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dimanche 7 octobre 2018

ETHIOPIQUES - CHOIX DU THEME


LE THEME CHOISI : ETHIOPIQUES

Le thème a été choisi et ce choix n'est ni simple ni simpliste. C'est que si la Négritude, bien que défendant les valeurs de l'homme de noir, ne le transcendait pas pour s'adresser à l'Homme, à l'humanité toute entière, elle n'aurait certes pas eu sa raison d'être, aurait failli à sa mission. Une telle restriction est généralement la faiblesse de tous les courants ayant tendance à défendre une catégorie donnée à titre égalitaire.

C'est ce qui fait parfois la faiblesse du féminisme, par exemple comme de toute minorité qui s'élève pour ses droits : il y a toujours une dimension trop restreinte qui en fin de compte, loin de poser les fondamentaux en matière d'humanité, s'arrête plutôt à la classe et, partant, finit par énerver l'autre clan s'il ne fait que glaner quelques graines de pitié et de sympathie. Une vision trop restrictive de ces mouvements finissent justement par s'habiller des défauts de ce qui est combattu : des Nègres prêts à donner tous les coups aux Blancs, des féministes prêts à en découdre avec tous les hommes ou à leur emboîter le pas en allant dans l'armée pour prouver qu'elles aussi peuvent tuer ; des Nègres qui pensent que leur émancipation passe par le fait de quitter le christianisme pour embrasser une autre religion non moins colonisatriceet par conséquent assimilatrice et dont les capacités de dénaturalisation sont plus sournoises puisque non palpables, etc.

Jean-Paul Sartre a très bien discerné le danger de cette restriction qui n'est toutefois pas fin en soi : « Le nègre, comme le travailleur blanc, est victime de la structure capitaliste de notre société ; cette situation lui dévoile son étroite solidarité, par-delà les nuances de peau, acec certaines classes d'Européens opprimés comme lui ; elle l'incite à projeter une société sans privilège où la pigmentation de la peau sera tenue pour un simple accident. Mais, si l'oppression est une, elle se circonstancie selon l'histoire et les conditions géographiques : le noir en est la victime, en tant que noir, à titre d'indigène colonisé ou d'Africain déporté.

Et puisqu'on l'opprime dans sa race et à cause d'elle, c'est d'abord de sa race qu'il lui faut prendre conscience. Ceux qui, durant des siècles, ont vainement tenté, parce qu'il était nègre, de le réduire à l'état de bête, il faut qu'il les oblige à le reconnaître pour un homme. Or il n'est pas ici d'échappatoire, ni de tricherie, ni de « passage de ligne » qu'il puisse envisager : un Juif, blanc parmi les blancs, peut nier qu'il soit juif, se déclarer un homme parmi les hommes. Le nègre ne peut nier qu'il soit nègre ni réclamer pour lui cette abstraite humanité incolore : il est noir. Ainsi est-il acculé à l'authenticité : insulté, asservi, il se redresse, il ramasse le mot de « nègre » qu'on lui a jeté comme une pierre, il se revendique comme noir, en face du Blanc, dans la ferté. L'unité finale qui rapprochera tous les opprimés dans le même combat doit être précédée aux colonies par ce que je nommerai le moment de la séparation ou de la négativité : ce racisme antiraciste est le seul chemin qui puisse mener à l'abolition des différences de race ».


  1. ETHIOPIQUES

    Qui dit « Ethiopiques » ramène à l'esprit l'Ethiopie, qui peut représenter les deux facettes de cette Négritude tant clamée par Césaire, Damas, Senghor, et al. Il faut aussi savoir que c’est la deuxième fois que Senghor prend le terme comme thème, la première étant « Ethiopie » dans « A l’appel de la Race de Saba » qui sera composé de sept strophes à travers lesquelles il s’adresse à sa mère, faisant ressortir l’adulte blessé, brisé par les « grands brigands du Nord » et leur civilisation dénaturée, et tentant de se réfugier dans les lambeaux mémoriels de son enfance sinoise pour retrouver l’innocence du terroir des hommes où « le palmier a mille noms, mais n’est pas nommé ».


    1. ETHIOPIE SYMBOLIQUE

      Ici, Senghor replonge en prenant comme thème éthiopiques et, partant, l’Ethiopie pour servir de cadre idéal quant à la restitution de la dignité de l’Homme Noir. Ce pays, en plus de ses profondes racines qui remontent jusqu’au roi Salomon à travers la reine de Saba, et donc berceau de métissage, était aussi le pur symbole de la dignité nègre préservée, l’innocence d’une Afrique vivant ses valeurs et pas contaminée par « la boue de la civilisation » et la proéminence internationale de sa majesté Haïlé Sélassié Ier. Partout ailleurs l’on ne voyait les nègres qu’en : « hommes du coton du café, de l’huile... hommes de la mort ».

      L’Ethiopie sert de cadre idéal à un autre degré : elle est symbole parce qu’elle avait su résister et garder son indépendance malgré diverses agressions : « La Seconde Guerre italo-éthiopienne ou campagne d'Abyssinie est un conflit opposant l'Italie fasciste de Benito Mussolini à l'Empire d'Éthiopie de Hailé Sélassié I du 3 octobre 1935 au 5 mai 1936. Elle s'inscrit dans le cadre de la seconde tentative de l'Italie de s'emparer du pays après la défaite d'Adoua en 1896, qui avait fait du pays l'un des derniers pays libre d'Afrique » et repousser les troupes italiennes : « Car le cri montagnard du Ras Desta a traversé l’Afrique de part en part, comme une épée longue et sûre dans l’avilissement de ses reins. Il a dominé la rage trépignante des mitrailleuses, défié les avions des marchands... ». Mais le reste de l’Afrique, comme celle du Sud, peinait toujours : « … et voici qu’un long gémissement, plus désolé qu’un long pleur de mère aux funérailles d’un jeune homme sourd des mines là-bas, dans l’extrême Sud. »

      « Ethiopie, pays de deux milles ans d’histoire. Terre africaine à la souveraineté immaculée ayant parlé aux autres nations du monde d’égal à égal. Seul pays d’Afrique où l’occupation étrangère n’a duré que six ans (1935-1941). L’Ethiopie a aussi écrit une des brillantes pages d’histoire du continent : les troupes éthiopiennes ont battu les troupes italiennes à la bataille d’Adoua en 1896. Et cette guerre avec l’Italie tire son origine sur l’interprétation d’un accord rédigé en italien et en amharique. Pour les éthiopiens, ils avaient signé un simple traité d’amitié qui n’autorisait pas la présence de troupes étrangères sur leur sol. Pour les Italiens, l’Ethiopie, était devenue leur protectorat, ce qui les autorisait à l’envahir militairement. Voilà le casus belli qui se solda par la victoire éthiopienne, la première défaite d’une puissance impériale européenne.

      « L’Ethiopie est une légende africaine, une stèle géante de la grandeur des royaumes noirs. Cette grandeur a des répercussions impressionnantes sur la diaspora noire aux USA et en Jamaïque. En 1921, le révérend James M Webb lance : « regardez vers l’Afrique, où un roi noir sera couronné, qui mènera le peuple noir à sa délivrance ». Il parlait d’Hailé Sélassié qui deviendra malgré lui une divinité, Jah, du mouvement Ras Tafari. Ras veut dire leader, et Tafari est le prénom de naissance de Hailé Sélassié. « Le pays choisi par les pères fondateurs de l’unité africaine, pour abriter le siège de l’Union africaine est sans conteste celui qui a le plus de raisons historiques de l’abriter. Il est notre fierté, notre liberté jamais vaincue, notre diversité et notre insertion, immersion dans le monde. C’est pourquoi il est utile de revenir sur son passé, ses particularismes calendaires, scripturaux (alphabet guèze) et les richesses architecturales et archéologiques».

      Pour nous, Nègres en vendange de dignité et d’honneur, c’était beaucoup. Jusqu’à présent, plus pour nous faire accepter et revendiquer notre place parmi les peuples que par simple exercice d’esprit, pur amour de la connaissance, nous aimons toujours, comme le pauvre s’agrippe à son dernier lambeau, remonter vers des origines égyptiennes, exhiber nos empereurs partis à la Mecque et les universités de Gao ou Tombouctou, premières parmi les premières universités du monde : « Au XVème siècle, la construction par une vieille femme de la mosquée de Sankoré, qui comprenait une medersa, est à l'origine d'une université islamique de renommée internationale. Jusqu'à 25 000 étudiants fréquentèrent la ville sous le régime de Sonni Ali Ber, Sonni Ali le Grand ».

      C’est justement ce point focal qui fera la différence de vision entre Cheikh Anta et le professeur Joseph Ki-Zerbo, nommément concernant l’Egypte. On nous dit quant à la vision de celui-ci : « L’Egypte, par sa richesse économique, agricole, commerciale et culturelle est un point attracteur énorme et un creuset pour de nombreux peuples (comme les Hébreux, les Hyksos, les Ethiopiens, les Nubiens, etc.) qui viennent se mélanger au fond originel. Plus globalement, l'Histoire de l'Afrique (1972) est ainsi un vaste panorama diachronique et circonstancié, rendu vivant par des extraits de chroniques, des grands évènements et des évolutions des peuples du continent.

      En cela, la forme, le fait de présenter les évolutions sociales économiques et politiques de la même manière que d'autres encyclopédies ont présenté l'Europe et l'Asie, replace de fait, dans la pratique, l'Histoire de l'Afrique au même rang que celles des autres continents. Et cela, sans avoir besoin de clamer une Afrique originelle, objectif de pureté à retrouver que proclame Cheikh Anta Diop. La présentation diachronique à l'échelle du continent souligne ainsi de fait l'évolution contiguë des différentes grandes civilisations, soulignant ainsi les points communs et l'échange des idées mais aussi le fait que les chocs qui les ont abattues ont une origine commune : l'expansion européenne et ses conséquences (expansion marocaine, turque et omanaise) ». C’est cette même approche qui fait ressortir la couleur de peau de Bilal, cette même tendance qui ne veut présenter Coumba Ndoffène Diouf et lui donner une place dans l’histoire du Sénégal qu’en prenant comme point proéminent le seul fait qu’il ait un jour donné un témoignage. Après tout, pourquoi n’y aurait-il pas eu des Obama parmi les pharaons, à Rome, en Arabie, des reines de Saba en Mésopotamie ou à Babylone dans quelque haute sphère des diverses cours ?

      Comprenons-nous : c’est bien noble de remonter à ses origines par des fouilles archéologiques et la linguistique historique, mais cela peut être pathétique si cette remontée est tendue comme une bouée de sauvetage, une corde pour se hisser et se faire accepter au banquet de l’Universel. C'est justement cette dimension du discours de Monsieur Sarkozy que les nègres ont râté dans leur interprétation. Celui-ci, s'adressant à la jeunesse, est une invitation à se tourner vers le futur. Peut-être a-t-il fait une petite faute car, après avoir parlé d'un continent ayant connu tant de civisations brillantes, il est contradictoire de parler d'une Afrique n'étant pas assez entrée dans l'histoire. Il aurait du dire qu'elle n'a pas encore assez retrouvé sa place dans le présent pour pouvoir faire face à l'avenir. La psychose qui pousse à toujours vouloir remonter à des origines lointaines et parfois mitigée est compréhensible. Elle aurait été moins pénible si l’Afrique n’avait connu que quelques unes de ses terres colonisées. Cela aurait été plus supportable, disons-nous, si, partout à travers le globe, le Nègre n’avait pas été soumis à la règle et à l’équerre de la domination, de l’avilissement, qui forceront la naissance de la Négritude.


    2. ETHIOPIE DU METISSAGE

      Les anciens Grecs, d'Homère à Démoclite en passant par Hérodote et Ptolémée ont fait référence aux Hommes brulés par le soleil, terme qui désignait les Ethiopiens, du grec aithô qui veut dire "brûler" et ops qui signifie "visage". Mais pour le contact établi entre l'Ethiopie et d'autres civilisation ou peuples dès les anciens temps, il faudrait tout scinder en périodes.


      1. Temps bibliques

        Si on la compare à celle de l'Égypte, l'histoire ancienne de l'Éthiopie est relativement mal connue. La Bible appelle ce pays la Terre de Chus ce qui la suppose peuplée par les descendants de Chus, fils de Cham et frère de Misraïm, et suggère que les tribus qui l'habitaient pourraient avoir été originaires d'Arabie. Mais le renseignement reste mince. Au moins peut-on penser que les Hébreux et les Phéniciens y vinrent de bonne heure pour y faire le commerce.

        En dehors de cela, l'histoire de la Reine de Saba avec le roi Salomon d'Israel est connue du monde entier. Plusieurs sources, de la Bible au Coran - nommément dans la soutate 27 et un haddith -, en passant par les écrits éthiopiens, en font mention. Selon Joséphus, (Ant. 8:165–73), la reine de Saba fut reine d’Égypte et d’Éthiopie et apporta en Israël les premiers spécimens de commiphora opobalsamum, qui grandirent sur la terre sainte.

        Différents noms lui sont attribués. La tradition éthiopienne l'appelle « Makéda » (ge'ez :), celle du Yémen « Balqama ». En hébreu la translittération peut varier; Louis Segond écrit « Séba » dans sa traduction de la Bible. Dans le Nouveau Testament, l'Évangile selon Luc l'appelle « Reine de Midi », E@acutevangile de Luc 11 : 31.


      2. Temps des dynasties égyptiennes

        Dans la partie de l'Ethiopie appelée aujourd'hui Nubie, on voit fleurir, dès les temps les plus anciens, l'empire de Méroé qui entretint des liens étroits avec l'Egypte. Vers le XVe siècle av. J.-C., les Éthiopiens furent soumis par Sésostris mais au commencement du VIIIe siècle, ils conquirent l'Égypte à leur tour et la gardèrent jusqu'en 713 avant Jésus Christ. la XVe dynastie des rois d'Égypte Sabacon, Sua et Tharaca, est une dynastie éthiopienne ou plutôt, nubienne. L'ancienne Nubie finit par perdre de son importance au profit d'Aksoum, qui sera désormais le vrai royaume d'Ethiopie, ancêtre de l'empire d'Abyssinie. Son roi Zoskales est nommé par l'auteur du Périple de la mer Erythrée (IIe siècle av. J.-C ?). Les monnaies de plusieurs de ces souverains nous sont parvenues. Ils étaient en rapports suivis avec les Grecs


      3. Temps des anciens grecs

        Vague au début quant à la situation géographique, le terme s'est localisé par la suite pour désigner spécialement les populations du Sud de l'Egypte, du bassin supérieur du Nil, habitant entre le Sahara, (Libye ) et la mer Rouge (Golfe arabique). « Tandis qu'Homère appelle les Ethiopiens les plus éloignés des habitants de la Terre, résidant depuis l'extrême Orient jusqu'aux régions du couchant, Hérodote applique ce nom aux gens du haut Nil. II discerne des Ethiopiens orientaux à cheveux lisses et des Ethiopiens occidentaux à cheveux crépus. Cette division est exacte : les premiers sont les Nubiens et autres peuples bruns que l'on réunit dans le groupe Chamites, les autres désignent, pour faire court, les Noirs subsahariens.

        A partir du moment où les Grecs entretiennent des relations régulières avec l'Egypte, leurs connaissances s'étendent. Pour Homère, les Éthiopiens étaient un peuple largement mythique. Hésiode lui, parle déjà de leur roi qu'il appelle Memnon. L'on dit que Démocrite était venu sur le Nil jusqu'à Méroé et Hérodote nous donne des détails sur les Ethiopiens, particulièrement sur ceux de l'Orient. Il est vrai que ces détails sont en partie fabuleux. Il cite parmi leurs tribus les Macrobiens (ceux qui vivent longtemps), les Ichtyophages et les Troglodytes, habitants des cavernes. Il connaît la capitale du royaume d'Ethiopie ou, en l'occurence, de Nubie, Méroé. Les écrivains grecs ultérieurs sont de mieux en mieux informés. Ptolémée énumère un grand nombre de tribus éthiopiennes. Il cite, comme capitale de l'Ethiopie, Auxumis, Aksoum et Pline affirme que le Nil forme la limite entre l'Ethiopie orientale et l'Ethiopie occidentale mais en somme, ses renseignements restent un peu vagues. Les modernes ont précisé le sens du mot Ethiopie et lui ont donné, au lieu de son acception ethnographique, une acception géographique et politique plus déterminée.

        Jusqu'au début du XXe siècle, on appelle Ethiopie la région du Nil moyen et du Nil bleu, correspondant à la Nubie et aussi à l'Abyssine, et le royaume qui se constitua dans cette région et fut en rapports réguliers avec l'Égypte. Le centre de ce royaume d'Ethiopie s'est d'ailleurs déplacé, au cours des siècles, de la Nubie, à laquelle on se réfère d'abord lorsque ce mot est utilisé à propos de l'Antiquité vers l'Abyssinie, mais toujours l'élément prépondérant y fut celui des populations dites chamitiques ».

        « Selon Josephus (Ant. 8:165–73), la reine de Saba fut reine d’Égypte et d’Éthiopie et apporta en Israël les premiers spécimens de commiphora opobalsamum, qui grandirent sur la terre sainte. Le Talmud, quant à lui, Bava Batra 15b, insiste sur le fait qu’il n’y avait pas de reine, mais un roi de Saba (basé sur des interprétations variées de l’hébreu “mlkt”) qui arriva à Jérusalem. Cette version est destinée à discréditer toute histoire relatant une relation entre Salomon et la reine. Toutefois, le compte-rendu le plus détaillé de la visite de la reine de Saba au roi Salomon nous est donné au VIIIe siècle dans le Livre d’Esther : une huppe informe Salomon que le royaume de Saba est le seul royaume dont le peuple ne lui est pas sujet et que sa reine idolâtre le soleil.

        Il la renvoie alors à Kitor dans le pays de Saba. Dans la lettre qu’il a attachée à son aile, le roi ordonne à la reine de venir à lui en tant que sujet. En réponse, elle lui envoie tous les bateaux de la mer chargés de cadeaux et de six mille jeunes de taille égale, tous nés à la même heure et habillés de vêtements pourpres. Ils portent avec eux une lettre déclarant que la reine arrivera à Jérusalem dans trois jours quand le voyage en prend normalement sept. Quand cette dernière arrive et se rend au palais de Salomon, elle confond le sol en miroir avec de l’eau. Elle soulève donc le bas de sa robe et découvre ses jambes. Salomon l’informe de son erreur et la réprimande sur ses jambes velues . Elle lui posa trois énigmes (Esther 1:3) selon le Midrash, beaucoup plus pour tester sa sagesse. L’alphabet de Ben Sira affirme que de leur union serait né Nabuchodonosor II ».


      4. Temps du christianisme

        « Le Christianisme fut introduit dans leur pays au IVe siècle, mais la puissance nubienne avait déjà pratiquement disparu dès cette époque. De petits royaumes chrétiens vont se former au cours des siècles, puis celui, islamisé, des Founj, ou royaume de Sennaar, qui, constitué entre les XVIe et XIXe siècle, aura une certaine importance... L'ancienne Nubie finit par perdre de son importance au profit d'Aksoum, qui sera désormais le vrai royaume d'Ethiopie, ancêtre de l'empire d'Abyssinie. Son roi Zoskales est nommé par l'auteur du Périple de la mer Erythrée (IIe siècle av. J.-C?). Les monnaies de plusieurs de ces souverains nous sont parvenues. Ils étaient en rapports suivis avec les Grecs. Ils se convertirent au christianisme au IVe siècle. Dans le courant du VIe siècle, les chrétiens du Yémen, maltraités par la dynastie juive, firent appel à leurs coreligionnaires éthiopiens; les rois d'Aksoum envahirent l'Arabie et dominèrent pendant trois quarts de siècle au Yémen. L'islam s'est principalement implanté dans la zone côtière...

        ... Devenue une monarchie puissante, l'Abyssinie fut gouvernée par des souverains qui prirent le titre de roi des rois ou négus. Ces monarques, restés très mystérieux en Europe, furent identifiés au Moyen âge au légendaire Prêtre Jean. Au fil du temps, le pays doit subir des invasions telles que celles de Galla venus de Sud et de l'Ouest et s'essouffle aussi en guerres intestines qui aboutiront à sa fragmentation et à la création d'Etats tel que celui du Tigré, de Gondar, de Choa et surtout d'Amhara, héritier direct de l'ancien royaume d'Aksoum ».

        Comme symbole de métissage, Léopold Sédar Senghor ne pouvait trouver mieux. Et si d'aucuns veulent opposer Senghor et Cheikh Anta ce ne sera certainement jamais quant à leur vision sur l'antiquité. S'ils le font, qu'ils sachent qu'ils se gourrent terriblement. Nous dirons même que, pour ce qui est concerne ce point, les deux forment un tandem. Senghor ne dira t'il pas : « Je marcherai par la terre nord orientale, par l’Egypte des temples et des pyramides. Mais je vous laisse Pharaon qui m’a assis à sa droite et mon arrière-grand-père aux oreilles rouges. Vos savants sauront prouver qu’ils étaient hyperboréens ainsi que toutes mes grandeurs ensevelies » ? S'il y a différence ou différent entre les deux, il faudra aller les chercher au niveau politique et non par rapport à une quelconque histoire d'origine égyptienne.

        Senghor est bien conscient de cette tranche de l'histoire de quelques peuples d'Afrique, spécialement celle de sa propre ethnie sérère dont Cheikh Anta, comme Paul Pierret, dira : « le mot serer vient de l'égyptien ancien qui signifie celui qui trace les contours des temples ». Pour d'autres scientifiques, l'ethnonyme viendrait plutôt du mot égyptien Sa-Re ou Sa-ra, qui signifie 'le fils du démiurge', le Dieu Ra ou Re dans l'Égypte et la Nubie antique. D'autres historiens tels que R. G. Schuh ont réfuté la thèse de Diop. Cependant, de nombreux historiens, linguistes et archéologues, tels que Issa Laye Thiaw, Cheikh Anta Diop, Henry Gravrand, Paul Pierret ou Charles Becker, s'accordent à penser que le mot 'sérère'qui s'applique aux personnes mais aussi à la langue, la culture, la tradition – est ancien et sacré.

    Personnellement, nous avons noté un fait qui est accablant : le toit des cases sérères traditionnelles sont pyramidaux et ils sont enlevés pour couvrir en entier la sépulture du propriétaire lors de son enterrement. Ajoutez à cela le fait que tout jeune, en allant au troupeau, notre père adressait toujours une prière au Soleil levant. Etait-ce une référence au Dieu soleil Ra ? N'en représente pas moins une part essentielle à prendre en considération, à savoir : la place du serpent dans la société sérère, notamment le python.


  2. CONCLUSION

    Pour clore cette présentation du métissage qu'a connu connu l'Ethiopie, disons que, lorsque le nouveau Kaya Magan va répondre à l'Appel de la Race de Saba, et va préparer le chemin de « Retour de l'enfant prodigue », il va affronter le pire cauchemar de sa vie et n'aura de refuge que l'excuse de faire remonter Colette comme une ancienne egptienne. Ce cauchemar c'est justement le fait que Sédar chercher désespérément une méthode pour se présenter à ses parents, à son Sénégal natal, avec cette ancêtre égyptienne :

        « Tu fus africaine dans ma mémoire ancienne, comme moi comme les neiges de l’Atlas
        Mânes ô Mânes de mes Pères ! Contemplez son front casqué
        et la candeur de sa bouche parée de colombes sans taches, comparez sa beauté et celle de vos filles.
        Ses paupières comme le crépuscule rapide et ses yeux vastes qui s’emplissent de nuit.
        Oui c’est bien l’aïeule noire, la Claire aux yeux violets sous ses paupières de nuit »....
        ....« Egyptienne ! Comment ne serait-elle pas mon guide, ton haleine longue,
        tes senteurs de soleil feu de brousse !
        ...« Je n’amène d’Europe que cette enfant amie,
        la clarté de ses yeux parmi les brumes bretonnes ».
        ... « Or c’était une nuit d’hiver lorsque dehors mûrit le gel,
        que les deux corps sont fraternels.
        Les sifflets des rapides traversaient mon cœur longuement,
        de longs déchirements de pointes de diamant. J’ai réveillé
        les concubines alentour. Ah ! ce sommeil sourd qui irrite
        quand chaque flanc et le dos sont les plaies du crucifié.
        La poitrine succombe à de graves énigmes, et je meurs de ne pas mourir
        et je meurs de vivre le cœur absent. Elles m’ont parlé de l’Absente doucement.
         Doucement elles m’ont chanté dans l’ombre le chant de l’Absente,
        comme on berce le beau bébé de sa chair brune,
        mais qu’elle reviendrait la Reine de Saba à l’annonce des flamboyants.
        De très loin la Bonne Nouvelle est annoncée par collines,
        sur les pistes ferventes par les chameliers au long cours.
        Dites ! qu’elle est longue à mon cœur l’absence de l’Absente. »

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UN RAPIDE EXEMPLE POUR LE DICtiONNAIRE

Njamala Njogoy