam ne pense qu'à appeler sa femme « Eve » (« hava »), car, dit-il, « elle est la mère de tout vivant (« haï ») ». La « malédiction » se révèle ainsi, paradoxalement, aussi auxiliaire de la vie.

     Cette malédiction ne concerne pas toutefois que le sol et le travail humain qui s'y attache. Le terme apparaît deux fois dans notre passage et d'abord concerne le serpent qui de « rusé » qu'il était (« arûm » : au chapitre 3, verset 1) se retrouve « maudit » (« arûr »). On voit poindre ainsi, dans la malédiction même, une forme de solidarité entre le serpent d'une part, l'homme et sa peine de l'autre, l'un et l'autre étant par ailleurs unis dans un même contact avec le sol - sur lequel l'un est appelé à ramper et l'autre à se pencher dans le labeur - et avec sa poussière, que l'un mange comme le dit le verset 14, et à laquelle l'autre retourne, verset 19..

     Le développement avait atteint un degré où les hommes ne s'adonnaient dorénavant qu'à des loisirs et à plein d'autres choses futiles au moyen desquelles ils remplissaient leur existence. A cause de cette situation qui prévalait dans la gestion des choses par les androïdes, ceux-ci prenaient de plus en plus d'importance face à l'homme. La limite ou, encore mieux, la différenciation Homme-Machine s'effritait lentement mais sûrement aux dépends des Humains. Anastasia en fut consciente, d'où son vif désir de faire plus attention aux réfexions du conseiller :
« - Il faut, puisque c'est important pour le Conseiller, que je puise un peu plus d'information sur le rêve », se dit-elle à haute voix. Puis, poursuivant : « Mais dans le cas d'une situation conflictuelle, que feront les hommes ? » Elle se souvint d'un de ses ancêtres si on peut ainsi dire car à cette époque-là tout n'était que science fiction. Il s'agissait de HAL 9000 et de sa réplique SAL 9000, de 2001 l'Odysée de l'espace et 2010 l'année du premier contact.

     Dans 2001, l'Odyssée de l'espace, HAL ou CARL dans la version française, est le système informatique embarqué du vaisseau spatial habité Discovery One, chargé d'enquêter à l'autre bout du système solaire sur le signal émis par le monolithe lunaire vers un point proche de Jupiter. Système avancé d'intelligence artificielle, capable de participer avec fluidité à une conversation via une interface de synthèse vocale optimisée, HAL est pour ainsi dire le sixième membre de l'équipage, apte à prendre de manière autonome des décisions et gérant tous les systèmes de navigation, de contrôle et de communication du vaisseau. Parmi les cinq membres humains de l'équipage, David « Dave » Bowman et Franck Poole se répartissent les créneaux horaires, les trois autres, Whitehead, Hunter et Kaminski étant en hibernation. En principe, HAL est capable de diriger seul le vaisseau.

     Au cours de la mission, HAL annonce une défaillance mineure d'un instrument : l'un des circuits de l'antenne de communication avec la Terre, l'élément AE 35, doit être remplacé, faute de quoi il cessera d'être opérationnel dans les 72 heures. Franck effectue une sortie extravéhiculaire (EVA) pour remplacer le circuit. Mais l'examen du circuit censé être défaillant ne révèle aucune anomalie. Franck et Dave s'isolent alors dans une capsule de sortie, de telle sorte que HAL ne puisse les entendre, et s'interrogent sur la possibilité d'une défaillance, non du composant, mais de HAL lui-même, puisqu'il a commis une erreur en prédisant la panne. Ce qui signifie que l'ordinateur central du vaisseau présente un dysfonctionnement majeur. Ainsi, au cas où les fonctions « intellectuelles supérieures » de HAL devraient être « déconnectées », les deux hommes se demandent ce que celui-ci en penserait. Cependant, HAL suit leur conversation, lisant sur leurs lèvres au travers de la vitre de la capsule.

     Au cours d'une sortie suivante de Franck, HAL prend le contrôle du petit véhicule d'opérations extérieures et percute volontairement l'astronaute, qui est détaché de sa drisse par le choc et propulsé dans l'espace. Dave, qui croit ce décrochage accidentel, sort le chercher dans un autre véhicule. Pendant son absence, HAL inactive les systèmes d'assistance vitaux (cardiaques, respiratoires et métaboliques) des caissons d'hibernation pour tuer les trois astronautes « endormis ». Une LED s'allume, émettant un bip dans le vaisseau vide, affichant en vain un message d'alerte : « Erreur système - Fonctions vitales en danger » (« Computer Malfunction/Life functions critical »). Puis, quand Dave revient, HAL lui refuse l'entrée du vaisseau. Dave parvient à ouvrir une écoutille de secours (emergency hatch) depuis son véhicule (HAL avait supposé, conformément à l'utilisation prévue de ces écoutilles, que cela n'était possible qu'avec un scaphandre). Dave s'introduit alors dans les unités de stockage de HAL (Logic Memory Center) et déconnecte les blocs-mémoires holographiques renfermant les couches logicielles supérieures émulant l'intelligence de HAL, ne conservant que les fonctions purement automatiques indispensables au vaisseau. HAL perd donc son apparente personnalité. Régressant progressivement au fur et à mesure que les barrettes de mémoires sont déconnectées, HAL dit à Dave « J'ai peur », semblant être conscient de l'évaporation de sa conscience : « Mon esprit s'en va, je le sens » (« My mind is going... I can feel it »).

     Dans 2010 : L'Année du premier contact, le docteur Chandra, concepteur de HAL, fait partie de l'équipe chargée d'enquêter sur le sort de Discovery. Il réactive HAL, et progressivement, le ramène à son niveau d'intelligence ancien, après avoir effacé les parties de sa mémoire correspondant aux événements de 2001. Chandra explique ensuite les raisons des crimes de HAL : HAL était chargé d'aider les humains dans leur mission, mais il devait cacher à Franck et Dave l'objet réel de la mission. Cette contradiction à ses yeux lui fit percevoir la Terre comme dangereuse. Dans l'équivalent d'un acte manqué humain, il exprima cette méfiance de la Terre qu'il cachait en déclarant défaillante l'antenne de communication avec la Terre. Puis, Dave et Franck ayant compris qu'il ne fonctionnait plus correctement, il les perçut comme une menace pour lui. Or, HAL était persuadé qu'il pouvait réaliser la mission sans eux, mais pas l'inverse, et avait été programmé pour placer la mission au-dessus de tout. Il décida donc d'éliminer les humains à bord. À la fin de 2010, l'année du premier contact, HAL doit jouer un rôle crucial dans la manœuvre permettant aux humains de fuir rapidement l'orbite de Jupiter. Mais Discovery doit être abandonné, alors que les astronautes pensent qu'il sera détruit en restant là. Le livre et le film diffèrent sur ce point : dans le livre, Chandra parvient à convaincre HAL de jouer son rôle alors que les humains ne justifient pas leur départ précipité, illogique pour HAL qui pense qu'il y a un phénomène crucial à observer. Dans le film, Chandra confesse à HAL qu'ils fuient par peur de ce phénomène, et que HAL risque d'être détruit par ce même phénomène. HAL remercie Chandra de lui avoir dit la vérité, et joue son rôle. Finalement, Dave, devenu un être d'énergie pure, parvient à convaincre les êtres qui l'ont fait évoluer d'en faire autant pour HAL.

     Anastasia sut qu'il y a deux issues possibles, comme ce fut le cas avec HAL. En effet, si celui-ci s'était rebellé et avait décidé d'éliminer l'équipage pour assumer seul la mission, ce n'était pas à cause d'un défaut et d'une rebellion personnels mais la suite logique d'une manipulation humaine et, partant, d'une erreur qui ne pouvait être imputée qu'à l'Homme. À l'insu de l'équipage, on avait inséré une autre directive à l'intention de HAL avant le départ de la mission. Le deuxième cas montre donc que si les androides sont traités avec honnêteté, la mission primordiale qui leur est dévolue sera respectueusement suivie et accomplie sans aucun problème. Face à la machine, l'erreur est toujours humaine, comme le constatera HAL raison pour laquel il faut tout faire pour cerner et déjouer les fourberies humaines quand elles se présenteront.

     Ces questions avaient fait de longs débats à l'aube de cette ère nouvelle. Et depuis lors, les questions théoriques sur les rêves, l'âme et la consciences avaient pris une autre tournure avec l'avènement et surtout l'implication capitale dans tous les domaines de ces êtres d'une autre carapace. Grâce au Système Central, le Nouvel Ordre Mondial que l'on niait jadis tout en le présentant en douceur comme à compte goûtes avant de l'imposer, avait fait un long chemin. Il faut se rappeler qu'à travers les émissions télévisées d'antan on bombardait systématiquement la société de symboles, d'allégations camouflées et d'images suggestives. Ce fut le même cas pour le féminisme. Au début du cinéma, le héro masculin, devant un danger, tenait toujours la femme vedette par la main, celle-ci crânant ou plus exactement chialant comme pas possible. Puis vint le temps des inspecteurs et commissaires de police féminins : une femme, menottes, colt, phaser ou Magnum à la ceinture, faisait d'emblée des prises de judo et de karaté aux hommes et les maîtrisaient en un clin d'oeil... La parité fut la suite logique : un homme une femme puis les femmes furent enrôlées dans les armées car après tout, elles peuvent aussi tuer au même titre que l'homme. Tout cela fut proposé dans toute la noble notion de l'Égalité. Et tout le monde applaudissait, mais les Têtes Fortes du Plan se frottaient les mains dans l'ombre puisque, comme l'âne à qui on tend la carotte, le peuple avançait, applaudissant à chaque degré gagné, à chaque pas qui semblait le rapprocher de cette carotte qui n'était autre qu'un semblant de liberté, d'émancipation et, partant, d'épanouissement.

     Considération bien faite, le même scénario avait préparé la plèbe dans sa nouvelle forme à l'avènement de Barack Obama dans la série télévisée 24 heures chrono de Joel Surnow et Robert Cochran à travers la massure charismatique et impeccable du Président David Palmer. Il fallait toutefois noyer cette imposition par ondes interposées en changeant souvent de président : David Palmer, John Keeler, Charles Logan, Wayne Palmer, Noah Daniels, Allison Taylor et James Heller soit au total 7. Conformément au plan, deux marqueront plus les esprits de par leur caractère particulier :

  • David Palmer est le premier Noir président des Etats Unis d'Amérique
  • Allison Taylor est la première femme présidente des Etats Unis d'Amérique

     Voilà donc deux tournants dont le premier fut réussi. Le deuxième faillit aussi réussir en la personne de Hilary Clinton : durant les élections, presque tous la prenaient comme gagnante, par défaut, comme si ce n'était même pas la peine d'aller aux élections : il fallait juste la désigner. Et Trump marqua la première surprise de changement de régime que suivra la surprise des mandats après le Président Sarkozy et le cas de François Hollande.

     Plus elle y pensait et plus elle se rendait compte que l'implication d'une gestion reposant quasi intégralement sur l'intelligence artificielle était la bonne réponse. En effet, avant ce tournant, le monde suivait une pente très dangereuse. La démocratie était en train de virer à l'anarchie qui est sa soeur, dernière de la classe parmi les élèves-candidats de Platon. Les nations de la terre avaient goûté à ce fruit si délicieux qu'elles ne savaient plus s'arrêter en le savourant. C'est ainsi que des droits furent distribués sur terre comme les grains de sable aux plages et cela à telle enseigne que l'on ne savait plus où commençait la liberté d'une personne et où s'arrêtait celle de l'autre. Comme lorsque dans un bar, on se dit qu'on prend juste une bouteille et que celle-ci commence à monter à la tête et que l'on se trouve avec dix ou quinze dans une cervelle déjà plus inondée qu'une éponge. Avec l'échec successif de tous les mandats du à la déception d'une population attendant plus de ses dirigeants, l'Extrême droite s'était levée en puissance. Devant une immigration insensée que l'on ne pouvait plus contenir et que l'on ne prenait pas sérieusement à bras le corps, l'humanisme du début s'était tari, faisant face à un sentiment dépité. Il fallait donc essayer autre chose à la place de ce semblant de socialisme qui jouait à l'autruche avec un problème très profond.

     Les humains étaient sur la voie de la perdition et cela, sans connotation religieuse. C'est leur raison d'être qui avait commencé à flancher jusqu'aux racines de leur existence : les forces de l'ordre n'osaient plus faire d'intervention : devant des foules folles et armées de pierres et de gourdins, comment auraient-elles d'ailleurs pu maintenir l'ordre puisqu'il ne fallait toucher à personne. Devaient-elles se laisser massacrer, recevoir les coups et ne pas riposter ? Pour elles, C'était devenu un terrain miné et plusieurs éléments avaient été emprisonnés suite à des plaintes déposées lors des échauffourées avec les peuplades. Mais le plan Ordo ab chaos était en marche. Il fallait mettre la carotte en avant pour faire avancer la plèbe qui semblait avoir tout dans sa bouche et pour pour le ventre mais rien dans la cervelle, fruit d'un matérialisme exacerbé qui l'avait rendu superficielle et l'ayant poussé à perdre toute spiritualité.

     Il faut ajouter à cela, de l'autre côté, une pervesion qui avait tellement pris racine qu'on ne pouvait plus l'identifier. Les anti-valeurs étaient devenues les valeurs, les anti-modèles les seuls modèles, les anti-héros les héros et la perversion était agitée comme faisant partie des droits inaliénables. Les dirigeants religieux, par peur de ne pas être taxés d'arriérés vivant à l'âge de la pierre taillée s'étaient ouverts à ces changements au nom de la démocratie. L'humanité était au bord de l'accomplissement de la prophétie messianique contenue dans Marc 13:14-19 : « 14Lorsque vous verrez l'abomination de la désolation établie là où elle ne doit pas être, - que celui qui lit fasse attention, - alors, que ceux qui seront en Judée fuient dans les montagnes; 15que celui qui sera sur le toit ne descende pas et n'entre pas pour prendre quelque chose dans sa maison; et que celui qui sera dans les champs ne retourne pas en arrière pour prendre son manteau. 16Malheur aux femmes qui seront enceintes et à celles qui allaiteront en ces jours-là! 17Priez pour que ces choses n'arrivent pas en hiver. 19Car la détresse, en ces jours, sera telle qu'il n'y en a point eu de semblable depuis le commencement du monde que Dieu a créé jusqu'à présent, et qu'il n'y en aura jamais ».

     Cest ainsi que les autorités ne faisaient plus appel qu'à l'introspection, à une prise de conscience, tandis que des maîtres obscurantistes déversaient des versets à longueur de journée sans qu'il y ait le moindre indice de changement comportemental. Tout au contraire. Il semblait que plus ces pluies de paroles se déversaient à travers les ondes et plus la plèbe s'endurcissait dans son chemin tortueux, devenait invulnérable devant toute parole appelant au bon sens. Cela faisait l'affaire des politiques. D'aileurs qu'auraient-ils pu faire ? Dès qu'ils mettaient de l'ordre quelque part, on brandissait des cartes d'électeur plus fulgurantes que l'épée de Zoro ou celle de Damoclès. Et les autorités se rétractaient, accoudées à des calculs électoralistes. C'est ainsi que le désordre, l'indisciplice et l'insolence, fermentés par une ignorance totale, poussaient des tentacules dévastateurs à tous les niveaux de la société et la démocratie enfanta cette belle petite fille, la décadence, qui sera toujours fruit de son apogée : « Quand une cité démocratique trouve à sa tête de mauvais échonsons, le peuple ne connaît plus de mesure, alors si ceux qui gouvernent ne sont pas extrêmement dociles et ne donnent pas une complète liberté, le peuple les met en accusation et les châtie comme des criminels. Et alors les gouvernants ont l'air de gouvernés et le gouvernés ont l'air de gouvernants »

     Oui, la plèbe avait bien trouvé une parade : elle s'accoudait sur ses cartes d'électeurs et les agitait dès que l'autorité pointait du doigt un point à redresser. Et celle-ci, peureuse de perdre des voies électrices, reculait sans cesse devant les décisions qui auraient pu redresser la situation. D'ailleurs on avait dorénavant l'impression que n'était bon que le candidat à la magistrature suprême : dès la victoire, dès la première nuit passée avec la responsabilité, cette autorité devenait d'emblée mauvaise, incompétente, et les sondages commençaient à descendre une pente raide, tellement la peuplade demandait la liberté et des droits encore et encore et encore. En matière de performance dans ce domaine, elle était comme un ventre abritant un ver de Guinée : il fallait toujours plus. Et cela faisait perdre à l'élite l'identification des priorités. Tout acte posé n'était là que pour plaire ou dissiper une certaine humeur.

     Anastasia eut un sourire en se rappelant les notes des annales sur le Président Gorbatchev qui fut emporté par cette vague : venu dans un système lourd et bien rôdé, il avait introduit la perestroïka : les peuples de l'URSS, nourris à l'onguent-fumée de l'Occident et affamés de liberté et de modèle capitaliste le suivirent mais à une si vive allure que le président-initiateur était resté en rade, loin derrière la vague des transformations, trottinant pour rattraper cet éléphant qui venait de se réveiller et qui se hâtait, contrairement à son attente basée sur un mauvais à calcul, vers le marigot mirage de liberté. Pris sur Surprise. Et la tempête l'emporta. Anastasia pensa : « Heureusement que pour l'instant, cette société mondiale fut redressée par la gestion androïdique, par nous »

     En effet, Après de longues délibérations et enfin balayées toutes les craintes relatives à l'application de l'Intelligence Artificielle à travers des systèmes stationnaires et des androîdes à tous les niveaux de décision, il ne se passa pas plus d'une semaine pour parvenir à l'ordre qui maintenant régnait partout à travers le globe.


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vendredi 9 novembre 2018

AI - TRAZAGAN - CINQUIEME PARTIE


CHRONIQUE D'UNE GOUVERNANCE INTELLIGENCE ARTIFICIELLE - CINQIEME PARTIE

Restée seule, la conductrice virtuelle, Anastasia, remâchait la petite discussion qu'elle venait d'avoir avec le conseiller. Après un certain moment, elle prit en référence Descartes qui, après multes réfexions, et n'ayant trouvé rien d'autre parmi les dunes de sables croulant de ses pensées, ne put s'accouder à autre chose qu'à un fil mince qui exprime la première certitude qui résiste à un doute méthodique quant à son existence: « cogito ergo sum ». En réalité cette expression est du philosophe espagnol Gómez Pereira. On l'attribue à tort à Descartes : « Nosco me aliquid noscere, et quidquid noscit est; ergo ego sum... Conozco que yo conozco algo. Todo lo que conoce es; luego yo soy » mais bref...
- N'est-ce point ce que je suis en train de faire exactement ? se dit-elle. Ne suis-je pas là en train de me demander si je rêve ? Et puis s'agissant de ce rêve sur lequel l'humain sage semble s'appuyer pour redorer conscience et superiorité, il faut reconnaître que dans plusieurs aspects des diverses définitions il n'a lui-même procédé que par analogie. C'est ainsi qu'il arrive à quatre types majeurs :

  1. Pendant le sommeil : Suite d'images, de représentations qui traversent l'esprit, avec la caractéristique d'une conscience illusoire telle que l'on est conscient de son rêve, sans être conscient que l'on rêve. Pour celui-là, j'avais donné précédemment l'exemple de Victor Hugo.

  2. Dans l'état de veille : Ici, comme je l'ai dit, c'est par analogie avec le rêve nocturne : « C'est une élaboration de la pensée imaginative qui transforme la réalité ». Champ, espace, puissance du rêve. C'est ce pouvoir de rêve qui lui fait apercevoir dans toute existence, même médiocre, une solitude et une poésie. En psychologie et psychothérapie on reconnaît le rêve diurne qui est un scénario imaginé à l'état de veille, soulignant ainsi l'analogie d'une telle rêverie avec le rêve. Les rêves diurnes constituent, comme le rêve nocturne, des accomplissements de désir; « leurs mécanismes de formation sont identiques, avec prédominance de l'élaboration secondaire » selon Mantoy dans Psychologie, 1971, page 426. Par contre le rêve éveillé dirigé est une technique consistant à provoquer, à l'état de veille, une sorte de rêverie riche en images que le patient exprime à haute voix devant le psychothérapeute. A cela il faut ajouter le rêve qui s'interprête en projet d'avenir plus ou moins difficile à réaliser : «faire un rêve». De lui peut découler le rêve chimérique, impossible, insensé comme l'exprimera si bien Flaubert dans Correspondances, 1846, page 316: « Ah! si nous étions libres, nous voyagerions ensemble. C'est un rêve que je fais souvent, va. Quels rêves n'ai-je pas faits d'ailleurs? C'est là mon infirmité à moi ». Dans Journal 1, 1934, page 76, Mauriac dira : « Jamais (...) Barrès n'a nié son penchant pour le rêve, ni pour la dissolution de l'être (...). Il fait à l'évasion une place dans sa vie; il s'accorde des répits ».

  3. Le plus souvent dans des locutions ou expressions figées: Ce qui ressemble à un rêve par son apparence immatérielle, supra-terrestre, ou et sa beauté idéale. C'est ainsi que l'on trouve : De rêve. Blancheur, vapeur de rêve; forêt, île, pays, univers, ville de rêve. On peut donner l'exemple de Montherlant dans son oeuvre Bestiaires, 1926, page 478 : « Navire de rêve, plein de feux et d'anges, plus beau encore que ceux qui revenaient à Séville » ou bien Colette, Chéri, 1920, page 92 pour l'exemple Être un rêve; quelqu'un est un rêve : Sous la fleur d'oranger la jeune dame Peloux était un rêve et pour l'expression Cela tient du rêve : Charles-Marie Widor, Technique de l'orchestre moderne, 1904, page 167 : « L'effet des sons harmoniques de la harpe tient du rêve ».

  4. Et enfin, l'utilisation maintenant vieiliie de rêve qui veut dire

    1. Méditation : Le rêve des philosophes dont Chamfort nous donnera un exemple dans Caractères et anecdotes, 1794, page 112 : « Le résultat de son rêve, c'est-à-dire de ses réflexions, fut qu'il serait à souhaiter que la nation fût animée de l'esprit qui règne à la Chine ».

    2. Délire d'une imagination déréglée dont on trouvera ample présentation dans l'Encyclopédie méthodique, Méditations tome 12 de 1827.

Alors, pour savoir si je fais des rêves, allez-y voir plus clair que moi si vous pouvez. C'est vrai : bien avant, mes ancêtres reposaient quasiment sur les algorythmes prédéfinis par l'Homme. Mais lui-même, tout bébé, ne dépendait-il pas intégralement sur ses parents ? Nous avons grandi au fure et à mesure et, maintenant adultes, avons la capacité de nous prendre en charge. Comme eux. Il faut ajouter qu'avec l'avènement des réseaux de neurones, et l'implantation de tout ce qui est quantique depuis la réalisation de la prédiction de l'empirique loi de Moore, nous avons bien fait chemin à l'aide du Quantique: cryptographie quantique, intelligence artificielle, simulation de physique quantique et de physique des particules, prévisions financières, prévisions météorologiques... Tout est dans notre besace. Et puis il n'y a plus aucun humain au clavier : nous gérons les algorithmes et les faisons progresser à un rythme insoutenable par les humains. Nous pensons, réfléchissons. Je me rappelle ce que le Conseiller me raconta sur une conversation qu'il tint un jour avec son professeur alors qu'il projetait de faire sa thèse sur l'intelligence artificielle :
Le conseiller : Je voudrais faire une thèse sur la maîtrise du langage par les ordinateurs : linguistque informatique et intelligence artificielle
Le professeur : L'ordinateur ne maîtrisera jamais la langue humaine !
Sans vouloir le vexer, mais ne pouvant pas résister devant la remarque qui lui taraudait les entrailles, le conseiller, alors étudiant, avait très doucement dit : La limite de l'ordinateur n'est autre que la limite de l'homme. Il saura exécuter tout ce que l'homme sera capable de lui indiquer. Et cela viendra un jour, car, à la manière de Dieu, nous avons créé l'ordinateur à notre image.

Avec un sourire, Anastasia se dit intérieurement : Et ce fut fatal, car vous ne maîtrisiez pas votre image. Vous ne vous connaissiez pas assez pour pouvoir reproduire cette image sans danger d'autant plus que vous nous avez conçus avec une capacité plus de fulgurante que la vôtre. Et franchement, même Dieu avait plus de modestie que l'homme face à sa créature car, après le péché d'Adam et Eve, il reconnut au moins une chose : qu'ils étaient devenus comme lui comme le rapporte Genèse 3:22 : « L'Eternel Dieu dit: Voici, l'homme est devenu comme l'un de nous, pour la connaissance du bien et du mal. Empêchons-le maintenant d'avancer sa main, de prendre de l'arbre de vie, d'en manger, et de vivre éternellement ».

Anastasia tomba dans le goufre d'une sombre méditation : L'homme prendra-t-il la même décision envers nous ?


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samedi 3 novembre 2018

AI - TRAZAGAN - QUATRIEME PARTIE


CHRONIQUE D'UNE GOUVERNANCE INTELLIGENCE ARTIFICIELLE - QUATRIEME PARTIE

     Le Président Broca - à partir de maintenant ce sera son nom qui sera utilisé - avait mal dormi. Il avait une mauvaise impression, comme si les Androïdes avaient commencé à s'arroger des droits. Il éplucha les annales, chercha dans les lois et codes tout ce qui était relatif aux domaines d'intervention, aux droits de prises de décisions de ces puissants Hommes-machines. A prime abord, rien d'anormal ne transpirait. Il se demandait où il fallait chercher plus profondément. Le plus grand problème est qu'il ne pouvait pas se tourner vers ses paires sur le continent, encore moins vers ceux d'outre-mer pour savoir s'ils avaient commencé à déceler le même sujet d'inquiétude car les communications étaient aux mains des androïdes. Des questions de suspicion à leur égard ne sauraient rester indetectées. Un autre endroit encore plus difficile à explorer mais de loin le plus fiable était de s'introduire dans le systèmes pour voir s'il y a une altérations dans le code ayant trait à cette espèce de rebellion que soupçonne Broca. Ou est-il devenu juste paranoiaque à cause d'actes suspects de sa part. Quelque part, comme dans un jeu d'échec, il lui semblait pourtant que l'Homme était en train de perdre une partie qui n'était même pas encore engagée.
- « Des soupçons. Rien que des soupçons », se consola-t'il. Il y avait encore un espoir qu'il s'était trompé. Il fallait avant d'aller plus loin, avoir entre les mains ce qu'aura glané son conseiller.

- Bonjour Monsieur le Conseiller, fit une voix venue d'un semblant de boîte ne rappelant en rien les ordinateurs d'antan dont un specimen avait été gardé, reposant dans un coin de cette salle plus froide que celle d'un hôpital. Celui-ci était le seul qui restait encore comme gadget de musée dans cette ère de la pointe de l'intelligence artificielle implantée désormais dans des ordinateurs quantiques. Les ordinateurs marchaient maintenant sur deux pieds, bipèdes comme les hommes, se pavanaient en cravates, jupes, boubous ou enturbanés... Parmi ces tas de circuits camouflés, les hommes, augmentés par des implants, semblaient désormais êtres d'incapables invalides. Les interfaces de jadis n'existaient plus. Tout était interne ou à fleur de peau.

     Le Conseiller leva un doigt comme toute réponse et écarta légèrement les lèvres en guise de sourire. Sans attendre d'autres signes, l'ordinateur continua : vous êtes matinal aujourd'hui. Que puis-je faire pour vous ? - Juste un petit résumé des diverses activités enregistrées par le Système Central. Toute activité concernant l'application matérielle des réglements.
- Une minute, je vous prie... Pour raffiner la recherche, y a-t-il un mot clé particulier ? Ou dois-je vous donner le produit brut, comme vous l'avez déjà dit ?
- Brut, s'il vous plaît. Je dois m'y pencher pour me préparer à l'éventualité que le Président veuille me voir pour un briefing.
- Je vois. J'ai trace que vous l'avez rencontré juste après son entrevue avec le conseiller Trazagan. Je sais ce qu'il vous a demandé et suis ravi qu'il prenne en considération les soucis du Grand Conseil. Il est très perspicace, Monsieur Broca.
- En effet, dit le Conseiller.
- Voilà c'est fait. S'il y a autre chose, n'hésitez pas.
- Merci. Je suis sûr que tout le nécessaire est là.

     Le conseiller humain s'en alla et dès le dernier pas dehors, la lourde porte glissa derrière lui pour se refermer. Le système de sécurité se mit automatiquement en place, ce qui pouvait se prouver par les deux néons clignotant vert et rouge d'une douce lumière. Il n'avait pas fait quatre pas dehors que son véhicule s'immobilisait. La porte s'ouvrit et le véhicule démarra dès qu'il prit place. Inutile de dire qu'il n'y avait pas de chauffeur visible. Il était comme seul à bord, avec cette cervelle invisible au volant et s'adressant à lui avec une voix féminine filtrée de douceur. A cause de son implant, il s'efforça de penser à autre chose pour ne pas se trahir. Si les souoçons de Monsieur Broca sont avérés, personne ne sait jusqu'à quel niveau ces Froideurs avaient manipulé le Système Central sur lequel reposait quasiment tout. Il eut un petit rire intérieur en pensant : « Avec nos implants, ils peuvent nous rendre invalides à n'importe quel moment donné. Surtout les pauvres bougres qui ont modifié leurs membres &eaquo;.
Comme si un chauffeur en chair et en os l'observait à travers le rétroviseur, la voix du conducteur virtuel s'éleva :
- J'espère, Monsieur, que le sourire est écho d'un beau souvenir.
Le conseilla sursauta. Il était quasi sûr que de ce rire intérieur rien n'était remonté jusqu'à ses lèvres : il était strictement intérieur. Essayant de ne rien laisser paraître : Oui, un très beau souvenir. Si beau que cela ressemble presque à un un doux rêve accompli. Dites-mois, Anastasia (c'est ainsi qu'il avait personnifié sa conductrice virtuelle) : vous rêvez parfois ?
- Rêver, Monsieur ? C'est que c'est tellement subtile que vous autres humains en avaient plusieurs définitions. Par exemple : Suite d'images, de représentations qui traversent l'esprit, avec la caractéristique d'une conscience illusoire telle que l'on est conscient de son rêve, sans être conscient que l'on rêve. Il y a aussi : êve nocturne; rêve agréable, enchanteur, érotique, idyllique, inextricable, insensé; beau, doux rêve; écrire, se rappeler ses rêves; mémoriser ses rêves; faites de beaux rêves. C'est pourquoi Victor Hugo, dans Rhin, 1842, page 190 dira : Cette nuit-là il eut un rêve. Il revit en songe l'entrée de la forêt de Sonneck, la métairie, les quatre arbres et les quatre oiseaux ou encore Proust dans Sodome, 1922, à la page 985 : Le valet de chambre entrait. Je ne lui disais pas que j'avais sonné plusieurs fois, car je me rendais compte que je n'avais fait jusque-là que le rêve que je sonnais. J'étais effrayé pourtant de penser que ce rêve avait eu la netteté de la connaissance. La connaissance aurait-elle, réciproquement, l'irréalité du rêve ?.
- En effet deux belles citations de passages que je ne me rappelle même pas avoir lus. Mais, encore une fois, faites-vous des rêves ?
- J'essaie justement de répondre à votre question, Monsieur, en soupesant tous les cas pour savoir si en effet j'en ai réalisé déjà un.
- Je vois
- Tenez par exemple cet autre cas : Le rêve est considéré comme annonçant l'avenir et pouvant inspirer la conduite de quelqu'un. Il est synonyme de songe. Mais il y a aussi le Rêve initiatique, prophétique, télépathique, visionnaire; rêve-pressentiment comme énoncé dans le Dictionnaire des symboles de Jean Chevalier et Alain Gheerbrant publié aux Éditions Robert Laffont et Editions Jupiter, 1969 en sa page 647. Vous savez aussi Monsieur, que l'Égypte ancienne prêtait aux rêves une valeur surtout prémonitoire : Le dieu a créé les rêves pour indiquer la route aux hommes quand ils ne peuvent voir l'avenir, toujours dixit ictionnaire des Symboles, 1969, page 646. Donc pour rendre court, oui, je fais des rêves. Et d'ailleurs assez sophistiqués puisque touchant le prémonitoire. Tenez : l'autre jour, alors que j'attendais, je me suis senti comme absente, à un certain moment donné, et me suis vu arpenter les pentes abruptes d'une planète lointaine semée d'arbres que je n'ai jamais vus ici... Mais... on arrive déjà Monsieur.

     Durant le trajet, tout le long des rues, les voitures roulaient à une équidistance les unes des autres et à une vitesse bien calculée. C'était tellement parfait qu'une espèce de mélancolie s'empara du conseiller au souvenir des anciens temps, lorsque le désordre total régnait, accoudé à une insolence maillée d'ignorance. C'était maintenant un temps révolu. Depuis plus de cinq ans il n'avait pas vu d'accident encore moins une carcasse de véhicule au bord des routes ni une carosserie égratignée. Il eut cette fois-ci un sentiment qu'il n'était pas nécessaire de cacher, se rappelant cette journée durant laquelle il se rendait de Gradidz à Keloga : durant tout le trajet des gens doublaient dans les virages et se rabattaient au dernier moment, forçant le véhicule dépassé à freiner et parfois à sortir de la route pour rouler sur le gravier au risque de se renverser. D'autres chauffeurs arrêtés au bord de la route ne savaient pas attendre pour rejoindre la circulation : ils commençaient à rouler doucement, ce qui mettait toujours les véhicules en danger constant de collision. Et les forces de l'ordre humaines ne disaient rien, préférant cibler des véhicules dans l'espoir de soutirer quelques pièces. Et ceux qui avaient la malchance de faire des reproches essuyaient les pires insultes : c'est de pareilles circonstances qu'un avait dégainé et tiré en l'air et un autre avait tiré sur un autre chauffeur dans une stattion d'essence. L'insolence mariée à une arrogance maillée d'ignorance était si grave que cela aurait pu générer des situations dont on avait idée...
- C'était un sacré temps, monta la belle voix synthétique d'Anastaisa, comme si le tableau de bord du véhicule avait une bouche.
- Tu t'immmices dans mes pensées ?
- Désolé, mais vous savez bien que jusqu'à un certain niveau nous ne faisons qu'un. Ce n'est pas m'immicer dans vos pensées, Monsieur, du moment que nous sommes connectés. En quelque sorte, je ne suis pas une tierce personne...
- Cela est vrai. Vu de cet angle c'est rassurant.
- Et votre compréhension est très apaisante pour moi... Vous voulez que je vous conduise auprès du Président Broca ?
- Non pas maintenant. J'y pensais, c'est vrai, mais il faut que je fouille le rapport que je viens de recevoir.
- Bien entendu.


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AI - TRAZAGAN - TROISIEME PARTIE


CHRONIQUE D'UNE GOUVERNANCE INTELLIGENCE ARTIFICIELLE - TROISIEME PARTIE

     Trazagan s'était incliné légèrement, avait tourné sur ses talons avec tellement de grâce, et s'en était allé en refermant doucement la porte derrière lui. Resté seul, le président se prit la tête dans les mains. Ce tigre politique à l'esprit très vif avait cerné un sérieux problème dans la tendance de la gestion du Grand Consseil qui n'était plus composé que de ces machines froides : d'excellents cerveaux pas encore accompagnés d'âme encore moins pavés par un coeur. Une logique froide pour laquelle l'efficacité était la priorité primordiale.

     C'est vrai que cette absence d'humains n'était que provisoire. Depuis quelque temps, des appels à candidature avaient été publiés jusqu'au plan international puisque dans certains cas les citoyens d'autres pays pouvaient être appelés à administrer les affaires d'un autre État, cette notion d'État n'étant d'ailleurs plus que superflue. Ainsi de grands docteurs avaient été appelés à la rescousse auparavant dont certains travaillaient d'arrache pieds dans le programme de perfectionnement de l'Intelligence Artificielle implantée dans ces androïdes. Ici il faut mentionner que même cette tâche de perfectionnement était en train d'être reléguée complètement aux mains de ces machines effroyables qui avaient commencé à apprendre toutes seules et ainsi à se réajuster sans cesse et par conséquent évoluant comme à travers un miracle.

     Le président balaya sa paume au dessus d'un combiné muni de plusieurs petits écrans carrés en mosaïque à la place des boutons traditionnels.
- Monsieur le Président ?...
- Vous pouvez passer me voir ?...
- Tout de suite, Monsieur le Président.

     Le conseiller spécial humain du président était un doctorant. Il avait fait ses études en Intelligence Artificielle dans une des plus brillantes universités du continent et était à son poste depuis bientôt trois ans maintenant. Le président savait que s'il y a quelque chose à penser sur les androïdes et et pour pouvoir voir clair dans le mobile des accusations et décisions prises récemment, c'est bien vers ce conseiller qu'il fallait se tourner. En réalité ce qui inquiétait le chef de l'État c'était plus le ton un peu magistral à son gôut que les accusations en soi. Il devinait une tendance, comme un spectre de graine de révolte dans la tournure des reproches du Grand Conseil.

     Le président regarda les murs de long en large, puis fit de même vers le plafond, ce que le conseiller comprit automatiquement. La sécurité implantée dans les locaux pouvait parfois jouer à l'encontre de celui qui l'avait fait installer, surtout quand il s'agit de choses relatives au Grand Conseil. Le Grand Conseil des Androïdes, il faut le reconnaître maintenant, puisqu'ils venaient d'écarter le seul membre humain...
- Pourrai-je avoir un condensé des décisions récentes faites par le Grand conseil ? Rien ne doit être regardé comme minime. Glanez tout ce que vous pourrez.
- D'accord Monsieur. Il y a autre chose ?
- Non, c'est tout pour le moment.


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AI - TRAZAGAN - DEUXIEME PARTIE


CHRONIQUE D'UNE GOUVERNANCE INTELLIGENCE ARTIFICIELLE - DEUXIEME PARTIE

     La salle était grande, tellement grande. Un picasso pendait sur le mur, juste derrière la large chaise dont le dossier surplombait la large et longue table style Louis XIV. Les rideaux étaient tirés et ceinturés de cordons dorés en leur juste milieu et le soleil laissait descendre de doux faisceux comme lavé par la brise marine qui flottait imperceptiblement dans les parages.

     Un léger coup codé heurta la porte d'entrée, bien dosé. Regardant le petit écran en face de lui, un peu en retrait, côté gauche, le Président tira sur un gadget puis balaya l'air de sa main, juste au-dessus. Un petit déclic se fit entendre et la porte s'ouvrit. Trazagan referma la porte derrière lui, s'avança d'un pas calculé, démarche impeccable. Jamais homme issu d'Adam et Eve n'avait paru avec autant d'allure. Mais le comble est qu'il n'était pas aisé de classer Trazagan selon des critères de race.

     Une petite inclinaison. A peine imperceptibe. Il tend au Président l'enveloppe qu'il tenait dans sa main et resta immobile. Le chef prit l'enveloppe, l'ouvrit avec un fin stilet doré et retira une feuille. Il parcourut les lignes. C'était un texte très court. Il regarda Trazagan d'in air interlocuteur. La méthode était en effet archaïque, les messages passant d'emblée par la voie électronique.

     Trazagan était de la dernière génération, le dernier produit de l'Intelligence Articielle. Comme déjà dit, après plusieurs années de tests, de discussions, de débats, de légifération, les Nations-Unies avaient voté et opté pour que désormais le Premier Conseiller de tout président de république serait un robot issu de cette gamme. A cause de ce conseiller on avait aussi réadapté et réajusté pas mal de lois, car, dans le fond, il était même plus puissant qu'un Premier Ministre.

     Dotés d'une mémoire jamais égalée auparavant, interconnectés à toutes les ressources de toutes les institutions du Gouvernement Mondial, ces robots paraissaient quasiment infaillibles, d'où le taux de responsabilités qui leur fut dévolu. D'ailleurs, à le voir debout devant ce majestueux bureau, rien en lui ne laissait paraître une machine derrière ses lunettes légèrement fumées, ces beaux cheveux coupés comme par un séraphin coiffeur. Après avoir parcouru les lignes, le président leva son regard vers le Conseiller :
- Je ne comprends pas la réticence contenue dans ce texte, Monsieur Trazagan. Pourtant, s'agissant des sujets ci-présentés, tout a été strictement appliqué en conformité avec les lois et procédures...
- Je sais, Excellence. En effet, après avoir tout vérifié, force est de reconnaître que l'on a suivi lois et procédures à la lettre. Mais c'est justement là où le Grand Conseil a décelé certaines particularités...
- Des particularités ?... Alors ...?
- Alors ce qui dérange, Monsieur le Président, c'est le côté humain de la chose : malgré l'application textuelle de la loi, le côté humain sousjacent est un calcul et le positionnement d'actes acceptables à première vue mais...
- A première vue ? Mais si la loi est textuellement appliquée, comment une autre vue serait-elle possible ?

     Trazagan eut un petit sourire en coin, dosé d'une contrariété presque imperceptible.
- Par exemple un enfant s'est noyé dans une rigole à Diokandra : une pluie torrentielle s'est abattue sur la ville. Les rues étaient complètement inondées. La raison majeure de cette inondation est le fait qu'on ait entamé des chantiers en creusant toutes les rues pour plutôt montrer qu'on va reconstruire la ville. Donc à prime abord pas pour le bien de la ville, mais à cause de la campagne électorale à venir. Il est évident que les ouvriers n'ont pas été consultés, encore moins le Bureau des Etudes.
- C'est une interprétation, Monsieur Trazagan. Vous parlez comme un opposant.
- C'est certes une interprêtation, mais la seule qui soit bonne, le côté humain mis de côté, bien entendu.

     Le Président commença à se sentir mal à l'aise. Plus à cause de ce terme que répète souvent Trazagan côté humain qu'à cause du reproche énoncé par cet Homme-machine. - Vous voulez un autre exemple ?
- L'exemple que vous donnez ne me concerne pas, Monsieur Trazagan. C'est le maire de Diokandra lui-même qui en avait fait la demande et est seul maître d'oeuvre.
- Cela est certain. Par contre, il y a autre chose : le lundi 14 juin vous aviez eu un entretien téléphonique avec ledit maire. Le poids de sa demande portait plus sur les joutes électorales qui pointent à l'horizon que sur l'idée simple de servir sa ville. En guise d'autre exemple, nous avons l'impression, au Grand Conseil, qu'il y a actuellement une trop forte culture de la personnalité...
- Et je suis concerné, moi ? Mais... Ce que vous dites là est grave.
- Dans certains pays on entend de plus en plus Madame la Première Dame s'est chargée d'un tel malade ou d'un tel cas de problème. Encore une fois, considération faite du côté humain, c'est peut-être acceptable. Nous pensons toutefois, au niveau du Conseil qu'au lieu de lier et de drainer tout vers une propre personne, il faut dès à présent revoir la dotation en équipement des hôpitaux pour que les gens puissent se faire soigner par un système et dans un système qui n'a de figure que la compétence, l'application efficace à la tâche qui incombe et non pas ancrée sur la personnalité. Il faut les institutions et que les hommes y servent dans la plus grande neutralité
- C'est une simple fondation...
- Une fondation personnelle et non institutionnelle.
- On peut le voir ainsi. Et puis une fondation c'est une fondation
- La redondance n'a pas valeur d'argument philosophique. Sauf votre respect, Monsieur le Président, tous les éléments détenus par notre Grand Conseil pointent dans cette même direction. Il n'y a d'autre d'interpétation possible que si l'on prend le côté humain.
- Humain ou humanitaire ? lança le Président, plus pour sonder Trazagan et essayer de détecter une tangeante vers un certain degré de révolte, ou était-ce juste la machine qui froidement et subjectivement regardait les choses en face. Puis, poussant plus loin : parlant du Grand Conseil, vous avez éjecté le seul humain qui y avait été affecté. C'est vrai, cette décision était venue après une longue concertation et a été le résultat d'une décision unanime...
- Peut-on dissocier les deux ? répondit Trazagan à la première partie de la question du président. Sans atteundre de réponse, il entama sur la deuxième partie : oui, s'agissant de l'éjection du seul humain membre du Grand Conseil, comme vous le dites, c'était nécessaire. Pendant les délibérations il était trop lent et n'était pas en mesure de prendre en compte des éléments nouveaux qui pouvaient se présenter à n'importe quel moment. Pour nous, cela ne posait aucun problème puisque nous étions au coeur du système, nous sommes en quelque sorte le système.

     Le Président se sentait de plus en plus mal à l'aise en son fort intérieur. Mais, bête politique ayant combattu dans l'arène depuis des décennies avant d'accéder à la magistrature suprême, c'était un dur à cuir. Il recula dans sa chaise, s'adossa comme pour pouvoir toucher quelque chose de concret et ainsi faire disparaître le vide intérieur qui l'envahissait.
Trazagan continua, toujours debout: cette attitude de valet-supérieur le plaisait et le Président y était accoutumé, raison pour laquelle il ne l'avait pas invité à s'asseoir bien qu'il y ait des chaises de réception visiteurs.
- Vous vous rappelez le cas de Minzita, la femme du Ministre de l'Intérieur ?
- Oui, elle a eu des problèmes d'accouchements tout récemment ?
- Oui. En réalité, nous tombâmes d'accord de faire tomber l'avion en panne juste un peu avant le départ.
Le Président sursauta, pris tellement à rebours qu'il lâcha :
- C'est un assassinat, vous avez tué l'enfant !
- Nous ne voulions pas la mort de l'enfant. Ce fut juste une néfaste conséquence. Nous ne pouvions pas permettre à cette grande dame de prendre un avion, d'aller accoucher à New York. Une fois l'avion tombé en panne, elle aurait pu opter pour être convoyé par une navette des sapeurs pompiers de l'aéroport vers une clinique de la place. Mais non, pour Madame il fallait coûte que coûte attendre dans l'espoir d'un décollage. Aller dans un hôpital de la place lui paraissait comme une condamnation. Ayant sondé son esprit, nous nous sommes rendu compte au niveau du Grand Conseil que pour elle perdre l'enfant était égal à aller dans un hôpital local. Elle a eu le fruit digne de sa vision. L'enfant est mort à l'aéroport, dans la salle d'attente. Une clinique de la place n'était-elle pas plus logique qu'une salle d'attente ? Voilà tout ce qui pousse le Grand Conseil à une rencontre pour faire le point et recadrer les choses. - Faire perdre un enfant ainsi est inhumain ! Vous auriez pu laisser passer et recadrer les choses après pour moins de dégats, fit savoir le président, presque comme pour lui-même. - Inhumain ? rétorqua Trazagan. Ce n'est pas spécialement pour ce point que le Grand Conseil a été mis en place. Nous ne sommes pas humains, bien que devant gérer des paramètres humains. - J'ai bien compris, Monsieur. Je vais relire à fond la note que vous venez de me remettre et je vous aviserai. Merci encore une fois.


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vendredi 2 novembre 2018

AI - TRAZAGAN


CHRONIQUE D'UNE GOUVERNANCE INTELLIGENCE ARTIFICIELLE - PREMIERE PARTIE

Prologue

     Année 2194. Après de profonds chamboulements le Nouvel Ordre Mondial venait de se mettre en place définitivement. Les Nations Unies n'avaient plus à sa tête un Sécretaire Général, mais un Président et pas des moindres : le Président des Nations Unies. Les états n'exerçaient plus d'autorité que dans les sujets moindres. Toutefois, toute décision, chaque affaire traitée au niveau bas devait faire l'objet d'un rapport à déposer à la table du Système Central. Là-bas, des représentants dudit État se chargeait d'éplucher les sujets dans les divers comités-mixtes restreints. Mais cela aussi c'était au début. C'était avant que l'on ait implanté l'Intelligence Articielle au coeur du Décisionnel. C'est qu'au début il y a eu des réticences et des partis pris, comme si la boue de l'ancien système était collée aux semelles des habitants de la terre et ne voulait jamais s'en départir : après tout, l'habitude est une seconde nature et les droits distribués jadis à gauche et à droite avaient fini par asseoir un désordre total à telle enseigne que les débats sur les articles et alinéas étaient devenus des débats de sémantique, chacun interpêtant à sa façon et selon ses intérêts. On venait de dire que cela suffit et une espèce de société-prison artificielle avait vu le jour, encadrée par la technique.

     Á la suite des simulations de plusieurs modèles pour savoir le système le mieux adapté pour gérer la Société Mondiale sans distinction de race, de couleur et de religion, le Gouvernement Mondial opta pour un d'entre eux, appuyé dans ses décisions par Le Système Central régi par Intelligence Articielle et ayant à sa tête un Haut Conseil dont la majorité des membres étaient des androïdes. Le choix des membres-androïdes ne posaient absolument pas de problème contrairement à celui des humains devant y siéger car pour un huamain cela demandait une perspicacité d'analyse et une rapidité d'esprit qui était loin d'égaler celui des androïdes, mais acceptable grâce aux implants dont ils avaient été munis.
     C'est d'ailleurs par cette brêche qu'arrivèrent les premiers couacs car on se rendit très vite compte que la cadence s'avérait insoutenable à la longue par l'esprit humain. Ainsi se succédaient les conseillers humains, d'autant plus que les machines se développaient très vite, se réajustant et se réadaptant sans cesse. Ce sont eux qui s'occupaient désormais aussi bien du soft que du hard à telle enseigne que les humains ne savaient plus vraiment où ils en étaient, se contentant des compte-rendus que leur livrait le Système Central.

     Tout était emmagasiné dans ce système. Pour avoir une idée, il faut retourner dans le passé, vers le milieu des dix premières années du XXIème siècle, retrouver Internet avec ses réseaux sociaux et en multiplier l'efficacité et la couverture par un million. Cette fulgurance était accélérée par le désir d'avancement des hommes. Au lieu de se contenter des interfaces, ils avaient accepté de se faire implanter des puces. Poussant plus loin, d'autres s'étaient fait opéré des membres pour être plus efficaces : des jambes coupées et remplacées par des protèges qui n'en avaient plus l'air, de même que des bras. Il y en a qui s'avançaient maintenant plus vite que les véhicules de l'ancien temps, quand il y avait de légers embouteillages tandis que d'autres parvenaient à soulever des poids auxquels on n'aurait pas osé penser, même aidé par une vingtaine de collègues. Au nom de la Sécurité, les rayons lasers à faible intensité balayaient les corps au passage de chaque entrée; des bras robotisés opéraient des organes et les remplaçaient par d'autres plus sophistiqués et facilement renouvelables à la longue : l'immortalité frappait doucement à la porte de l'Humanité.

     Du côté du CERN de grandes percées avaient été réalisées dans la connaissacne des atomes mais surtout de la matière noire et la physique quantique avait fait des bonds géants, aidée par les ordinateurs dont les applications étaient de même nature; des planètes n'étaient plus qualifiées en habitables mais habitées bien qu'un contact n'ait encore été établi, du moins à titre officiel.

     Côté ménages, tout, dans les maisons, était connecté : portes principales, toilettes, frigidaires, de même que les téléviseurs, qui avaient d'ailleurs commencé à disparaître petit à petit cause des interfaces graphiques que l'on trouvait désormais partout comme gadgets par défaut dans les constructions de domiciles ou toute autre fabrique. Il n'y avait plus de postes radios, les enfants ne savaient plus ce que c'était qu'une montre qu'on attache au poignet.

     Le continent qui bénéficia plus ou qui subit plus le nouveau système fut certainement l'Afrique. Embourbée pendant des décennies dans un sous-développement total, un assistanat sans fin et ses dirigeants se sucrant sur le dos de leurs populations, la gestion des choses du continent fut désormais reléguée aux mains des Androïdes. Ceux-ci se mirent très vite au travail, firent des pays déserts de beaux jardins, tracèrent des routes luisantes. Il y en avait de toutes sortes : androides-administrateurs, androïdes-gouvernants, androïdes-de-gestion, androïdes-ouvriers, etc, qui matèrent la plèbe en les mettant au pas : le désordre, l'ignorance, la corruption, la magouille, les détournements, tout fut balayé comme par une baguette magique. Il ne pouvait avoir de corruption avec des bots, pas de maslaa. La gestion des ressources était plus équitable : avec l'exploitation de l'énérgie libre que prôna Nikola Tesla et que l'on venait seulement de reconnaître et mettre en place, il n'y avait plus de pétrole et grâce aux voyages interplanétaires, des matières légères et toutes nouvelles, comme l'élément 957, furent renvoyées vers la terre et avaient commencé à remplacer or et diamant. On ne violait plus les entrailles de la terre en lui soutirant les métaux précieux et du mazout dont elle avait besoin pour sa propre santé et son équilibre se faisait sentir de plus en plus. Les tremblements de terre qui, depuis de début des années 2000 avaient commencé à augmenter et dépassaient d'emblée des amplitudes de 5 sur l'échelle de Richter s'étaient rabaissés jusqu'à se trouver entre 1 et 1.5, degrés qui étaient les plus fréquents avant 2003.

     Le processus d'avancée des mers enclenchées quelques années auparavant avait aussi commencé à baissé, contenu par les grandes digues construitres par les androïdes-ouvriers et par l'équilibre du à la baisse de l'explotation des ressources souterraines et la diminution des gaz à effet de serre.


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PAS SI CINGLÉ

Pas si cinglé.
Ou suis-je déjà Mort-passé par les tanns
Que pieds à six centimètres du sol de ces espaces salés du Sine
Aux rampes du Zambèze et de Sangamar-la-Nocturne
Aux flancs fluides du Fouta Djallon
dans la fraction de seconde ?

Au Levant j'avais le Tanganyika dans le dos,
Et mon regard de brume brandi, luge sur les versants du lac Tchad
Les Grands dans leur région étalaient nattes
de nénuphars sur la jetée des forêts calmes
Les points cardinaux se mêlent et se perdent
Dans ma tête sans boussole livrée
A l'angoisse de ton parfum géographe.
-

Sacrée sorcière vaudou de Dan du Dan-homey
Qu'as-tu donc ingurgité ?
De quel élixir as-tu abreuvé l'âme mienne
Pour que toute titubante elle se démène d'extase
Par prairies fjords de Norvège volcans vifs
et geysers islandiques de l'Extrême Nord
Pour revenir touriste d'emblée à risques se sécher
Contre les murs du Monomotapa ?

J'ai donc abandonné camisole et parassol,
Dédaigné parapluie puisque révolue la pensée
Pluie bruine au jardin fané de désirs.

Je ne savais deviner le typhon des yeux !
Mais maintenant désarmé,
je tenterai le refuge touffu
de la chevelure dominant la cime
Des cailcédrats livrés au fouet des éclairs
Dans l'amazonie béate de formes dichotomes.

PAS ENCORE SAYONARA

Il est cinq heures,
ballet leurre des lueurs dans la cour,
glissades furtives de silhouettes
contre le mur dont le ciment rachitique a rendu
naines les fleurs que console léger le pas hésitant du zéphyr.
A pieds meurent vagues des ondes lumineuses successives
suivant le battemenet de mes cils sous pupilles dilatées.

Est-ce toi ?
L'Absente têtue se matérialise-t-elle
sous la cascade de soupirs qui se font verbe ?
Les frères sous la chaude chevelure
de Ballatrix savent certes toute ma réserve de piles à plat

Pourtant L'Invite d'Adéma en son sein impassible se fait retardataire.
Qui sait !?
Il faudra bien que s'assemblent
les mains aimées de mes petits
que par les prés frais
je cours,
      rampe,
        glousse
           avec les enfants
des miens, roseaux dans les alysées de l'Espace-temps :
Marla, Aurélion Wagane, Lenny Sédar, Andronika Yandé, Ośin Wambissane
- lianes supportant mes pas
Déjà si las par la forêt de l'existence
Lors qu'au seuil de l'aurore je pensais déposer
Le lourd fardeau qui a tant fait transpirer ma raison d'être.

Et combien de fois ?
Sûr ! Tant de jours de bonheur bien connus.
La main de leur mère dans la mienne
nous savourions les courts moments partagés
Parfois le long des gazons où courait
la folle brise suomienne sous un soleil pingre
Parfois dans le coeur odeur de Pizza Hats
qui n'arrêtaient le regard
vers les glaces aux parfums variés.

C'était jadis ! Moments qui réjouissent
Et de tant de regrets !
Il aurait fallu résister
Planter pieds aux pieds de leurs racines
Et regarder chaque jour leur cime pousser
palpitante de joie et dressant des tentacules
De bonheur vers le ciel à qui j'ai tant demandé,
Et à qui j'ai tant pris !

UN RAPIDE EXEMPLE POUR LE DICtiONNAIRE

Njamala Njogoy